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Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international

OTTAWA, le mercredi 19 octobre 2011

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd'hui à 16 h 15 afin d'examiner, pour en faire rapport, les faits nouveaux en matière de politique et d'économie au Brésil et les répercussions sur les politiques et intérêts du Canada dans la région, et d'autres sujets connexes.

Le sénateur A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Chers collègues, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit donc aujourd'hui en vue d'examiner, pour en faire rapport, les faits en matière de politique et d'économie au Brésil et les répercussions sur les politiques et intérêts du Canada dans la région, et d'autres sujets connexes.

Nous accueillons, de Citoyenneté et Immigration Canada, David Manicom, directeur général, Direction générale de l'immigration, et Sharon Chomyn, directrice générale, Région internationale.

Nous entendrons aussi, de l'Agence des services frontaliers du Canada, Peter Hill, directeur général des Programmes après le passage à la frontière, et Geoff Leckey, directeur général des opérations relatives au renseignement et au ciblage.

Le comité étudie donc les faits nouveaux en matière de politique et d'économie au Brésil et se penche sur nos intérêts et sur les enjeux en matière de politique étrangère en général. Les témoins, comme les membres du comité, ont déjà soulevé les questions de sécurité, les questions concernant la frontière et les conséquences sur les visas.

Nous vous avons invités à nous renseigner davantage sur les aspects qui nous préoccupent et nous intéressent. Je ne sais pas au juste lequel d'entre vous va commencer et qui va aider à répondre aux questions; avez-vous décidé de l'ordre dans lequel vous allez faire vos déclarations?

Sharon Chomyn, directrice générale, Région internationale, Citoyenneté et Immigration Canada : C'est moi qui commencerai par quelques remarques.

La présidente : Vous avez la parole.

Mme Chomyn : Merci de m'avoir invitée à prendre la parole ici aujourd'hui et de m'offrir ainsi la possibilité de contribuer à votre étude sur les relations entre le Canada et le Brésil.

À titre d'acteur politique et économique clé à l'échelle régionale et mondiale, le Brésil occupe une place hautement prioritaire dans la politique étrangère du Canada. La classe moyenne brésilienne ne cesse de s'élargir et le secteur des affaires est florissant, comme il sied à l'une des grandes économies de la planète enregistrant un taux de croissance parmi les plus rapides au monde. Un nombre plus grand que jamais de Brésiliens sont désireux de voyager dans le monde et sont en mesure de le faire. Par ailleurs, les liens entre les entreprises canadiennes et brésiliennes ne cessent de se multiplier. CIC reconnaît cette évolution et la salue.

Les liens personnels entre citoyens de nos deux pays sont une composante majeure de la relation entre le Canada et le Brésil. L'ambassade du Canada à São Paulo a reçu plus de 60 000 demandes de visa de résident temporaire en 2010, comparativement à quelque 44 000 en 2009. Et cette croissance se poursuit : le nombre de demandes reçues au cours du premier trimestre de 2011 représentait une augmentation de 51 p. 100 par rapport à la même période l'année dernière.

Parallèlement, le taux des demandes de visa présentées par les citoyens brésiliens partout dans le monde est passé de 91 p. 100 en 2006 à 95 p. 100 en 2010. Notre bureau des visas de São Paulo se classe aujourd'hui au quatrième rang pour ce qui est du nombre de visas de résident temporaire délivrés, tout juste après le Mexique. L'industrie du tourisme du Brésil prévoit un intérêt croissant continu pour les voyages au Canada au cours des prochains mois et des années à venir.

Dans ce contexte de marché en croissance, certains se disent inquiets de ce que le Canada se place dans une position désavantageuse par rapport à la concurrence en raison de l'obligation de visa et du processus de demande de visa. Le Canada a commencé à exiger un visa des Brésiliens le 6 juillet 1987 afin de faire face au nombre croissant de demandes d'asile. Cette mesure s'est avérée efficace puisque nous ne recevons désormais que peu de demandes d'asile de la part des Brésiliens.

[Français]

CIC a mis l'accent sur l'efficacité et l'amélioration des services, ce qui est parfois un défi, étant donné la croissance rapide et soutenue de la demande de services de visas au Brésil dans les dernières années. Les voyageurs brésiliens qui viennent au Canada en tant que touristes, gens d'affaires ou étudiants ont bénéficié de plusieurs façons du programme de modernisation à l'agenda du CIC.

[Traduction]

Je parlerai brièvement de quelques récents changements permettant à CIC d'améliorer la qualité des services offerts aux voyageurs brésiliens : la mise sur pied au Brésil d'un réseau de centres de réception des demandes de visa ou CRDV; la mise en ouvre d'un système moderne de traitement des visas, le SMGC, et la promotion de visas pour entrées multiples et la délivrance de visas pour entrées multiples à long terme. Nous entendons également élargir notre service Demande en ligne afin de le rendre disponible à tous les voyageurs outre-mer, y compris aux Brésiliens.

Des centres de réception des demandes de visa ont été mis sur pied dans trois grandes villes brésiliennes : São Paulo, Rio de Janeiro et Brasilia. Les CRDV offrent un service à longueur de journée, cinq jours sur cinq. Les agents du service à la clientèle parlant le portugais offrent un soutien à la clientèle au téléphone et par courriel. Ces agents peuvent également aider les demandeurs à remplir les formulaires, à s'assurer que leur demande est complète et à confirmer que tous les documents nécessaires y sont joints. Les CRDV offrent également aux clients un service de suivi à partir du Web. Les gens peuvent toujours présenter leur demande en personne au bureau des visas, mais nous les encourageons à utiliser les CRDV.

Le Système mondial de gestion des cas, le SMGC, est un système électronique moderne de traitement des cas qui finira par remplacer, à l'échelle du ministère, les nombreux systèmes de traitement ainsi que les répertoires de données devenus vétustes. Bien que nous ayons eu, au départ, des problèmes dans certaines missions en raison de la nouveauté du système, y compris à São Paulo, nous sommes convaincus que les gains d'efficience offerts par le SMGC bénéficieront à tous nos clients. Par exemple, à la faveur des avantages conférés à la fois par les CRDV et le SMGC, nous sommes en mesure de créer aujourd'hui, au Canada, des dossiers de visiteurs du Brésil à partir du SMGC. Nous avons ainsi pu accroître l'efficience de notre bureau à São Paulo. Nous pouvons faire face à d'importantes augmentations non prévues du volume des demandes en augmentant le personnel au Canada. Et comme les agents ne peuvent examiner les demandes qu'une fois que le personnel de soutien a créé les dossiers électroniques dans le SMGC, cette innovation a permis d'éliminer un important engorgement dans le processus de visas.

S'agissant des visas pour entrées multiples, valides à long terme, en juillet 2011, CIC a augmenté la période maximale de validité des visas en la faisant passer de 5 à 10 ans, et a donné pour instruction aux agents de délivrer, dans la mesure du possible, des visas pour entrées multiples à long terme. Les bureaux des visas encouragent les voyageurs à demander des visas pour entrées multiples et délivrent régulièrement des visas pour entrées multiples valides jusqu'à la date d'expiration du passeport. La validité des visas de 10 ans ne bénéficiera pas aux Brésiliens dont le passeport est valable pour 5 ans. Mais de 2010 à 2011, la proportion de Brésiliens ayant demandé un visa pour entrées multiples a doublé, passant de 20 p. 100 à 40 p. 100 environ. Les voyageurs brésiliens n'ont ainsi pas à retourner au bureau des visas et le personnel du bureau des visas dispose quant à lui de plus de temps pour s'acquitter des autres tâches.

Le service des demandes en ligne est entré en vigueur au Canada en 2008 et il est prévu que celui-ci couvre tous les secteurs d'activité de CIC à terme, tant au Canada qu'à l'étranger.

Certains de nos clients, y compris les gens d'affaires, se sont dits préoccupés par les délais de traitement pour les visas de résident temporaire au Brésil. L'année dernière, à la même époque, notre délai de traitement était de deux jours ouvrables seulement, ce qui — soit dit en passant — est inférieur à la moyenne mondiale. Ce délai de traitement a augmenté au cours de la dernière année en raison de l'augmentation considérable du nombre de demandes.

À l'instar de nos clients, nous aussi sommes préoccupés par les délais de traitement et nous nous y attaquons résolument. Au cours des derniers mois, nous avons au total affecté de façon temporaire 10 agents à São Paulo afin qu'ils prêtent main-forte à leurs collègues pour faire face à l'afflux de demandes. Nous avons en outre doté notre bureau d'un agent des visas permanent et de trois employés de soutien de plus. Nous avons mis sur pied le réseau des CRDV au Brésil en août, améliorant ainsi le service à la clientèle et augmentant l'efficience de notre bureau des visas en réduisant le nombre de demandes incomplètes à traiter. Nous sommes toujours à l'affût de nouveaux moyens d'utiliser le SMGC pour accroître l'efficience du traitement. Et nous continuerons d'envoyer des agents en affectation temporaire à São Paulo pour faire face aux augmentations imprévues du volume de demandes.

Nous continuerons de chercher des moyens de réduire les délais de traitement, mais nos délais sont plus courts qu'ils ne le sont aux États-Unis. Selon le site Web de l'ambassade des États-Unis au Brésil, la période d'attente pour obtenir une entrevue préalable à l'octroi d'un visa est actuellement de 84 jours à São Paulo. J'aimerais souligner ici que notre bureau ne reçoit en entrevue que très peu de demandeurs.

Bien que nous n'ayons pas mis en ouvre un Programme de traitement accéléré pour les gens d'affaires au Brésil, le bureau des visas a ouvré dans ce sens dans le cadre des programmes commerciaux au sein de notre consulat général et auprès de grandes entreprises bien connues qui envoient périodiquement des représentants au Canada. Ces entreprises sont autorisées à remettre une lettre de soutien que les demandeurs présentent au lieu des autres documents à l'appui habituellement requis des demandeurs de visa. Cette pratique a eu pour effet de simplifier le processus d'obtention d'un visa pour la majorité des voyageurs d'affaires.

CIC est conscient des préoccupations soulevées par les gens d'affaires au Canada et est disposé à travailler en collaboration avec le monde des affaires pour donner suite à ces préoccupations.

Avant de clore, j'aimerais dire quelques mots à propos des étudiants. Le Canada est une destination de choix pour les étudiants brésiliens et CIC ne demande pas mieux que de faire sa part pour les attirer ici. Le nombre de demandes de permis d'études a augmenté de façon constante, passant de 1 600 en 2006 à un peu moins de 3 000 en 2010. Le taux très élevé d'approbation des demandes de permis est demeuré stable, puisqu'il était de 89 p. 100 l'année dernière.

Les étudiants qui se rendent au Canada pour suivre un cours de courte durée — soit moins de six mois — n'ont pas besoin d'un permis d'études; ils ont tout simplement besoin d'un visa de résident temporaire. En 2010, environ 13 000 visas de ce genre ont été délivrés.

CIC continuera de chercher des moyens de faciliter la vie des voyageurs de bonne foi au Canada tout en veillant à ce que les personnes qui se rendent au Canada satisfassent aux exigences de la législation canadienne. Il s'agit là de notre double mandat : faciliter l'accès et le déplacement des voyageurs tout en protégeant le Canada et les Canadiens.

L'imposition d'un visa est un outil qui nous permet de sélectionner les visiteurs potentiels au Canada en nous assurant que toutes les exigences sont satisfaites, et nous nous efforçons de faire appliquer l'obligation de visa de la manière la plus efficiente, équitable et, tout compte fait, la plus simple possible. Nos initiatives de modernisation nous permettent d'appliquer l'obligation de visa de manière rigoureuse et efficace. En accordant des visas à long terme aux demandeurs de visas approuvés, nous améliorons le service offert aux voyageurs légitimes et nous permettons à notre personnel de consacrer plus de temps aux demandeurs susceptibles de ne pas satisfaire aux exigences prescrites pour obtenir un visa.

J'espère que ces quelques renseignements vous ont donné un bon aperçu du système de visa et de la façon dont nous tentons de le mettre en ouvre au Brésil.

[Français]

Peter Hill, directeur général, Programmes après le passage à la frontière, Agence des services frontaliers du Canada : Bonjour, honorables sénateurs.

[Traduction]

Je veux vous remercier de cette occasion qui m'est offerte de vous entretenir sur le rôle que joue l'Agence des services frontaliers du Canada dans le processus de demande des visas des ressortissants brésiliens.

Je suis accompagné de mon collègue, Geoff Leckey, qui a offert un témoignage devant ce comité sur un sujet semblable l'année dernière.

[Français]

L'Agence des services frontaliers du Canada a pour mandat de faciliter la libre circulation des marchandises et des voyageurs légitimes au Canada tout en assurant la sécurité du pays et de ses citoyens. Dans le cadre de la mission des visas, cela signifie que l'agence veille à s'assurer que ces personnes qui obtiennent la permission d'entrer au Canada ne représentent pas un risque à la sûreté et la sécurité nationale.

[Traduction]

Cela dit, c'est à Citoyenneté et Immigration Canada que revient la responsabilité d'établir les politiques qui déterminent pour quels pays des visas sont requis, de fixer les exigences et d'émettre les documents nécessaires.

Au bénéfice du comité, j'aimerais préciser le rôle de l'Agence des services frontaliers du Canada et son approche en deux dimensions dans le processus de l'émission des visas.

La première dimension consiste à répondre à un cas particulier venant de Citoyenneté et Immigration Canada demandant qu'un contrôle national de sécurité d'une demande de visa soit entrepris.

La seconde dimension s'applique à la frontière et fait partie des opérations journalières de l'Agence. Lorsqu'un visiteur arrive à un point d'entrée, l'agent des services frontaliers effectue la vérification des documents de voyage qui lui sont présentés et détermine si toutes les exigences en matière d'entrée au Canada sont satisfaites. Si à ce moment, il est fixé qu'une personne est interdite de territoire, les mesures d'exécution de la loi appropriées sont appliquées.

