Le mardi 14 décembre 2010
Douze millions de dollars dans un seul compte, mais aucune accusation n’a encore été portée
Nouvelle information sur les fraudeurs fiscaux canadiens au Liechtenstein
Quatre ans après que le gouvernement eut donné le nom de 106 Canadiens détenant des comptes bancaires non déclarés au Liechtenstein, le gouvernement Harper vient tout juste de confirmer qu’aucun de ces Canadiens n’avait encore été mis à l’amende ni accusé de fraude fiscale. Contrairement à l’Allemagne, aux États-Unis et à une foule d’autres pays, le gouvernement du Canada a décidé de ne mettre personne à l’amende ni d’imposer des frais à quiconque.
La population du pays se demande bien qui protège le gouvernement canadien.
En réponse aux questions du sénateur Percy Downe, de Charlottetown, le gouvernement a en outre admis que les sommes détenues dans les comptes canadiens au Liechtenstein s’élevaient à plus de 100 millions de dollars au total, la moins élevée étant 500 000 $ dans un seul compte, et la plus élevée, plus de 12 millions de dollars.
Tout contribuable canadien ordinaire qui s’avérerait être titulaire de comptes bancaires non déclarés et ne pas déclarer les revenus tirés de ces comptes serait pourchassé, accusé et mis à l’amende par l’Agence du revenu du Canada. Pourquoi ces deux poids deux mesures pour les richissimes Canadiens possédant des comptes bancaires étrangers secrets dans des paradis fiscaux bien connus?
« Les Canadiens qui ont des comptes bancaires dans notre pays paient tous leurs impôts. Pourquoi les Canadiens qui ont des comptes bancaires à l’étranger – dont certains renferment des millions de dollars – jouissent-ils d’un congé fiscal sous ce gouvernement? Qui est protégé », a voulu savoir le sénateur Downe.
Quand le sénateur Downe a soulevé cette question pour la première fois, le gouvernement fédéral a promis d’agir avec fermeté. En 2009, le ministre du Revenu de l’époque, Jean-Pierre Blackburn a déclaré : « Les coupables savent que tôt ou tard nous les trouverons […] Je leur dis : ‘Nous vous trouverons.’ » (Times – Colonist. Victoria, C.-B., 3 décembre 2009) Plus tôt dans l’année, il avait déclaré que la fraude fiscale était un grave problème au Canada et promis que « si quelqu’un nous doit quelque chose, nous allons récupérer ce qu’il nous doit. » (Saskatoon Star Phoenix, 19 février 2009)
Depuis 2007, les résultats sont loin d’être conformes aux engagements. L’Agence du revenu du Canada affirme avoir récupéré quelque 6 millions de dollars en arriérés, intérêts et amendes fiscaux. Compte tenu que le montant total des fonds cachés s’élève à plus de 100 millions de dollars – dont 12 millions de dollars dans un seul compte - , c’est un échec colossal.
Et pendant que l’on parlait d’intérêts et de peines, une autre réalité est devenue évidente : pas une seule amende n’a été imposée. Et pour cause : aucune accusation n’a été portée. Dans les quatre années qui se sont écoulées depuis que l’affaire a été mise au jour, aucun de ces Canadiens qui ont caché leur argent à l’étranger ne s’est présenté devant un juge, au Canada ou à l’étranger.
À un certain point, le ministre du Revenu Jean-Pierre Blackburn a dit s’attendre à ce que le gouvernement du Canada touche jusqu’à 20 millions de dollars en impôts et peines. (« Canada Revenue probe focuses on some RBC DS clients », CBC News, 14 décembre 2009). Cependant, le gouvernement n’a perçu qu’une infime partie de ce montant et les Canadiens se demandent si la promesse faite par Stephen Harper que « ces citoyens vont faire face à toute la force de la loi canadienne » (hansard, 30 septembre 2010) sera suivie par des actes concrets plutôt que par des réassurances verbales.
Ci-joint : Réponse aux questions écrites
déposée par le gouvernement du Canada, décembre 2010
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