Pour ce qui est du processus de contrôle national de sécurité, comme ma collègue vous l'a indiqué tout à l'heure, des règles en vigueur depuis 1987 exigent que les ressortissants brésiliens possèdent un visa avant leur entrée au Canada.

Quand CIC reçoit une demande de visa, il lui arrive de demander à l'ASFC d'effectuer un contrôle national de sécurité de cette demande, selon le niveau et la nature des préoccupations. L'ASFC fait appel à plusieurs moyens d'enquête lorsqu'elle effectue un contrôle de sécurité qui incluent des consultations avec le Service canadien du renseignement de sécurité et la GRC afin d'établir si le demandeur représente une menace à la sécurité nationale ou à la sûreté du public.

Lorsque l'ASFC effectue le contrôle de sécurité, ses recommandations sont transmises à Citoyenneté et Immigration Canada. CIC forme alors la décision finale, de refuser ou d'accepter la demande, et émet les documents appropriés.

Lors du contrôle de sécurité, l'ASFC évalue si le demandeur représente un risque ou non en vertu des articles 34, 35 et/ou 37 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Ces articles se rapportent à des faits, actes ou omissions tels que la subversion, le terrorisme, l'espionnage, les crimes contre l'humanité, le génocide, les crimes de guerre et le crime organisé. Ces dispositions viennent appuyer la gestion de l'accès au Canada par l'Agence et lui permettent de faire des recommandations à CIC par le truchement du processus de contrôle national de sécurité et/ou en refusant l'entrée au pays à ces personnes dont la présence est préjudiciable en raison de la criminalité ou du risque à la sécurité nationale au moment de l'entrée.

Pour ce qui est des données sur les visas brésiliens, je peux vous affirmer que le nombre de cas ayant dû faire l'objet d'un contrôle national de sécurité est traditionnellement peu élevé. Par exemple, entre avril 2010 et août 2011, l'ASFC n'a reçu que 38 cas de CIC aux fins de contrôle national de sécurité. De ces cas, trois ont donné suite au retrait ou à l'annulation de la demande à la mission et un cas a donné lieu à une recommandation d'interdiction de territoire en vertu de l'article 35 qui traite des crimes de guerre.

Ce nombre représente environ 10 p. 100 des cas ayant fait l'objet d'une demande de contrôle de sécurité. Ces cas de renvois ont été menés à terme dans des délais raisonnables, c'est-à-dire environ 15 jours civils.

En conclusion, je tiens à signaler au comité que l'ASFC demeure investie dans un travail d'étroite collaboration avec ses collègues de CIC pour veiller à l'objectivité du programme de visas en maintenant son processus efficace et efficient.

[Français]

L'agence est donc appelée à trouver l'équilibre entre son double mandat de facilitation et d'exécution, de manière à appuyer CIC, le plus possible, sans pour autant mettre la sécurité nationale ou la sûreté des citoyens en danger.

[Traduction]

Je remercie le comité de cette occasion qui m'est offerte de témoigner et je répondrai volontiers à toutes les questions des membres.

La présidente : Merci pour ces déclarations d'ouverture.

Avant de céder la parole à mes collègues, j'aimerais obtenir une précision. Vous avez tous deux établi que vos services respectifs ont réagi efficacement face à l'accroissement de la demande d'échanges entre le Brésil et le Canada et avez précisé qu'il n'y a pas eu de gros problèmes, qu'on ne constate pas de tendance à une utilisation abusive des visas d'entrée et qu'il n'y a pas non plus de grands risques dans ce dossier. Vous n'avez pas écarté la possibilité qu'il y ait des cas isolés — et je ne veux pas ouvrir ce débat — mais vous avez précisé qu'il n'y a pas de tendance lourde.

Avez-vous vraiment évalué la capacité du Brésil à contrôler ses frontières? Serait-ce grâce à un contrôle efficace de la part des Brésiliens que les résultats du Canada sont plutôt satisfaisants, comme vous le signaliez, car nous sommes en mesure de nous adapter, ou ne tenez-vous absolument pas compte de ce que font les Brésiliens dans votre travail? Autrement dit, si nous devions continuer de demander à ce que nos relations avec le Brésil fassent l'objet de plus d'attention et qu'elles soient plus efficientes, dans l'intérêt du commerce, du tourisme et de l'enseignement, ne faudrait- il pas s'assurer que vos homologues brésiliens disposent d'un système comme le vôtre permettant de confirmer l'intégrité des voyageurs?

Mme Chomyn : Je peux vous dire que les décisions que nous prenons en matière de politique concernant les visas sont fondées sur des évaluations individuelles de chaque pays. Ces évaluations sont propres à chaque pays et elles reposent sur un certain nombre de critères.

Par exemple, nous tenons compte de la situation socioéconomique du pays, comme le taux de chômage et le revenu moyen par habitant. Nous examinons tout ce qui concerne l'immigration, comme le nombre de demandeurs d'asile au Canada originaires de ce pays, et nous cherchons à déterminer s'il y a des problèmes de mouvements illégaux, irréguliers nous nous intéressons à l'aspect sécurité et processus d'émission des documents de voyage. Nous examinons aussi les questions de sécurité et de sûreté, comme en ce qui a trait au terrorisme et au crime organisé. Nous voyons comment le pays gère et administre ses propres frontières. Nous examinons sa fiche de route en matière de droits de la personne et ses relations bilatérales.

Toute décision consistant à imposer l'émission de visa ou à lever une telle obligation, toute recommandation émanant du ministère tient compte des priorités et des intérêts généraux du gouvernement du Canada et n'intervient qu'après des consultations poussées avec les autres ministères fédéraux.

La présidente : Certes, mais ma question était celle-ci : Êtes-vous certain que les Brésiliens satisfont aux conditions de sécurité et que leur pays cherche à garantir l'intégrité de nos relations, notamment en ce qui concerne la sécurité et la sûreté dans le cadre de transactions commerciales ou autres?

Geoff Leckey, directeur général, Opérations relatives au renseignement et au ciblage, Agence des services frontaliers du Canada : Nous n'avons pas fait d'étude poussée à ce sujet en particulier, mais je signale au passage que vous avez raison de dire qu'on ne note pas de tendance à un risque élevé, que les demandeurs de visas brésiliens feraient peser sur le Canada. Si on nous le demandait, nous serions heureux de réaliser une telle étude détaillée.

La présidente : Ma question vient, bien sûr, de notre désir de veiller à ce que nous ayons de bonnes relations. Toutefois, des témoins nous ont dit que le Brésil est aux prises avec un problème de crime organisé et que, même si ce pays n'arrive pas en tête de liste en Amérique du Sud à cet égard, les Brésiliens sont conscients d'être aux prises avec un tel problème et de devoir s'y attaquer. Cette analyse confirme-t-elle ce que vous avez constaté de votre côté?

M. Leckey : Je vais vous répondre en citant des statistiques très intéressantes. Sur les 60 000 demandes reçues, 38 seulement ont été transmises à l'ASFC pour des examens de sécurité approfondis. Aucune de ces demandes de vérification n'a concerné le crime organisé.

La présidente : Voilà qui répond à ma question. Merci.

Le sénateur D. Smith : Je sais que l'idéal, c'est de ne pas avoir à imposer de visas aux résidents d'un pays, mais au cours des deux dernières années, nous avons examiné la situation des quatre pays BRIC, car il se trouve que nous leur imposons à tous des visas.

Vous ne nous avez fourni aucune statistique sur le nombre de demandeurs du statut de réfugié en provenance du Brésil l'année dernière. En avez-vous des statistiques à ce sujet? Je sais qu'il y a des demandeurs originaires de certains pays d'où l'on n'attend normalement pas de réfugiés, et pourtant, ça arrive.

Mme Chomyn : Si vous me le permettez, je vais consulter mes documents.

Nous disposons effectivement de statistiques qui remontent à 2008 et vous vous souviendrez que nous avons imposé les visas à compter de 1987. En 2008, nous avons reçu 113 demandes de statut de réfugié émanant de Brésiliens; en 2009, il y en avait 96; en 2010, 99 et, jusqu'ici cette année, du moins jusqu'à juin, il y en a eu 40.

Le sénateur D. Smith : Dans la mesure où ces demandes ont été réglées d'une façon ou d'une autre, savez-vous quel pourcentage de demandeurs a accédé au statut de réfugié?

Mme Chomyn : Oui. Je peux vous commenter les données de l'année dernière. Sur les 106 demandes de ressortissants brésiliens reçues l'année dernière, 9 ont été acceptées, 48 rejetées, 22 abandonnées et 27 retirées.

Le sénateur D. Smith : Le taux d'acceptation est donc de combien?

Mme Chomyn : Environ 11 p. 100.

Le sénateur D. Smith : C'est assez faible.

Mme Chomyn : Oui.

Le sénateur D. Smith : J'en ignore les raisons, mais les décisions étant rendues au cas par cas, il peut y avoir beaucoup de raisons différentes.

Pensez-vous qu'un des deux pays cherche à appliquer une politique qui lui permettra d'échapper à l'exigence de visa faite à ses ressortissants ou qu'il est plus probable qu'on en restera indéfiniment à la formule actuelle?

Mme Chomyn : Vous parlez du Canada et du Brésil?

Le sénateur D. Smith : Oui. Est-ce qu'un des deux pays cherche à parvenir à ce résultat ou est-ce qu'aucun des deux ne semble insister à cet égard pour le moment?

Mme Chomyn : Je ne suis pas au courant d'études qui seraient actuellement réalisées au Canada à ce sujet, mais notre ministère suit la situation au Brésil.

Le sénateur D. Smith : Je ne veux pas insister dans ce sens, je voulais simplement connaître les faits et votre réponse m'a éclairé.

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : J'apprécie beaucoup les informations que vous nous avez données. Je voudrais savoir, une fois la date du visa expirée, s'il arrive que des Brésiliens désirent rester au Canada? Si oui, de quels moyens on dispose au Canada pour les repérer et les expulser, ceux qui restent après la date d'expiration? Et comment ces moyens se comparent-ils à ceux des États-Unis?

[Traduction]

M. Hill : J'ai quelques statistiques sur les renvois de Brésiliens. Depuis 2000, et jusqu'au mois d'octobre de cette année, l'ASFC a renvoyé environ 1 326 Brésiliens. Sur ce nombre, 969 avaient vu leur demande de statut de réfugié rejetée et les 350 autres n'avaient pas formulé de demande d'asile. Sur les quelque 1 326 personnes renvoyées, 75 ont été identifiées comme étant des criminels, dont 25 ont vu leur demande d'asile rejetée.

Autrement, cette année nous avons renvoyé 70 Brésiliens, dont 48 étaient des demandeurs du statut de réfugié, les 22 autres n'ayant pas fait de demande. Sur ce nombre, il y avait huit dossiers criminels.

Je n'ai pas ici les données comparatives avec les États-Unis, mais je pourrais obtenir ces informations pour les remettre au comité. Ai-je répondu à toutes vos questions?

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : Je demanderais une autre chose concernant cela. Je ne sais pas si vous l'avez dans vos chiffres. J'ai demandé ceux qui auraient pu être renvoyés; est-ce que vous en avez acceptés et combien?

[Traduction]

M. Hill : Accepté en quel sens?

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : Je ne sais pas. Si, après l'expiration du visa, des gens ont demandé de rester au Canada et de devenir des citoyens canadiens — je ne parle pas des réfugiés là — est-ce que vous en avez gardé, des gens qui semblaient être très bien? S'ils ont fait la demande pour rester au Canada, est-ce que vous en avez acceptés? Vous nous avez donné les chiffres pour ceux qui ont été refusés.

[Traduction]

Mme Chomyn : Je suis désolée, mais je ne pense pas que nous ayons ce renseignement. Je serais heureuse de vérifier auprès du ministère pour voir si nous ne pourrions pas vous obtenir cette information, mais je ne pense pas que nous recueillions ce genre de donnée.

La présidente : J'apprécierais que vous vérifiiez si vous pouvez obtenir ce renseignement et que vous le communiquiez à la greffière qui le transmettra aux membres du comité.

Le sénateur De Bané : La question visait à déterminer combien de Brésiliens restent au Canada après expiration de leur visa. M. Hill vous a parlé de ceux qui veulent rester ici pour toutes sortes de raisons — ce sont des réfugiés ou autres — mais qu'en est-il de ceux qui ont obtenu un visa, qui sont venus au Canada et qui y restent ensuite, après expiration de leur visa? C'est ce que j'ai cru comprendre de la question de ma collègue, le sénateur Fortin-Duplessis.

La présidente : Mme Chomyn pourrait peut-être compléter sa réponse.

Mme Chomyn : Si cela ne vous dérange pas, je vais vous poser deux ou trois questions afin d'être bien certaine d'avoir compris ce que vous voulez obtenir du ministère.

Si je vous comprends bien, vous aimeriez connaître le nombre de Brésiliens débarqués au Canada en qualité de visiteurs, à qui l'on a permis de rester pendant une certaine période et qui ont ensuite cherché à prolonger leur séjour au Canada. C'est cela?

La présidente : Il faudrait, je pense, parler de ceux qui veulent rester au Canada — c'est peut-être un cas de figure, celui de ceux et de celles qui font une demande de prolongation de séjour, mais qu'en est-il des autres dont la durée de validité du visa a expiré et qui prolongent indûment leur séjour? Nous sommes en présence de deux catégories — du moins, d'après moi.

Mme Chomyn : Merci pour cette précision. Je pense pouvoir vous communiquer les données concernant les demandes de prolongation, mais pas celles concernant le nombre de personnes ayant prolongé indûment leur séjour.

Le sénateur De Bané : De plus, pouvez-vous déterminer s'il y a une tendance à cet égard, à partir d'une analyse portant sur plusieurs années?

Mme Chomyn : Bien sûr. Nous serions heureux de vous fournir cette information.

La présidente : Je crois que nous disposons de certaines statistiques à ce sujet, mais ai-je bien compris que nous ne retraçons pas les personnes qui prolongent indûment leur séjour? C'est ce que ça veut dire? Si je rentre au Canada en provenance du Brésil pour y demeurer trois mois, vous n'avez aucune façon de savoir si je reste plus longtemps?

David Manicom, directeur général, Direction générale de l'immigration, Citoyenneté et Immigration Canada : J'ai eu le plaisir de rencontrer certains d'entre vous à Delhi, lors de vos déplacements en Inde, et je porte donc deux casquettes.

Permettez-moi de répondre à votre question. Le Canada ne fait pas de vérification à la sortie du pays. L'identité de ceux et de celles qui ont dépassé la date d'expiration de leur visa peut être portée à l'attention des autorités canadiennes de différentes façons. Nos collègues de l'ASFC peuvent les intercepter dans le cadre de leurs activités, légales ou autres; ces gens-là peuvent faire une demande d'asile; ils peuvent déposer une demande de prolongation de visa; ils peuvent faire une demande d'admission au pays au titre d'une des catégories légales, depuis le territoire canadien. En revanche, s'ils ne se signalent pas d'une façon ou d'une autre auprès des autorités et demeurent simplement au pays, tant que nous ne ferons pas de contrôle de sortie, nous ne pourrons pas les repérer.

La présidente : Merci. Nous veillerons à obtenir ces statistiques si vous ne les joignez pas à notre témoignage.

[Français]

Le sénateur Nolin : Merci d'avoir accepté notre invitation. J'aurais une question pour les représentants de l'Agence des services frontaliers du Canada. J'aimerais que vous m'expliquiez le rôle des agents d'intégrité des mouvements migratoires, ce que vous appelez en anglais les migration integrity officers.

Je veux savoir combien il y en a, où sont-ils en poste, quels sont leurs responsabilités, comment cela fonctionne?

[Traduction]

M. Leckey : Il y a environ 60 agents d'intégrité des mouvements migratoires. Il faudrait que je vérifie leur nombre exact, mais il y en a au moins 50 ou 60. Ils sont postés à l'étranger, dans 45 ou 46 endroits différents. À l'origine, c'étaient des agents de liaison auprès des compagnies aériennes.

Le sénateur Nolin : De compagnies aériennes?

M. Leckey : Oui, des agents de liaison auprès de compagnies aériennes, dans les années 1980, quand le Canada et d'autres pays occidentaux ont constaté une augmentation troublante du nombre d'arrivants illégaux. Au début, ces agents de liaison devaient s'assurer que les passagers prenant des vols directs vers le Canada disposaient des documents appropriés et qu'ils seraient admis au Canada à leur arrivée.

Depuis lors, compte tenu de l'expansion dans l'univers du voyage, de l'augmentation du nombre de personnes qui se déplacent en général, les agents d'intégrité des mouvements migratoires à l'étranger ne sont plus en mesure de vérifier chaque vol direct à destination du Canada et une grande partie de leurs fonctions consiste désormais à former eux- mêmes des agents de compagnies aériennes pour qu'ils détectent à leur tour les documents frauduleux au moment de l'enregistrement et qu'ils repèrent d'autres signes donnant à penser que les passagers ne sont pas des visiteurs légitimes du Canada.

Ils passent beaucoup de temps à former ainsi le personnel des compagnies aériennes. Il demeure qu'ils continuent de vérifier eux-mêmes l'embarquement dans le cas de vols présentant de hauts risques. Avec le temps, leur rôle a évolué, parce qu'après un certain nombre d'années à l'étranger, ils travaillent au contact de représentants des organismes d'application de la loi, de l'immigration et des douanes, et qu'ils recueillent beaucoup de renseignements utiles à notre programme du renseignement que je représente. De façon générale, cela influe sur la politique du Canada qui concerne les voyageurs étrangers.

Le sénateur Nolin : Revenons-en au Brésil. Avez-vous des agents de ce genre là-bas?

M. Leckey : J'aurais dû vérifier, mais je crois que nous en avons deux.

Le sénateur Nolin : Je vais faire un lien entre ma question et celle de la présidente. Est-ce que ces agents sur place au Brésil — et supposons qu'ils soient deux — font enquête sur les particuliers ou vérifient-ils plutôt de façon aléatoire les listes de passagers?

M. Leckey : Comme je le disais, ils forment le personnel des compagnies aériennes qui assurent des liaisons directes avec le Canada afin que ceux-ci vérifient eux-mêmes les passagers. Ils se présentent à l'embarquement des vols qu'ils ont eux-mêmes définis comme étant plus susceptibles d'être empruntés par des voyageurs mal intentionnés.

Le sénateur Nolin : Combien le Canada accueille-t-il de vols en provenance du Brésil?

M. Leckey : Il faudrait que je vérifie le nombre exact.

Le sénateur Nolin : Je parle des vols problématiques.

M. Leckey : Il y en a peu, mais je ne veux pas vous laisser sur une simple impression. Je vais vérifier le nombre de vols de ce genre.

Le sénateur Nolin : Je crois qu'il est important de disposer de ce renseignement.

M. Leckey : Oui. Je pourrais également vous communiquer le nombre de personnes ayant été refusées à l'embarquement d'avions pour le Canada, pour des problèmes de pièces non conformes, et cela pour l'année dernière et peut-être même pour plusieurs années avant.

Le sénateur Nolin : Vous avez parlé de « fraude ». Dans les efforts que vous déployez pour aller chercher ce genre d'information, avez-vous déterminé s'il existe des réseaux de voyageurs se déplaçant avec de faux titres de voyage entre le Brésil et le Canada? Pourriez-vous vérifier ça pour nous?

M. Leckey : Oui et je vous fournirai une réponse plus complète à ce sujet également.

Le sénateur Nolin : Merci.

M. Leckey : Mon collègue me dit que nous avons un agent d'intégrité des mouvements migratoires au Brésil.

Le sénateur Finley : Je voudrais poser une question ou deux d'intérêt général qui, je crois, devrait s'adresser à Mme Chomyn.

Comme mon collègue le sénateur Smith l'a dit, dans un monde idéal nous pourrions sans doute nous passer de la nécessité d'imposer des visas au Brésil — notre monde idéal, pour le moment, étant le Brésil.

Je ne connais pas ce processus, mais combien de pays ne sont pas concernés par un visa d'entrée exigé par le Canada?

Mme Chomyn : Je ne connais pas ce nombre par cour, monsieur.

Le sénateur Finley : Pensez-vous que c'est plus de 50, moins de 100?

Mme Chomyn : Plus de 50, je dirais, surtout en Europe, en plus des États-Unis et de l'Australie, par exemple.

Le sénateur Finley : Et les Antilles?

Mme Chomyn : Il y a sans doute plus de pays des Antilles pour lesquels nous exigeons un visa que le contraire.

Le sénateur Finley : Et le Mexique, exige-t-on des visas des Mexicains?

Mme Chomyn : Depuis peu, oui.

Le sénateur Finley : Et nous ne l'avons pas fait pendant longtemps?

Mme Chomyn : C'est cela.

Le sénateur Finley : Pourquoi impose-t-on des visas aux Brésiliens, mais pas aux Mexicains — du moins pas dans la situation actuelle? Vous nous avez lu une liste de facteurs, mais j'aimerais tout particulièrement savoir pourquoi le CIC ne renonce pas à son exigence de visa dans le cas du Brésil. Pourriez-vous nous décrire cela un peu plus précisément?

Mme Chomyn : En fait, le visa obligatoire a été imposé aux deux pays pour à peu près les mêmes raisons, c'est-à-dire le nombre de demandeurs d'asile et, dans le cas du Mexique en particulier, le nombre élevé de demandes d'asile ayant été abandonnées ou retirées. On a estimé que c'était sans doute là une utilisation inappropriée du processus de demande d'asile.

Comme je le disais dans mes remarques liminaires, le visa a été imposé aux ressortissants brésiliens dans les années 1980 après qu'on eut soudainement repéré au Canada un nombre très élevé de Brésiliens qui n'étaient pas en règle et qui étaient susceptibles de déposer des demandes de statut de réfugié ou des demandes d'asile. Je peux vous donner certains chiffres à ce sujet, bien que ces informations remontent aux années 1980. En 1985, 85 Brésiliens ont fait des demandes, il y en a eu 169 en 1986 et de janvier à juin 1987, près de 1 300 ressortissants brésiliens ont été déclarés interdits de territoire au Canada et jugés comme étant susceptibles de déposer une demande d'aile.

Le Canada a décidé d'imposer les visas aux deux pays pour à peu près les mêmes raisons.

Le sénateur Finley : Ces chiffres datent des années 1980, il y a une vingtaine d'années de cela, et depuis, le Brésil est devenu un bien meilleur pays où le taux d'emploi s'est amélioré. Permettez-moi d'aborder le problème à l'envers. Savons-nous combien d'autres pays, à peu près aussi attractifs que le Canada, permettent aux Brésiliens d'entrer chez eux sans visa?

Par exemple, j'ai lu récemment, et je pense que c'était dans la Gazette de Montréal, la déclaration du PDG d'une grande société brésilienne qui affirmait qu'il lui fallait 10 jours pour obtenir un visa afin de venir au Canada tandis que, dans la même journée, il lui était possible d'acheter un billet d'avion pour Paris et de se retrouver en France quelques heures plus tard. Je suppose que la France n'impose pas de visa aux Brésiliens. Ai-je raison? Savez-vous si c'est le cas?

Mme Chomyn : Je sais que les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie imposent des visas aux Brésiliens. Je pense que les pays de l'espace Schengen ne le font pas, mais je vais vérifier cela pour vous.

Le sénateur Finley : S'ils peuvent entrer sans visa en France, est-ce que cela ne veut pas dire automatiquement qu'ils peuvent aller dans le reste de l'Union européenne sans visa également?

Mme Chomyn : Oui.

Le sénateur Finley : Pourriez-vous nous fournir des statistiques? Sans pour autant mobiliser tout un effectif pour obtenir ce renseignement, j'aimerais savoir pour quels pays le Canada n'exige pas de visa et quels pays autorisent les Brésiliens à entrer chez eux sans visa.

J'ai horreur de me répéter, mais au cours du présent examen par notre comité, la question des visas s'est posé directement tout comme ce fut le cas, avant que je siège ici, pour les autres pays BRIC. On nous dit — je ne sais pas si c'est vrai, et vous pourrez réagir à cela — que si nous proposions aux Brésiliens de venir au Canada sans visa, le Brésil cesserait automatiquement d'exiger un visa pour les Canadiens se rendant là-bas, raison pour laquelle toute cette question de visa devient importante.

Selon vous, est-ce que le Brésil agirait effectivement ainsi?

L'abandon des visas pourrait-il être visé par une de nos ententes?

Mme Chomyn : Je ne pense pas que cela fasse partie d'un quelconque accord de libre-échange ni que ce soit au programme des discussions. Personnellement, je l'ignore. Je sais que le Canada ne décide pas d'imposer des visas selon le principe de la réciprocité et qu'il ne suit pas non plus ce principe pour lever cette obligation. Plutôt que d'en venir à un accord négocié avec un autre pays, nous préférons nous fier sur nos évaluations pays par pays et tenir compte, à l'étape de la décision, des facteurs les plus importants pour le Canada, facteurs qui répondent aussi aux meilleurs intérêts de notre pays.

Le sénateur Finley : J'ai deux petites questions supplémentaires à vous poser. D'abord, en règle générale, combien dure le processus d'évaluation de la situation d'un pays en ce qui concerne l'imposition des visas? Deuxièmement, à quand remonte la dernière fois où l'on a effectué une telle évaluation dans le cas du Brésil?

Mme Chomyn : Excusez-moi, je ne peux répondre à vos questions aujourd'hui, mais je le ferai plus tard.

Le sénateur Finley : Je l'apprécierais. Merci beaucoup.

La présidente : Peut-être suis-je mal informée, mais j'ai cru comprendre que vous revoyiez régulièrement l'ensemble des données que vous avez pour tous les pays. Est-ce ainsi que vous vous y prenez ou examinez-vous chaque pays tous les quatre ans à moins que quelque chose d'autre ne justifie de le faire plus tôt? Quelle politique appliquez-vous? Comment vous y prenez-vous?

M. Manicom : Je commencerai par vous donner une réponse générale et les gens du ministère pourront vous fournir plus de détails.

Je ne suis pas particulièrement spécialisé, mais de façon générale, on peut dire qu'il existe un ensemble de statistiques et d'autres indicateurs qui nous permettent de conclure qu'un pays est sur le point de faire l'objet d'une levée des obligations relatives au visa. Quand les ressortissants d'un pays font l'objet d'un taux de refus élevé ou qu'ils recourent abusivement aux demandes d'asile, il n'est pas question pour nous d'envisager de ne plus imposer de visa. En revanche, en présence de pays comme le Brésil et d'autres pays d'Amérique latine pour lesquels les taux d'approbation sont élevés, dont les ressortissants n'ont que peu recours aux demandes d'asile et dont les indicateurs socioéconomiques commencent à évoluer pour tendre vers les niveaux de l'OCDE, nous avons tendance à faire davantage d'examens détaillés de pays. La tenue de tels examens donne lieu à un processus de consultation entre différents ministères.

Je pense que c'est probablement le maximum que nous pourrions faire. D'après les données, force est de constater que le Brésil marche dans la bonne direction. Nos collègues de la Direction générale de l'admissibilité, qui font ce travail, pourraient sans doute fournir des données plus détaillées au comité.

La présidente : Merci. Vous allez nous fournir des statistiques sur l'Europe, sur l'espace Schengen. Ce sera intéressant de savoir quand les pays de l'espace Schengen, à l'exception du Royaume-Uni, ont levé leur exigence de visa. Avant, ces pays agissaient de façon désordonnée et je suppose que tout cela s'est fait en liaison avec les négociations de Schengen.

Le sénateur Johnson : Ma question part du déplacement du premier ministre au Brésil, en août dernier, et de l'ouverture de trois centres de réception de demandes de visa à São Paulo, à Brasilia et à Rio de Janeiro. Dans la foulée de ce voyage, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, en juillet, a déclaré que le Canada commencerait à émettre des visas pour entrées multiples d'une durée de 10 ans plutôt que des visas couvrant une période maximale de cinq ans.

Quelles pourraient être les répercussions de ces deux initiatives destinées à faciliter la mobilité des étudiants, des touristes et des gens d'affaires entre le Canada et le Brésil? Selon vous, qu'est-ce que cela va donner?

Mme Chomyn : Il est évident que la présence des CRDV se fait déjà sentir dans toutes nos activités parce qu'ils offrent un service essentiel, puisque les gens peuvent déposer leurs demandes ou recevoir des conseils sur la préparation de leurs demandes afin de s'assurer qu'elles sont correctement remplies avant de les soumettre. Les CRDV peuvent retracer les demandes dans le système pour savoir où elles se trouvent à n'importe quel moment. Les CRDV servent de courroie de transmission pour communiquer aux demandeurs la décision rendue par un agent du bureau des visas. Les CRDV ne participent absolument pas à la prise de décisions. On pourrait dire qu'ils sont simplement un guichet.

Néanmoins, ils facilitent le processus en aidant les demandeurs à soumettre des demandes plus complètes. Ils facturent des frais. Ils sont là pour fournir des conseils sur la façon de remplir les formulaires. Ils peuvent renseigner les demandeurs sur l'avancement de leur dossier et ceux-ci savent à peu près quand ils peuvent espérer une décision.

Avec le SMGC qui est venu se greffer sur le réseau de CRDV, nous pouvons créer plus rapidement les dossiers nécessaires. Avant l'ouverture des CRDV, les demandeurs devaient se rendre au bureau, déposer leur demande et régler les droits exigés. Un agent prenait la demande en compte, ouvrait un dossier et rassemblait toute l'information. Le dossier était ensuite transmis à un agent qui rendait la décision.

Grâce à la combinaison SMGC et CRDV, tout ce travail d'ouverture des dossiers est désormais réalisé au Canada. En rentrant au bureau le lendemain matin, les agents trouvent des dossiers tout prêts sur lesquels ils peuvent travailler et à propos desquels ils peuvent commencer à formuler leurs décisions, plutôt que de se retrouver en queue du processus administratif. Les étudiants et, en fait, tous les demandeurs de visa, bénéficieront de cette initiative.

L'avantage le plus évident des visas pour entrées multiples tient au fait que plus la durée de validité du visa est longue et moins il est nécessaire de retourner à un CRDV ou au bureau des visas pour répéter le processus. Mon prédécesseur a bien insisté auprès de nos gestionnaires de programmes en immigration, partout dans le monde, bien avant l'annonce de l'allongement de la période de validité faite par le ministre, pour qu'ils émettent autant que faire se peut des visas pour entrées multiples.

Le sénateur Johnson : À maintes occasions, des témoins ont dit au comité que les Brésiliens avaient de la difficulté à entrer au Canada. Je me demande si ces initiatives vont faciliter leur venue.

Mme Chomyn : Avant la mise en ouvre de ces initiatives, le taux d'approbation des demandes de visa formulées par les Brésiliens se situait déjà dans les 90 p. 100. Le processus sera accéléré et les décisions seront rendues plus vite. Les agents peuvent désormais se concentrer davantage sur les cas dont ils sont saisis. En général, les dossiers d'étudiants sont un peu plus compliqués et prennent un peu plus de temps parce que, par exemple, l'agent doit être convaincu que l'étudiant a tous les moyens financiers nécessaires pour suivre ses cours et vivre au Canada. Il y a aussi les exigences médicales. Ces aspects prennent un peu plus de temps à régler. Nous estimons cependant qu'avec chaque initiative, nous raccourcissons le temps d'attente. Et cela est valable pour l'ensemble de nos activités.

Le sénateur Johnson : Savez-vous si l'on va embaucher plus de personnel dans les missions canadiennes au Brésil pour aller dans ce sens?

Mme Chomyn : Comme je vous le disais, des agents se sont relayés à la faveur de détachements temporaires pour aider à la prise de décisions. Nous avons aussi ajouté un agent et du personnel de soutien à l'effectif sur place. Nous suivons en permanence la situation pour ajuster nos ressources en fonction du volume des demandes. D'ailleurs, nous collaborons avec des organismes qui sont parties prenantes et avec d'autres pour essayer de prévoir le volume de demandes dans les mois à venir et ainsi pouvoir disposer des ressources nécessaires avant un pic éventuel. Nous voulons ainsi éviter les situations où le temps de traitement est prolongé à cause d'une inadéquation entre les ressources et le nombre de demandes.

Le sénateur Johnson : Savez-vous combien de personnes travaillent dans nos missions?

Mme Chomyn : Au Brésil?

Le sénateur Johnson : Oui.

Mme Chomyn : Pour le moment, en ce qui concerne le programme des visas, nous avons 17 personnes. Sur ce nombre, six sont des agents qui rendent des décisions dont un est un agent d'intégrité des mouvements migratoires; mon collègue vous en a parlé tout à l'heure. Il y a en plus 10 employés de soutien.

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : Vous avez mentionné les étudiants. J'ai une question. J'aimerais savoir, quand un étudiant fait une demande de visa, est-ce qu'il fait aussi la demande de visa pour sa famille, s'il est marié, quand il veut venir étudier ici?

[Traduction]

Mme Chomyn : Oui, c'est possible.

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : C'est à ce moment que vous vérifiez s'il a assez de fonds pour faire vivre sa famille une fois rendu au Canada et pouvoir étudier?

[Traduction]

Mme Chomyn : C'est exact.

Le sénateur De Bané : Je vais vous dire ce que je pense et vous réagirez ensuite. Premièrement, quand quelqu'un veut immigrer au Canada, peu importe d'où il vient dans le monde, il doit faire une demande en ce sens. Qu'il vienne d'un des pays de l'Union européenne, des États-Unis, de Grande-Bretagne ou d'ailleurs, il doit faire une demande et se plier aux règles. Et puis, il y a ceux qui veulent venir chez nous pour y passer un bref séjour en qualité de touriste ou autre.

Vous conviendrez sûrement avec moi que, pas plus sous la présidente actuelle que sous ses deux prédécesseurs, Cardoso et Lula, on a pu lire quoi que ce soit indiquant que les droits fondamentaux des Brésiliens ne sont pas respectés. D'après les chiffres que vous nous avez fournis, on voit bien que très peu de ressortissants brésiliens peuvent prétendre être persécutés.

Je dirais qu'à cause d'un tout petit groupe de gens qui essaient de rentrer en fraude, nous imposons à l'ensemble des Brésiliens un régime qui est en fait destiné à corriger nos politiques défaillantes en matière de déportation d'immigrants illégaux. Nous pourrions peut-être changer tout cela s'il nous était possible de déporter rapidement et efficacement ceux et celles qui ne sont pas censés se trouver chez nous, qui abusent du système. Ils ne sont pas nombreux, mais c'est à cause d'eux que nous imposons ce régime à l'ensemble des Brésiliens. Mon raisonnement est-il erroné? N'hésitez pas à me répondre franchement.

La présidente : Et n'hésitez pas à être bref, parce que nous commençons à manquer de temps.

M. Manicom : Je ne sais pas si votre raisonnement est erroné, sénateur, mais il faut bien être conscient du fait que le Brésil est encore un pays en développement de quelque 100 millions de pauvres complètement désespérés, cela malgré les efforts héroïques de leurs récents présidents et bien que ce pays s'approche graduellement d'un niveau où nous pouvons envisager de lever l'imposition de visas. Pour vous le dire franchement, nous ne savons pas comment les Brésiliens, notamment ceux qui appartiennent à la classe moyenne ou les très pauvres, réagiraient s'ils pouvaient embarquer n'importe quand à bord d'un avion se rendant au Canada.

Nous pourrions imaginer alors devoir faire face à un important afflux de migrants, qui ne seraient pas tous nécessairement des demandeurs d'asile, mais des personnes arrivant sans permis de travail, par exemple. Voilà le genre de considérations dont tient compte le gouvernement du Canada.

Le régime des visas n'est pas particulièrement agréable, mais j'estime que pour la somme de 75 $, le voyageur ou son agent de voyage peut obtenir un visa une semaine, en moyenne, après avoir déposé la demande. Ce n'est sans doute pas un fardeau épouvantable quand on tient compte de tout ce qu'il faut faire pour organiser un voyage et que 95 p. 100 des demandes sont acceptées.

Nous disposons donc du filtre des visas. Nous essayons de faire en sorte qu'il soit le plus efficace possible. Il est vrai que l'obtention du visa est une corvée et il est vrai aussi que tous les résidents d'un pays doivent, dans une certaine mesure, payer pour les pots cassés par un tout petit nombre d'entre eux.

Je le répète, et il est possible que mes collègues de l'ASFC veuillent ajouter quelque chose : le Brésil a réalisé d'énormes progrès. Il demeure que le niveau de vie par habitant est sans commune mesure avec celui du Canada, et que le Brésil compte une importante population pauvre. Si je ne m'abuse, il y a quelque 8 millions d'habitants dans les bidonvilles de São Paulo. C'est là une autre partie de la réalité du Brésil.

Le sénateur Downe : Je serai bref. Dans votre mémoire, vous dites qu'il y a eu 60 000 demandes de visa. Combien ont été approuvées? Les 60 000?

Mme Chomyn : Le taux d'acceptation dans le cas du Brésil est de 95 p. 100.

Le sénateur Downe : Au coût de 75 $ par visa?

Mme Chomyn : Dans le cas d'un visa pour entrée unique.

Le sénateur Downe : Et pour un visa pour entrées multiples, combien en coûte-t-il?

Mme Chomyn : 150 $.

Le sénateur Downe : Cette opération s'autofinance-t-elle? Allez-vous chercher suffisamment de revenus pour payer le salaire des employés qui travaillent à la section des visas au Brésil?

Mme Chomyn : Non. Les recettes que nous dégageons grâce au programme des visas ne servent pas à financer ce programme. Elles sont versées au Trésor et les sommes obtenues grâce aux droits exigés pour l'émission des visas ne suffisent pas pour administrer le programme.

Le sénateur Downe : Je vois par ailleurs dans votre mémoire que vous dites avoir dû envoyer 10 fonctionnaires à titre temporaire au Brésil pour régler le problème des arriérés. Quelle était l'ampleur de ces arriérés avant que vous fassiez cela?

Mme Chomyn : Très bonne question. Je vais être franche avec vous en vous disant que je ne sais pas exactement quelle méthode a été utilisée à cet égard, bien que nous nous rencontrions régulièrement pour parler de la situation de chacune de nos missions. Pour ce qui est du seuil, je ne peux vous donner ce chiffre aujourd'hui, mais je serais heureuse de vous transmettre plus tard d'autres informations afin de vous expliquer comment nous prenons ce genre de décisions.

Le sénateur Downe : Combien de fonctionnaires de la section des visas sont engagés localement et combien sont Canadiens?

Mme Chomyn : Je vais consulter mes notes. Sur les 17 employés que nous avons sur place, quatre sont des agents basés au Canada; ce sont des agents de visa que nous envoyons en poste là-bas et qui résident donc au Brésil pendant deux ans normalement. Et puis, il y a 13 employés recrutés localement.

La présidente : Merci, sénateurs, d'avoir su terminer dans les temps. Merci à nos visiteurs pour les renseignements qu'ils nous ont communiqués.

Vous constatez d'après les questions que nous posons que les visas, l'entrée au pays, la sécurité et la sûreté des Canadiens de même que l'efficacité commerciale sont liés et que ce sont des sujets qui préoccupent le comité. Vous nous avez transmis les renseignements que nous voulions et nous espérons que vous nous ferez parvenir les autres par écrit. Au nom du comité, je vous remercie d'être venus nous rendre visite.

Honorables sénateurs, le second groupe de cet après-midi est constitué de Paul Davidson, président-directeur général de l'Association des universités et collèges du Canada, et de Marie-Josée Fortin, directrice, Partenariats internationaux, à l'Association des collèges communautaires du Canada.

Je tiens à leur indiquer que nous nous intéressons beaucoup à ce qui semble être un resserrement très net des relations entre le Brésil et le Canada dans le domaine de l'enseignement. Nous ne savons pas vraiment comment cela se traduit en chiffres. Nos sources canadiennes nous ont indiqué que les Brésiliens veulent apprendre l'anglais, mais je suis consciente que nos relations ne se limitent pas à ça. Nous ne savons pas exactement, par ailleurs, si ce phénomène est récent ou s'il a suivi une progression régulière. Nous comptons sur vous pour nous fournir ces renseignements, puisque c'est ce dont vous vous occupez au quotidien. Nous sommes au courant de ce que vous faites. Vous avez déjà comparu devant nous. Donc, bienvenue de nouveau parmi nous.

Paul Davidson, président-directeur général, Association des universités et collèges du Canada : Merci, je m'appelle Paul Davidson et je représente l'Association des universités et collèges du Canada. Nous représentons 95 universités et collèges conférant des grades universitaires, partout au Canada. Je suis content d'être ici. L'année dernière, j'ai témoigné devant votre comité juste avant le début de la mission de l'AUCC en Inde. Nous étions accompagnés de 15 présidents d'établissements et je peux vous dire que cette mission a beaucoup rapporté au Canada parce qu'elle nous a permis de resserrer notre collaboration en matière de recherche et de favoriser la mobilité des étudiants dans les deux sens. Tout cela est très bien pour nos deux pays et pour nos économies respectives.

D'ailleurs, l'éducation internationale au Canada, et surtout le recrutement d'étudiants étrangers qui fréquentent nos établissements, rapporte plus de 6,5 milliards de dollars à l'économie canadienne. C'est plus que nos exportations de charbon ou de bois d'ouvre. Tout aussi important, l'éducation internationale permet aux étudiants canadiens de travailler aux côtés d'étudiants étrangers de qui ils peuvent apprendre.

Il faut ajouter à ça les liens qui sont créés par le truchement de ce que Kevin Lynch a baptisé la « connectivité dans l'éducation », surtout dans le cas de la collaboration mondiale dans le domaine de la recherche d'envergure.

[Français]

Je me réjouis du fait que le Brésil constitue une priorité stratégique pour le gouvernement du Canada. En effet, le Brésil sera sous peu considéré comme une des cinq grandes puissances économiques. Ce pays disposait encore de ressources lui permettant d'investir au sortir de la récession mondiale, et il investit massivement en enseignement supérieur et en recherche. De nombreuses universités canadiennes ont tissé des liens solides avec le Brésil au cours des dernières décennies, et ce pays est devenu une priorité stratégique pour les universités canadiennes au cours des 18 derniers mois.

Par la collaboration, nous souhaitons faire du Canada un partenaire de choix pour la recherche afin de stimuler l'innovation au sein de l'économie mondiale et d'alimenter la prospérité mutuelle.

[Traduction]

En avril 2012, soit dans quelques mois, l'AUCC pilotera au Brésil une mission à laquelle participeront 25 présidents d'universités. Nous avons été ravis d'entendre le premier ministre Harper annoncer, lors de son récent passage au Brésil, que Son Excellence le gouverneur général dirigerait notre mission.

Cependant, toute cette question ne se ramène pas à des visites sélectes. Il s'agit plutôt de l'engagement stratégique qui précède et qui suit de telles missions. C'est pour cela qu'en juin dernier, l'AUCC a organisé un atelier de deux jours qui a porté sur l'élaboration d'une stratégie d'enseignement supérieur appliquée au Brésil. L'événement a été une réussite. Nous avons accueilli plus de 100 participants représentant une cinquantaine d'universités canadiennes, d'universités brésiliennes, de ministères fédéraux et d'organismes de financement de la recherche.

À l'issue des conversations, nous avions une meilleure idée de la portée, de l'ampleur et de l'urgence d'une intervention en collaboration avec le Brésil.

Permettez-moi de passer un peu de temps sur ces questions de portée, d'ampleur et d'urgence. À l'instar du Canada, le Brésil couvre un vaste territoire, et il présente à peu près les mêmes forces que nous, comme en agriculture et en aquaculture, en énergie, en foresterie, en aérospatiale, en biotechnologie, en nanotechnologies et en TIC. Les universités canadiennes sont conscientes qu'elles ont toutes un rôle à jouer pour favoriser leurs liens avec le Brésil.

Pour ce qui est de la question de l'ampleur, j'ai déjà dit que, dans le courant de la présente législature, le Brésil deviendrait la cinquième plus grande économie mondiale. Cette croissance engendre une demande de main-d'ouvre semi-qualifiée, qualifiée et professionnelle. Le Brésil investit dans des effectifs jeunes qu'il prépare aux réalités mondiales actuelles, et il cherche à accroître sa capacité de recherche, de même que les occasions de collaboration avec des partenaires internationaux.

Plus tôt cette année, la présidente du Brésil, Dilma Rousseff, a annoncé que 75 000 bourses universitaires seraient remises à des étudiants de premier cycle et à des doctorants pour leur permettre d'aller étudier à l'étranger. Les universités canadiennes veulent accueillir ces étudiants.

Pour vous donner une idée de l'ampleur du marché dont on parle, le Brésil a déjà produit deux fois plus de diplômés au doctorat que le Canada. Il y en avait environ 11 000 au Brésil en 2008, contre quelque 5 400 au Canada en 2009. Selon un récent classement des universités d'Amérique latine publié par The Economist, 65 des 200 universités recensées se trouvent au Brésil. Grâce à la collaboration, les universités et le secteur privé canadiens, de même que le gouvernement fédéral, pourraient rassembler leurs capacités afin de resserrer leurs liens avec le Brésil.

Passons maintenant à la question de l'urgence. Le monde entier est en train de cogner à la porte du Brésil et comme le Canada n'est ni le plus rapide ni le plus gros des pays en lice, il doit se montrer plus malin.

[Français]

Le Brésil est à la recherche de partenariats et il est prêt à investir. Le Canada dispose actuellement d'une nanoseconde pour saisir l'occasion et s'engager avec cette puissance latino-américaine. Saisissons cette opportunité.

Vu la capacité de son économie et de ses finances publiques, le Canada est en position pour devancer ses concurrents s'il va de l'avant de manière intelligente.

[Traduction]

Je me dois de revenir sur cette question d'urgence. Pour vous donner une idée de la rapidité avec laquelle évolue le domaine de l'éducation internationale, sachez qu'entre le moment où j'ai témoigné devant votre comité, il y a quelques mois, et aujourd'hui, le nombre d'inscriptions dans les universités chinoises a augmenté de 1,5 million d'étudiants. Nous n'avons pas encore un million d'étudiants inscrits dans les universités canadiennes.

Si je me réjouis de l'examen officiellement entrepris par votre comité, je ne peux que vous exhorter, chacun, à rappeler à vos caucus respectifs qu'il faut bouger rapidement pour sauter sur les occasions qui s'offrent à vous. Il m'arrive parfois de désespérer, quand le Canada semble presque délibérément passer à côté d'occasions en or.

Je suis ravi de constater certains signes récents qui sont encourageants. Par exemple, la semaine dernière, le gouvernement a annoncé la création d'un groupe d'experts chargé de le conseiller sur l'élaboration d'une stratégie en matière d'éducation internationale. Voilà une décision intelligente et stratégique. Il nous faut travailler ensemble.

Dans le cas du Brésil, tout particulièrement, nous cherchons à établir des liens importants à l'échelle du gouvernement du Canada. Par exemple, l'AUCC collabore avec le comité Canada-Brésil en science et technologie au sujet de la préparation de notre mission afin de trouver des façons d'aligner nos activités sur celles du comité. Je crois comprendre qu'on veut véritablement réserver, dans le programme de notre mission au Brésil, un élément consacré à la future stratégie numérique du Canada.

Je tiens aussi à souligner l'engagement très actif de notre premier ministre au Brésil, l'été dernier, quand il a annoncé la création d'un forum de PDG du secteur privé. Nous allons travailler au niveau de ce forum afin d'établir d'autres liens. Il y a donc de l'espoir dans nos relations.

Et puis, nous avons tiré certains enseignements. Nous avons réalisé des gains importants dans le cas de l'Inde. J'ai été heureux de voir David Manicom témoigner tout à l'heure, parce qu'il a grandement aidé à régler la situation du traitement des visas en Inde, quand il était en poste là-bas.

Après notre travail en Inde, nous avons tiré certains enseignements. Premièrement, nous avons appris qu'il est nécessaire de veiller à ce que le gouvernement du Canada puisse prendre des engagements tangibles à la faveur de telles missions.

Dans le cas de l'Inde, nous avions espéré que le gouvernement serait en mesure de contribuer autant que les universités canadiennes. Nous avons annoncé des bourses de 4 millions de dollars dotées par les universités elles- mêmes. Ces annonces ont été bien accueillies et elles ont favorisé un afflux d'étudiants. Le ministre des Ressources humaines et du Développement de l'Inde a chaleureusement accueilli notre annonce, mais il nous a gentiment rappelé que son pays devait instruire 550 millions d'habitants et construire 1 400 universités. Il nous a finalement demandé quand le Canada serait sérieux et quand il jouerait dans la cour des grands.

Nous ne voulons pas que cette situation se reproduise au Brésil et c'est pour cela que nous avons adressé au Comité permanent des finances un mémoire dans lequel nous réclamons un investissement important en vue de faciliter la collaboration internationale en matière de recherche de grande envergure. Nous espérons qu'en avril prochain, nous pourrons nous enorgueillir de l'engagement du Canada à instaurer ce genre de liens dans une économie mondiale.

Je pourrais continuer, mais vous devez encore entendre ma collègue des collèges communautaires et c'est quand même la période des questions qui fait toute la valeur de ce genre d'échanges. Merci beaucoup de vous intéresser au Brésil et au rôle des universités dans la promotion des relations que le Canada entretient avec d'autres pays.

[Français]

Je vous remercie encore une fois des efforts que vous consacrez à nos relations avec cet important partenaire.

Marie-Josée Fortin, directrice, Partenariats internationaux, Association des collèges communautaires du Canada (ACCC) : L'Association des collèges communautaires du Canada est la voie nationale et internationale de 150 collèges, instituts, cégep et polytechniques publiques depuis près de 40 ans. Avec des campus dans 1 000 collectivités urbaines, rurales et éloignées, ces établissements offrent des services d'éducation aux apprenants de tous âges, de tous les milieux socio-économiques. Ils sont les éducateurs de choix en matière de compétence avancée répondant aux besoins du secteur économique et social.

Depuis la fin des années 1970, l'ACCC et ses membres ont réalisé près de 700 projets internationaux pour une valeur de plus de 450 millions dans 90 pays.

Aujourd'hui, je vous entretien d'une belle histoire de partenariat qui perdure depuis une décennie entre l'ACCC et ses collèges, le ministère de l'Éducation du Brésil ainsi que du Réseau des instituts fédéraux de l'enseignement professionnel, scientifique et technologique.

Le gouvernement Lula avait mis en ouvre des programmes aux fins d'inclusion, de développement économique et social qui a permis à 24 millions de personnes de quitter la situation de pauvreté et à 36 millions d'entrer dans la classe moyenne. Parallèlement, on a également vu passer le nombre d'instituts fédéraux d'enseignement de 140 campus, en 2003, à 354 campus en 2011.

Le savoir-faire des collègues canadiens à répondre aux besoins réels des employeurs locaux et à intégrer les apprenants marginalisés dans nos établissements a plu au ministère de l'Éducation du Brésil.

C'est dans ce cadre de programme d'inclusion que l'ACCC a appuyé ses partenaires brésiliens dans la réalisation du projet Mulheres Mil et ce, avec l'appui financier du gouvernement canadien, l'ACDI et l'agence brésilienne de coopération.

Mulheres Mil est un projet pilote qui a été mis en place dans 13 instituts fédéraux des régions nord et nord-est du pays dans le but d'améliorer la vie de 1 000 Brésiliennes. Projet audacieux et inédit au Brésil et particulièrement dans le réseau des instituts fédéraux, le projet Mulheres Mil nous a mis au défi de travailler sur l'exclusion de jeunes femmes et adultes en situation de vulnérabilité économique et sociale. Outre les objectifs immédiats, il y a eu également d'autres retombées qui, ne sont ni simples ni évidentes à mesurer, telles que la découverte de la citoyenneté, la récupération de l'estime de soi, l'amélioration des relations familiales et de la vie en société dans les communautés, en plus d'encourager les femmes à retourner sur les bancs d'école. En un mot : Ces femmes ont commencé à croire en elles.

La nouvelle présidente brésilienne, Dilma Rousseff, a lancé son programme « Brésil sans misère » visant à éradiquer la pauvreté extrême qui touche encore 16 millions de Brésiliens.

C'est dans ce contexte que le 11 août dernier, le gouvernement brésilien a fait l'annonce que Mulheres Mil devenait maintenant un programme national qui permettra à 100 000 femmes de toutes les régions du Brésil d'en bénéficier.

De plus, les partenaires brésiliens souhaitent poursuivre la relation avec nous sous d'autres formes. En octobre 2010 à Rio de Janeiro, l'ACCC et ses membres a été invité au premier forum Brésil-Canada.

Plus de 60 délégués canadiens ont participé. Ce forum a permis de conclure plus de 46 protocoles d'entente pour des échanges étudiants et enseignants ainsi qu'au niveau de la recherche appliquée.

Le 26 juillet dernier, la présidente de la république a lancé le Programme « Science sans frontière ». Ce programme prévoit accorder jusqu'à 75 000 bourses dont 15 000 pour le secteur de la formation technique et professionnelle. Nos partenaires brésiliens privilégient le Canada comme premier choix.

Les étudiants étrangers au Canada contribuent 6,5 milliards de dollars à l'économie, créent plus de 83 000 emplois et produisent plus de 291 millions en recette fiscale.

Les collèges canadiens souhaitent accueillir des étudiants brésiliens. Toutefois, certaines contraintes financières et la compétition avec d'autres pays offrant la gratuité scolaire ou des bourses complémentaires nous limitent grandement. Malheureusement, nous ne pouvons offrir ces mêmes privilèges.

Si nous voulons attirer ces étudiants brésiliens dès l'automne prochain et être compétitifs avec les autres pays, nous avons besoin de l'appui financier du gouvernement fédéral.

Nos partenaires brésiliens seront à Montréal du 14 au 18 novembre prochain pour le deuxième forum Brésil-Canada sur la formation professionnelle et technique. Le programme de bourses sera au cour du sujet afin de trouver des solutions concrètes pour accueillir le maximum d'étudiants brésiliens.

Je profite de l'occasion pour vous inviter à participer à ce forum Brésil-Canada regroupant les recteurs des instituts fédéraux, les représentants du ministère de l'Éducation du Brésil ainsi que nos présidents de collège.

[Traduction]

Le sénateur Downe : Dans votre exposé, vous avez indiqué que 25 présidents d'universités participeront à la mission du gouverneur général au Brésil. Représenteront-ils toutes les provinces du Canada?

M. Davidson : Effectivement et nous nous réjouissons du niveau d'intérêt et de participation qu'a suscité cette mission. Nous sommes en train de confirmer la composition définitive de l'équipe, mais il y aura des présidents de partout au Canada, de tous les types d'universités, celles qui travaillent beaucoup dans le domaine de la recherche, des universités offrant des programmes de premier cycle et des universités proposant les trois cycles. La mission sera très représentative.

Le sénateur Downe : Des invitations ont été adressées à toutes les universités et il leur appartenait de décider si elles voulaient participer, c'est cela?

M. Davidson : Oui.

Le sénateur Downe : Les présidents de collèges communautaires ont-ils aussi été invités?

M. Davidson : Ils ne participent pas à cette mission, mais l'AUCC en partenariat avec l'Association des collèges communautaires du Canada et d'autres a mis sur pied un consortium canadien de promotion de nos établissements d'enseignement à l'étranger et nous travaillons ensemble à la promotion de la marque Canada dans le reste du monde.

Le sénateur Downe : Dans votre exposé, vous avez dit que le Brésil avait annoncé que 75 000 bourses seraient accordées à des étudiants afin qu'ils puissent aller étudier à l'étranger. Il y a quelques semaines, nous avons entendu un représentant du gouvernement qui nous a parlé de 100 000 bourses. Qu'en est-il au juste?

M. Davidson : Il faut ajouter à cela 25 000 bourses promises par le secteur privé brésilien.

Le sénateur Downe : Donc le total est de 100 000?

M. Davidson : Oui.

Le sénateur Downe : Avez-vous étudié les raisons pour lesquelles l'Australie est parvenue à attirer autant d'étudiants étrangers? Je crois savoir que 7 p. 100 des étudiants du monde entier vont en Australie, mais que nous en accueillons moins de 3 p. 100 au Canada. Quels programmes ce pays offre-t-il que nous pourrions imiter?

M. Davidson : Mme Fortin voudra peut-être vous en parler, mais je vais commencer. L'Australie s'est très vite rendu compte de la valeur des étudiants étrangers pour ses universités, son économie et pour le pays en général. Le gouvernement fédéral de l'Australie a engagé des ressources importantes pour orchestrer une campagne coordonnée de promotion de l'éducation internationale. Nous avons beaucoup à apprendre de cette démarche.

Depuis mon dernier témoignage ici, nous avons tiré d'autres enseignements. Il est important d'attirer des étudiants venant de différents pays et de s'assurer qu'ils sont tous correctement accueillis dans un environnement sûr et accueillant. Les incidents qui se sont produits en Australie ont grandement compliqué les relations de ce pays avec l'Inde.

L'autre élément qu'il ne faut pas perde de vue, c'est que les étudiants étrangers apportent énormément sur les campus canadiens, comme sur tous les campus d'autres pays, grâce à leurs compétences linguistiques, à leur culture, à leurs liens économiques et diplomatiques. Il ne faut pas les considérer comme des vaches à lait servant uniquement à financer le réseau canadien de l'enseignement supérieur.

Le sénateur Downe : Vous avez dit que l'Australie a lancé une campagne coordonnée de promotion de l'éducation internationale. Ce pays subventionne-t-il également des bourses pour étudiants étrangers ou leur accorde-t-il des subventions?

M. Davidson : Pas pour tous les étudiants, mais l'Australie administre une série d'activités et de programmes destinés à attirer les étudiants étrangers et à retenir les meilleurs d'entre eux.

Le sénateur D. Smith : Comment le Canada est-il perçu par les Brésiliens pour ce qui est de l'enseignement supérieur, par rapport aux États-Unis, aux principaux pays européens, au Royaume-Uni et à l'Australie?

Je ne peux m'empêcher de vous parler de cette jeune Australienne que j'ai rencontrée il y a un an et demi et qui s'était retrouvée à l'Université York après avoir fait ses recherches. Tous les ans, The Economist fait paraître le classement des 100 premières écoles de commerce au monde et le dernier est sorti la semaine dernière.

Les résultats ont valu un coup de chapeau à l'École d'administration des affaires Schulich, de l'Université York, qui, pour la première fois, s'est classée dans les 10 premières écoles au monde. Elle est arrivée deux ou trois places derrière Columbia et loin devant Wharton de l'Université de Pennsylvanie. Il n'y a pas à dire, Schulich a très bien fait. Elle s'est classée dans les 10 premières écoles au monde. Cela étant, est-ce que les Brésiliens la perçoivent comme une destination de choix?

M. Davidson : Je vais vous parler de la marque Canada. Le reste du monde envie beaucoup la position du Canada, sa situation économique, sa situation financière et sa capacité à réaliser des investissements stratégiques. Il existe, pour le Canada, d'excellentes opportunités, surtout pour nos universités. Les Brésiliens se rendent compte que nos gouvernements successifs ont investi dans nos infrastructures de recherche pour créer des institutions de qualité internationale, présentes à l'échelle de la planète. Il s'agit d'une plateforme nationale favorable à une collaboration de premier rang en matière de recherche.

On note un véritable intérêt à cet égard. J'ajouterai que la position du Canada sur la question de la mobilité des étudiants est très enviable. Nous sommes réputés pour la très grande qualité de notre enseignement aux trois cycles. Vous avez parlé de classement tout à l'heure et nous nous enorgueillissons de la réussite de toutes les universités au pays.

On nous connaît pour l'excellence et l'abordabilité de notre enseignement. Même si les étudiants canadiens nous contestent parfois, il se trouve que nous avons un système d'enseignement qui est l'un des plus abordables et les plus accessibles au monde. Enfin, nous sommes réputés pour le milieu sûr et accueillant que nous offrons aux étudiants. Quand nous allons à l'étranger, nous disons souvent à nos futurs étudiants qu'ils ne sauront pas faire la différence entre les étudiants étrangers et les étudiants canadiens une fois au Canada. Cette situation favorise un climat d'apprentissage qui n'a pas d'équivalent dans le monde.

[Français]

Mme Fortin : J'aimerais ajouter un point. Quand la présidente a fait l'annonce pour les 75 000 bourses, le ministère de l'Éducation du Brésil a immédiatement téléphoné à nos bureaux et ils m'ont demandé de me présenter au Brésil pour les appuyer à rédiger l'appel pour la section professionnelle et technique, parce que leur premier choix, je l'ai mentionné, c'est le Canada. On a une relation de longue date avec eux, il y a un climat de confiance, on a beaucoup de points en commun aussi, à part la langue, entre le Brésil et le Canada, que ce soit au niveau social ou économique. Alors cela c'est important.

Pour eux, la première initiative qu'ils ont faite, c'est de demander de se présenter et de les appuyer et d'accueillir le maximum d'étudiants avec les limites que nous avons, bien entendu.

[Traduction]

Le sénateur D. Smith : Ma dernière question s'adresse à vous. Vous avez dit que le Canada est une bonne destination pour la collaboration en matière de recherche dans le cas du Brésil. Je veux voir pourquoi le Brésil serait un bon partenaire en recherche pour le Canada. Qu'avons-nous à gagner en retour?

M. Davidson : Je vous répondrai en partie en vous disant que, durant cette législature, le Brésil deviendra l'une des cinq grandes puissances mondiales. Nous ne devons pas perdre cela de vue. Nous avons noué des liens historiques avec l'Europe et des liens géographiques avec les États-Unis, mais nous devons maintenant nous tourner vers ces marchés nouveaux et émergents. Les universités représentent un actif sous utilisé à cet égard.

Nos économies sont très semblables et nos défis en matière de recherche le sont également, qu'il s'agisse d'énergie verte, de nanotechnologies ou autre. Pour ce qui est des atouts du Brésil, je répéterai que l'infrastructure de recherche de ce pays est tout aussi compétitive que celle du Canada dans certains secteurs et qu'il nous faut établir des liens avec elle et collaborer avec elle dès maintenant. Nous devons instaurer une collaboration durable en matière de recherche pour que le Canada et le Brésil y gagnent en prospérité.

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : Je voudrais vous demander si un de vous deux est capable de me répondre concernant les entreprises brésiliennes. Est-ce que les entreprises brésiliennes sont associées au monde de l'éducation? Et ma deuxième question : est-ce que les entreprises brésiliennes investissent dans les facultés?

Mme Fortin : La façon dont c'est réparti, les instituts fédéraux relèvent du gouvernement, alors il n'y a pas vraiment d'investissements dans les instituts de la part du secteur privé. Toutefois, ils travaillent avec le secteur privé. Mais il y a SENAC, qui sont d'autres établissements qui sont gérés par le secteur privé. Il y a une étroite collaboration, comme chez nous, entre le gouvernement, les instituts, le milieu de l'éducation et le secteur privé.

Et j'aimerais porter à votre attention qu'il y a beaucoup d'entreprises, surtout dans le secteur minier, qu'on prenne Rio Tinto, Alcan, Vale, qui travaillent dans les deux pays et avec qui on fait beaucoup de relations entre nos institutions au Canada, les institutions au Brésil et le secteur productif.

D'ailleurs, Rio Tinto a demandé de recevoir des étudiants brésiliens comme stagiaire dans le cadre de notre entente.

Le sénateur Fortin-Duplessis : J'imagine pour les former en génie.

M. Davidson : J'aimerais ajouter ceci. C'est la raison pour laquelle nous sommes heureux que Mme Jacynthe Côté, pdg de Rio Tinto Alcan était membre du panel expert que le gouvernement a mis sur pied concernant la stratégie internationale de l'éducation.

[Traduction]

M. Davidson : Nous en sommes très heureux. Pour revenir sur l'exemple de Rio Tinto, on pense souvent que la recherche ne se fait que dans quelques institutions. Pourtant, Rio Tinto Alcan est un partenaire établi de l'Université du Québec à Chicoutimi. Cet établissement, en liaison avec les installations du CNRC de Chicoutimi, est devenu un leader mondial. Les chercheurs brésiliens veulent venir à Chicoutimi pour y travailler et, d'un autre côté, les chercheurs de Chicoutimi veulent aller travailler au Brésil. Voilà le genre de collaboration en recherche que nous envisageons de façon stratégique dans le cas du Brésil.

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : Ma dernière question suit celle du sénateur Smith. Vous avez expliqué que le Canada semble être une excellente destination pour les étudiants brésiliens. Est-ce que vous êtes au courant du nombre d'étudiants brésiliens qui veulent s'en aller étudier dans d'autres pays? Avez-vous des chiffres là-dessus? Vous avez dit que le Canada est une destination privilégiée, mais on arrive à quel rang par rapport aux pays de l'OCDE, les États- Unis, l'Australie, on se situe à quel rang par rapport à cela? Avez-vous des pourcentages d'étudiants?

[Traduction]

M. Davidson : Je serais heureux de vous communiquer ces données par écrit. Je peux cependant vous dire que — dans l'exemple des Brésiliens qui étudient actuellement dans des universités canadiennes — nous comptons environ 100 000 étudiants étrangers dont 500 seulement du Brésil.

Il y a un autre morceau du casse-tête. Nous savons que 17 000 étudiants brésiliens viennent apprendre le français ou l'anglais au Canada dans des écoles de langues. Nous espérons que cette nouvelle stratégie d'éducation internationale consistera aussi à jeter des passerelles entre les premières expériences linguistiques et l'inscription dans un collège ou une université au Canada. Tout cela est question d'alignement, d'objectifs communs et de collaboration afin de promouvoir le Canada.

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : C'est certain que nous allons apprécier les statistiques, si vous nous les envoyez parce que ceci pourrait nous aider quand il sera temps de rédiger le rapport. Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

Le sénateur Finley : Merci pour vos exposés fascinants. J'ai deux questions à vous poser.

Vers la fin de son exposé, Mme Fortin a dit que si nous voulons attirer des étudiants brésiliens au Canada l'automne prochain et ainsi faire concurrence à d'autres pays, nous aurons besoin de l'appui financier du gouvernement fédéral.

J'ai par ailleurs retenu de l'exposé de M. Davidson que vous avez témoigné devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes. Je ne sais pas ce que vous avez demandé à ce moment-là et je me demande s'il y a un recoupement avec la notion de soutien financier évoquée par Mme Fortin. Ces chiffres sont-ils publics? Pourriez-vous nous donner une idée des montants en question et de qui serait destinataire de cette aide?

[Français]

Mme Fortin : Bien entendu, le ministère des Finances a annoncé 10 millions de dollars pour appuyer le recrutement des étudiants étrangers avec l'annonce d'un panel la semaine dernière. Mais si on regarde l'urgence par rapport au Brésil, déjà la France a signé un protocole d'entente offrant une gracieuseté de frais de scolarité. Le Portugal a aussi signé un protocole d'entente. Je parle au niveau collégial, je connais moins le milieu universitaire, mais j'ai validé vendredi dernier avec mes collègues du ministère et ces deux pays ont déjà signé.

Le sénateur De Bané : C'est gratuit.

Mme Fortin : C'est gratuit parce que les bourses que la présidente du Brésil va offrir couvrent le voyage, cela couvre tout à l'exception des frais de scolarité. Il faut s'entendre.

Nous, notre problème au Canada, c'est qu'on a nos frais de scolarité et on a les frais de scolarité canadiens, pour les étudiants canadiens, et ceux pour les étrangers. Alors nous quand on va demander 10 à 20 000 $ par année, comment pourrons-nous concurrencer avec la France qui offre gratuitement les frais de scolarité? Ils veulent aussi recevoir des étudiants, ils ne veulent pas que ce soit seulement à sens unique. Mais comment allons-nous envoyer autant d'étudiants canadiens et comment le faire? Nous n'avons aucun moyen ou très peu de moyens pour payer ce type de programme à nos étudiants canadiens.

On se retrouve un peu dans une situation urgente parce que les appels doivent commencer pour le secteur des collèges. Ils veulent faire le lancement du premier appel en décembre ou janvier. Donc qu'est-ce qu'on propose?

On a vécu la même situation avec le Chili il y a deux ans. On avait un protocole d'entente et on a perdu beaucoup après un an, non pas parce qu'ils ne voulaient pas les envoyer ici, mais c'est que l'Australie a offert des bourses gratuites. Le secteur privé a investi aussi. Alors, notre problème n'est pas qu'on n'est pas aimé, c'est qu'on ne peut pas offrir la même chose que les autres pays.

[Traduction]

M. Davidson : Pour répondre directement à votre question, sénateur, il se trouve que nous avons défendu cette position dans un mémoire soumis au Comité permanent des finances. Jusqu'ici, nous n'avons pas déposé de proposition chiffrée. Nous envisageons de le faire dans la troisième semaine de novembre. Compte tenu de la situation financière et du climat mondiaux changeants, nous voulons soumettre nos chiffres le plus près possible de l'annonce du budget, mais nous allons effectivement déposer une proposition détaillée.

Permettez-moi de revenir sur ce qu'a dit Mme Fortin quant à l'urgence d'agir, parce que d'autres pays sont en train de bouger à cet égard. Nous savons qu'au niveau universitaire, le Royaume-Uni s'est engagé à accueillir 10 000 étudiants, tout comme les États-Unis.

Permettez-moi de vous faire remarquer que nous avons raté de belles occasions dans le passé — comme avec le Chili et l'Inde, la semaine dernière — après avoir instauré de bonnes relations jusqu'à un certain point, après nous être dit que nous voulions travailler ensemble, quand est venu le moment de mettre l'argent sur la table, les Canadiens ont levé les yeux, baissé les yeux, puis ils sont remontés dans leur avion pour rentrer à la maison.

Il nous faut trouver une façon de saisir les occasions qui se présentent. J'estime qu'à la faveur de ce cycle budgétaire, le gouvernement fédéral pourra, s'il le veut, accélérer les choses.

Le sénateur Finley : Si je comprends bien ce que vous avez recommandé jusqu'ici, nous offririons les frais d'inscription à l'université aux étudiants brésiliens — et peut-être pas uniquement brésiliens d'ailleurs, parce qu'en d'autres occasions, nous pourrions nous intéresser à d'autres pays. Est-ce ce que vous recommandez? Disons que ça coûterait 20 000 $ par tête et que nous accueillions, comme l'Australie, 10 000 étudiants. Ça ferait beaucoup. Comme Henry Ford le disait, je pourrais vendre une voiture à chaque habitant de la planète à condition que je le fasse gratuitement.

M. Davidson : Il faut être prudent. Nous avons un produit de très grande qualité.

Le sénateur Finley : Il y a beaucoup d'enfants canadiens qui n'ont pas les moyens d'aller à l'université. Comment composer avec ce genre de situation? Allons-nous rendre l'enseignement universitaire gratuit? J'espère ne pas être trop agressif, parce que j'essaie simplement de comprendre.

[Français]

Mme Fortin : Non. On ne parle peut-être pas de tous les frais de scolarité gratuits. Ce qu'ils veulent c'est que le Canada puisse faire un effort de ne pas demander les frais de scolarité des étudiants étrangers. Si on peut avoir un protocole comme on a avec les pays francophones. Par exemple pour le Québec, les échanges avec la France, on paie les mêmes frais de scolarité qu'un étudiant canadien. Déjà il va y avoir une ouverture. On démontre qu'on ouvre les portes, qu'on veut vraiment accueillir le maximum d'étudiants. Quand on a rencontré l'agence CAPES qui gère les bourses, on nous a dit qu'il y avait une flexibilité à payer une partie des frais de scolarité. Déjà on a l'avantage que les frais de scolarité sont peut-être un peu moindre que dans certains pays pour les étudiants étrangers, mais si on peut avoir une entente entre nos deux pays pour au moins diminuer les frais de scolarité, ce serait déjà un grand pas.

[Traduction]

M. Davidson : Pour en revenir à cela, c'est une bonne question. Nous serions très préoccupés si, soudainement, nous assistions à une déferlante d'étudiants étrangers qui n'auraient pas à payer de frais d'inscription avec toutes les pressions que cela exercerait sur les gouvernements à cause des étudiants canadiens, mais je pense que nous pouvons tout de même offrir des incitatifs. Les bourses Vanier et Banting sont de bonnes choses, mais cela nous ramène à la double question de l'ampleur et de l'urgence.

Souvent, on nous pose une autre question, celle de savoir si les provinces ne pourraient pas intervenir elles-mêmes. Certes, elles pourraient le faire dans une certaine mesure, mais si nous attendons la signature d'une entente fédérale- provinciale à ce sujet, le créneau se sera refermé comme ça nous est déjà arrivé dans le passé.

Il est possible que le secteur privé ait aussi un rôle à jouer. Nous collaborons au Forum des PDG sur le Brésil et avec le conseil des dirigeants d'entreprises. Nous affirmons que ce dossier dépasse les frontières traditionnelles fédérales- provinciales en matière d'éducation. C'est un dossier d'intérêt national qui concerne la façon dont le Canada va se positionner au XXIe siècle et il est temps d'agir.

Le sénateur Finley : Je siège également au Comité sénatorial permanent des finances nationales et j'ai hâte de vous revoir sur ce dossier.

La présidente : Le sénateur Robichaud aimerait poser une question supplémentaire sur ce que vous venez de dire, ça va?

Le sénateur Finley : Bien sûr, allez-y.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Lorsque vous dites que les étudiants étrangers viendraient ici et on leur demanderait de payer les mêmes frais d'inscription que les étudiants canadiens, cela veut quand même dire qu'on devra compenser les universités et les collèges communautaires pour le manque à gagner, n'est-ce pas?

Mme Fortin : Effectivement, il faut trouver des solutions pour le manque à gagner, oui.

Le sénateur Robichaud : La présentation que vous avez faite et que vous ferez peut-être au Comité des finances du Sénat va dans cette direction, n'est-ce pas?

Mme Fortin : Tout à fait.

[Traduction]

M. Davidson : Permettez-moi d'ajouter une chose. Je vais revenir sur la façon dont nous percevons la valeur de ce secteur pour l'économie canadienne. D'après les plus récentes évaluations, ce secteur contribuait à hauteur de 6,5 milliards de dollars à l'économie canadienne — 300 000 impacts économiques de plus, répartis à l'échelle du pays. Par exemple, l'Université de Moncton accueille 1 200 étudiants étrangers. Beaucoup assument leurs frais de scolarité en totalité et beaucoup décident ensuite de rester au Nouveau-Brunswick pour s'y installer et y lancer une entreprise.

Je vais vous donner un autre exemple qui va toucher le sénateur Finley de plus près. L'Université Brock s'est associée avec la Chambre de commerce pour que, dans leur première année, les étudiants étrangers lancent une entreprise en collaboration avec des entrepreneurs locaux dans la région de Niagara. Ainsi, comme ces étudiants auront investi dans la région de Niagara pendant leurs études, ils chercheront ensuite à rester au Canada et à y créer des emplois et de la prospérité.

Certes, il y a un coût qui se rattache à cela, mais si la « contribution économique » est au moins de 6,5 milliards de dollars, cela représente beaucoup plus que l'exportation de bois d'ouvre. Si l'on accordait une fraction seulement du temps, de l'intérêt et de l'attention qu'on a consacré au règlement de ce problème afin d'essayer de chercher une solution aux enjeux de demain, comme la mobilité des étudiants étrangers, le Canada dépasserait le reste du monde.

Le sénateur Finley : Je ne suis pas en désaccord avec ce que vous dites et ma seconde question concerne d'ailleurs la qualité. Tout à l'heure, le sénateur Smith a dit que York s'était classée au sixième rang des écoles de commerce, ce qui rend Toronto complètement dingue. J'espère qu'il comprend également que, sur une liste récente des 200 meilleurs établissements d'enseignement supérieur dans le monde, l'Université de Toronto était la première au Canada et la dix- neuvième au classement général. Il est allègrement passé par-dessus ça.

Néanmoins, ce qui est intéressant, c'est que la seule université d'Amérique latine à faire partie des 200 premières universités au monde était l'Université de São Paulo. Ça, c'est pour l'ensemble de l'Amérique latine. De leur côté, les Australiens ont décroché sept places dans le top 200, comme la Chine, et il y en a eu quatre pour Hong Kong. Je suis heureux de dire que le Canada en a décroché neuf. Il est évident que la qualité de notre enseignement et la qualité de nos universités dépassent de loin tout ce qui peut être offert en Amérique latine et que nous sommes très certainement concurrentiels, pour dire le moins, par rapport à la Chine et à l'Australie et que nous avons peut-être même mieux à offrir à ces deux pays. N'est-ce donc pas la qualité que nous devrions proposer en premier, plutôt qu'une aide financière? Voilà pour la première partie de ma question.

Deuxièmement, si l'Université de São Paulo est la seule en Amérique latine à avoir fait le top 200, ne faudrait-il pas y voir des occasions d'affaires pour les industriels et les universitaires canadiens qui pourraient aller prêter main-forte au Brésil afin de l'aider à améliorer la qualité de l'enseignement universitaire?

M. Davidson : Ce genre de relations dans le domaine de l'enseignement, ce genre de recherches conjointes nous tirent vers le haut et nous amènent à améliorer la qualité. Vous avez tout à fait raison, car ce que nous vendons avant tout dans les autres pays, c'est l'excellence du système postsecondaire canadien. Je parle délibérément de « système postsecondaire ». Les collèges et les universités collaborent pour positionner le Canada en tant que destination de choix.

Comment la qualité est-elle améliorée? Par le regroupement de nos jeunes universitaires afin qu'ils résolvent les grands problèmes de l'heure. La qualité vient de la mobilisation des grandes entreprises du secteur privé, au Brésil comme au Canada, qui veulent investir dans certains domaines et nous faire avancer tous ensemble.

Il est toujours difficile avec 95 membres de donner un exemple et vous avez parlé de l'Université de Toronto. L'Université de Toronto et l'Université Western Ontario ont merveilleusement collaboré ensemble. Elles se sont associées avec l'organisme subventionnaire d'État pour travailler à São Paulo. Histoire d'illustrer l'ambition des Brésiliens, sachez que 1 p. 100 des recettes brutes de l'État de São Paulo est consacré à la recherche et à l'innovation. Ça, c'est au niveau de l'État et ça représente 500 millions de dollars américains par an. C'est le groupe avec qui nous sommes en train de négocier certains de ces accords. Les Brésiliens ont les ressources nécessaires pour dresser la table et ils sont prêts à le faire. Comme tous bons gens d'affaires, ils font le tour de la planète et demandent qu'on les comprenne un peu.

Le sénateur De Bané : Il me semble évident que ce secteur représente beaucoup d'avantages pour le Canada. Pouvez- vous m'expliquer pourquoi l'Australie est parvenue à attirer un tel pourcentage d'étudiants étrangers dans ses universités? Il y a quasiment trois fois plus d'étudiants étrangers là-bas que dans les universités canadiennes. Qu'offrent-ils à ces étudiants pour en accueillir un tel contingent? Que leur offrent-ils pour en attirer près de deux fois et presque trois fois plus que le Canada? Le savez-vous, monsieur Davidson?

M. Davidson : Je peux vous signaler certaines choses. Premièrement, ils ont été parmi les premiers à commercialiser l'éducation internationale. Je dirai que c'est précisément à l'époque où on a fait l'examen des programmes au Canada, dans le milieu des années 1990, qu'on a décidé de réduire les budgets de représentation au chapitre de l'enseignement. C'est là que l'Australie a commencé à creuser l'écart.

Deuxièmement, les Australiens ont ciblé certaines régions du globe. Ils se sont tournés délibérément vers une poignée de pays avec qui ils ont travaillé. En outre, les Australiens proposent tout un ensemble de mesures incitatives aux étudiants et aux autres gouvernements pour les amener à comprendre que l'expérience va au-delà de l'enseignement ou de la recherche pour porter sur des intérêts stratégiques et c'est pour cela que le gouvernement de l'Australie appuie ces efforts.

Le sénateur De Bané : Vous nous avez indiqué combien nous accueillons d'étudiants brésiliens sur les 100 000 qui sortent du pays, et c'est très peu. Cela me porte à dire que le Canada, qui est deux fois plus peuplé que l'Australie et qui a des universités de première classe, n'a pas été aussi attractif. Pourrez-vous nous remettre un document de réflexion montrant ce qu'ils ont fait et ce que nous devrions faire?

M. Davidson : Très certainement.

Le sénateur De Bané : Merci.

[Français]

Vous nous avez dit que la présidente du Brésil voudrait donner 70 000 bourses à des étudiants de niveau universitaire ou collégial pour travailler dans le monde. Et manifestement, ce pays, dont l'économie avance à un rythme très impressionnant, réalise qu'il a un déficit d'ingénieurs, de spécialistes et de techniciens compétents pour travailler dans leurs industries.

Si vous pouviez envoyer à Mme la présidente des recommandations précises à savoir ce qu'on pourrait faire pour être concurrentiel par rapport aux autres pays, ce serait très intéressant pour notre comité.

Mme Fortin : Nous allons vous faire parvenir des données et de l'information sans problème.

[Traduction]

Le sénateur De Bané : Monsieur Davidson, j'aimerais entendre votre point de vue parce que vous avez beaucoup étudié cette question.

M. Davidson : Je serais heureux de vous le fournir.

Le sénateur De Bané : C'est cela que nous devrions faire pour être vraiment concurrentiels.

M. Davidson : Nous allons également participer au groupe d'experts mis sur pied par le gouvernement.

La présidente : Ces deux sources nous ont déjà transmis des informations et je suis sûre qu'elles seraient heureuses d'entendre vos suggestions. Vous allez en recevoir davantage. J'en reçois régulièrement et j'apprécie ces informations. Je suis sûre qu'on va désormais les faire circuler auprès de tous les membres. Il y a un intérêt.

[Français]

Le sénateur Nolin : Madame Fortin, je suis très impressionné par votre belle histoire de partenariat. J'aimerais vous entendre un peu plus. Mes collègues ont beaucoup parlé de l'importation d'étudiants, mais dans ce projet, ce sont vos services là-bas qui sont utilisés. Je voudrais vous entendre un peu plus sur cela. Comment cela a commencé? Est-ce que c'est l'ACDI qui vous a alertés? Est-ce que c'est un de vos contacts personnels? J'aimerais vous entendre sur la genèse de cette relation.

Mme Fortin : Je vous dirais d'emblée que ce soit au Chili ou au Brésil, la relation pour recevoir des étudiants étrangers, cela fait toujours partie de projets de coopération faits dans le passé. On travaillait toujours au Brésil depuis quelques années quand on nous approchés. Les Brésiliens sont venus visiter nos collèges.

Le sénateur Nolin : Vous utilisez le mot « collège » dans votre texte. Ce sont des collèges canadiens?

Mme Fortin : Oui, ils sont venus voir ce qu'on faisait ici et ils ont beaucoup apprécié le côté social, le côté accès et reconnaissance des acquis, comment on intégrait les gens qui ne possédaient pas nécessairement les études mais qui voulaient faire un retour à l'école, comment on les intégrait dans nos institutions.

C'était en même temps que le président Lula annonçait son nouveau programme. On a fait un projet pilote. Vous avez d'ailleurs dans votre pochette le CD-ROM. Ce sont des femmes qui font le témoignage. C'est magnifique.

Le sénateur Nolin : Je vais en apprendre beaucoup d'ailleurs; c'est avec sous-titres?

Mme Fortin : Oui, parce que c'est en portugais. On a aussi un livre qui raconte l'histoire de ces femmes. Les instituts fédéraux au Brésil, la population étant tellement grande, étaient très élitistes; si on avait de l'argent ou était bien placé ou avait fait des études, ça allait. Mais le commun des mortels ne pouvait pas accéder à ces institutions.

Le sénateur Nolin : Le nombre de campus a plus que doublé en moins de 10 ans.

Mme Fortin : Exactement et cela continue. Tout cela est interrelié avec le programme de Lula qui se poursuit présentement avec le programme de la présidente Dilma. C'est la marque canadienne car c'est notre savoir-faire qui a été transféré au Brésil et qui a donné pour résultat ce Projet Mille femmes. C'est maintenant un programme national à l'échelle du pays. D'ici 2014, 100 000 femmes auront accès à ce programme. C'est une fierté canadienne et cela a été réalisé avec un investissement d'environ 2,5 millions de dollars du gouvernement canadien. C'est quand même une belle retombée qui nous a permis de bâtir quelque chose.

C'est à cause de cette relation et de ce projet qu'ils nous ont demandé de poursuivre, parce qu'il n'y a plus de financement de l'ACDI au Brésil. C'est terminé.

Ils nous ont donc demandé de poursuivre avec eux, de les accompagner, de faire des échanges d'égal à égal et d'accueillir des étudiants étrangers.

Le sénateur Nolin : Je vais vous demander de revenir un peu sur ce que vous venez de dire. Vous avez parlé d'échange d'égal à égal et je veux comprendre un peu plus.

Pour votre part du partenariat, des institutions canadiennes se sont déplacées au Brésil dans cette région nord-est du Brésil, se sont installées et ont favorisé l'intégration de ces femmes brésiliennes.

Mme Fortin : Nos collèges ont accompagné les institutions brésiliennes. C'était pour de courtes périodes. Les Brésiliens venaient aussi dans nos institutions. On ne s'est pas installés là-bas.

Le sénateur Nolin : Mais vous avez fourni des services là-bas. Combien de collèges canadiens se sont impliqués dans le projet?

Mme Fortin : Il y en avait neuf d'un peu partout au Canada. Et ce sont les Brésiliens qui sont venus choisir leurs partenaires canadiens.

Le sénateur Nolin : Et pour cette explosion du même programme à travers le pays, vous présagez que cela correspondra à quel type d'implication pour les collèges canadiens?

Mme Fortin : C'est sûr qu'ils veulent poursuivre la relation. Ils ont un centre de recherches maintenant à Brasilia pour le programme Mulheres Mil, c'est-à-dire le projet Mille Femmes. Ils veulent poursuivre avec l'appui des collèges canadiens.

Présentement, nos collèges étant très dédiés, ils le font un peu bénévolement. Quand ils sont au Brésil, ils participent et font beaucoup d'échanges. Aussi, les 46 protocoles d'entente qui ont été signés servent à poursuivre ces relations. Eux viennent chez nous et nous y allons; mais c'est avec nos propres fonds des collèges canadiens.

Le sénateur Nolin : Et vous avez parlé d'égal à égal; cela veut dire qu'il faudrait que le Canada offre la réciproque aux étudiants brésiliens, si je comprends bien?

Mme Fortin : Au niveau de l'accueil des étudiants brésiliens, oui. Déjà, ils investissent pour envoyer les étudiants. Ils couvrent tout, à l'exception des frais de scolarité; mais avec un bémol quand même, parce qu'il y a une flexibilité à en payer un peu. Ils veulent que ce ne soit pas des relations à sens unique. Ils veulent que des jeunes Canadiens viennent aussi dans leurs institutions. Comme on a discuté lors de ma rencontre en août, c'est sûr qu'on ne peut pas dire qu'on va recevoir 200 étudiants pour 200 étudiants en retour. Nos étudiants ont besoin de s'ouvrir à cela aussi, d'aller étudier à l'étranger, autre part qu'en Europe.

[Traduction]

M. Davidson : Je reconnais que les universités canadiennes sont présentes au Brésil depuis plusieurs années, surtout dans le cadre de programmes comme le Programme universitaire de coopération et de développement sous l'égide de l'ACDI. Des étudiants d'université ont également eu l'occasion de vivre l'expérience brésilienne grâce au programme Étudiants pour le développement. Je tiens à attirer votre attention sur un nouveau programme proposé par l'Université de Guelph qui consiste à donner aux étudiants du premier cycle l'occasion de travailler à des projets de restauration du milieu naturel et à des activités de responsabilité sociale d'entreprise financées par une multinationale canadienne présente au Brésil. Ces modèles-là existent déjà. J'y suis revenu pour deux raisons. Je vous ai parlé de l'importance de la recherche et de l'innovation ainsi que de la mobilisation du corps professoral, mais il faut aussi que les jeunes Canadiens puissent vivre ce genre d'expériences. Nous devons pouvoir compter sur une génération de jeunes Canadiens tournés vers l'extérieur, qui sautent sur toutes les occasions d'entreprendre ailleurs dans le monde.

Pour conclure, madame la présidente, et vous m'avez déjà entendu vous le dire, j'ajouterai qu'en 2011, 3 p. 100 seulement de nos étudiants universitaires canadiens vont étudier à l'étranger, bon an mal an. C'est la moitié du taux enregistré en Allemagne. C'est beaucoup moins que le taux aux États-Unis. Si vous me permettez d'aller encore plus loin, je dirai que moins d'un étudiant canadien sur 10 va étudier en dehors de sa province.

Nous serons bientôt en 2017 et quand on songe aux expériences transformatrices que nous pouvons offrir, nous nous disons qu'elles constituent autant d'occasions rêvées de voir le monde, de voir le pays et de rapporter à la maison tout ce que l'on a appris ailleurs pour contribuer à bâtir notre prospérité.

[Français]

Le sénateur Nolin : J'espère que vous serez invités à participer aux travaux de ce comité pour conseiller le gouvernement canadien. De toute évidence, vous avez la fougue, le dynamisme et le savoir pour faire progresser ce dossier.

En passant, comme je suis Montréalais, j'aurais pu vous parler de l'Université McGill qui coiffe au fil d'arrivée tous les autres collèges qui ont été mentionnés, mais je me suis retenu de le faire.

[Traduction]

La présidente : Attention, nous n'avons pas parlé de l'Ouest où se trouvent les vraies bonnes universités.

Le sénateur Mahovlich : Je suis du centre. Toronto est réputée pour ses universités. Nous accueillons un grand nombre d'étudiants chinois. Le jour de la remise des diplômes à l'Université de Toronto, les premiers de classe sont tous des Chinois et ils se situent dans la fourchette des 90 p. 100. On dirait qu'il y a beaucoup de Chinois. Combien d'étudiants chinois accueille-t-on au Canada par année?

M. Davidson : Pour le Brésil, c'est 500. Nous pensons accueillir, dans l'ensemble de notre le système universitaire, 18 000 étudiants chinois. La Chine est la première source d'étudiants étrangers. Ils s'en sortent très bien au Canada. Certains restent chez nous et d'autres retournent en Chine, tout cela nous aidant à instaurer des liens.

Le sénateur Mahovlich : Vous avez dit que 75 000 bourses seront accordées aux Brésiliens. Quel pourcentage de boursiers revient au Canada? Qu'est-ce qui pourrait les attirer ici?

M. Davidson : C'est une grande question que je renvoie aux sénateurs.

Le sénateur Mahovlich : Serions-nous en mesure de les accueillir?

M. Davidson : Oui, parce que les universités et les collèges canadiens ont cette capacité d'accueil.

Le sénateur Mahovlich : Vous avez besoin de l'aide du gouvernement.

M. Davidson : Nous avons besoin d'aide.

Le sénateur Mahovlich : Je le comprends.

M. Davidson : Je le répète, il y a les arguments financiers, mais il y a aussi le fait de pouvoir vivre, d'étudier et d'apprendre aux côtés d'étudiants étrangers. Je ne pense pas que nous parvenions jamais à pouvoir envoyer tous les étudiants canadiens à l'étranger, mais nous pouvons veiller à ce qu'il y ait des étudiants étrangers dans chaque salle de classe pour que nos étudiants canadiens puissent vivre, apprendre et travailler aux côtés de camarades venant d'un peu partout dans le monde.

Le sénateur Mahovlich : J'étais en Inde où l'on m'a dit que 80 000 Indiens étudient aux États-Unis. Ce pays offre-t-il des encouragements à ces étudiants pour les attirer?

M. Davidson : Il y a des mesures d'encouragement. Les Américains sont une destination internationale depuis plus de 50 ans en raison de leur position dans le monde. Nous avons désormais un avantage concurrentiel parce que nous sommes un pays sûr, accueillant, abordable qui offre une expérience de très grande qualité aux étudiants.

Le sénateur Mahovlich : Les États-Unis ont des universités de qualité à Harvard, à Yale et ailleurs.

Le sénateur Nolin : Mais à quel prix?

Le sénateur Mahovlich : C'est coûteux.

M. Davidson : Je sais que vous voulez conclure, mais j'aimerais vous donner un autre exemple de la façon dont ce genre d'interactions contribuent à positionner le Canada à l'échelle internationale.

Si vous alliez au Brésil, vous entendriez parler du code Ryerson. Qu'est-ce que le code Ryerson? C'est une norme de santé et de sécurité élaborée par l'Université Ryerson en partenariat avec des Brésiliens, si bien que les Brésiliens connaissent Ryerson. Voilà un autre exemple concernant Toronto, à l'intention du sénateur Mahovlich.

Le sénateur Mahovlich : Tout à fait; Ryerson est une grande université.

La présidente : Nous avons dépassé le temps qui nous était alloué et un autre comité va siéger ici. Vous nous avez présenté un point de vue imparable qui nous invite à prendre l'éducation en compte et nous empêche de faire fi de ce que vous nous avez dit. J'espère qu'une partie de ce que vous nous avez déclaré se retrouvera dans notre rapport qui sera non seulement adressé à notre gouvernement, mais aussi, nous l'espérons, au Brésil.

Ce n'est pas la qualité qui pose problème. Nous sommes, je crois, conscients d'avoir ici des établissements de qualité, qui sont réputés, mais la question est de savoir comment nous les administrons et les positionnons.

J'ajouterai deux choses à ce que vous avez déclaré. D'abord, l'éducation internationale ne correspond plus à un sous-ensemble de cours. Tout ce que nous faisons a une dimension internationale. Que ce soit en droit, en génie ou que sais-je encore, on voit bien que toutes nos lois dépendent de traités internationaux ou qu'elles sont touchées par ces traités. Ce n'est plus comme il y a 50 ans ou 25 ans. Nous sommes bel et bien ancrés dans une réalité mondiale.

En outre, je voudrais citer Lloyd Barber, de l'Université de Regina, qui est récemment décédé. Il disait que si l'on pense que l'enseignement est coûteux, il fallait essayer l'ignorance.

C'est là, je crois, une chose qu'a comprise la présidente Rousseff qui offre 100 000 bourses pour aller étudier à l'étranger. On ne peut pas se permettre de ne pas éduquer les jeunes si l'on espère faire partie du système mondial. C'est le message que le Canada peut retirer de vos réflexions — sur la façon de passer aux réalisations et de rendre la chose acceptable — de même que de ce que vous avez ajouté.

Il y a beaucoup trop d'intérêts concurrents. Nous devons rédiger un rapport qui aura un certain retentissement et dont les recommandations seront réalisables de sorte qu'on ne se retrouve pas avec des protocoles d'entente qui finiront par ramasser la poussière, mais bien avec des mesures concrètes.

Merci beaucoup de nous avoir interpellés, de nous avoir communiqué tous ces renseignements et de faire tout ce que vous pouvez faire par ailleurs.

(La séance est levée.)

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