Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international
OTTAWA, le jeudi 20 octobre 2011
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd'hui à 10 h 40 afin d'examiner, pour en faire rapport, les faits nouveaux en matière de politique et d'économie au Brésil et les répercussions sur les politiques et intérêts du Canada dans la région, et d'autres sujets connexes.
Le sénateur Percy E. Downe (vice-président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le vice-président : Honorables sénateurs, nous allons poursuivre notre étude sur l'essor du Brésil. La présidente doit arriver sous peu. Elle occupera alors le fauteuil, et je reprendrai ma place à la table.
Je vais demander à nos témoins de se présenter. Je suppose qu'ils présenteront un ou plusieurs exposés préliminaires.
Joanne Lostracco, gestionnaire, Politiques stratégiques et relations gouvernementales, Corporation commerciale canadienne : Je vais céder la parole à mon collègue Martin Zablocki.
Le vice-président : Je vous remercie.
[Français]
Martin Zablocki, vice-président exécutif, chef de l'exploitation, chef de la direction financière, Corporation commerciale canadienne : C'est un plaisir pour nous de comparaître devant votre comité pour parler de la Corporation commerciale canadienne. Je parlerai aussi, plus spécifiquement, de notre expérience avec le Brésil.
[Traduction]
Comme votre comité étudie essentiellement les questions liées aux affaires étrangères et au commerce international, nous avons pensé qu'il serait utile de vous parler un peu aujourd'hui de la Corporation commerciale canadienne, qui constitue l'un des piliers du portefeuille du commerce international du gouvernement.
Je suis accompagné aujourd'hui de Joanne Lostracco, notre gestionnaire des Politiques stratégiques et des relations gouvernementales, et de l'un de nos conseillers juridiques, Alex Jeglic, qui a de vastes connaissances et qui a déjà été au Brésil.
Je suis vice-président exécutif et chef de l'exploitation à la Corporation commerciale canadienne.
Je voudrais commencer par présenter au comité un bref aperçu de la CCC, de ce que nous faisons et de la façon dont nos activités s'inscrivent dans les plans du gouvernement. À la fin, je parlerai plus particulièrement du Brésil.
Je voudrais, d'entrée de jeu, modérer les attentes en disant au comité que nous n'avons pas eu beaucoup de contrats réussis au Brésil. C'est un marché qui s'est révélé plein de défis pour nous dans le passé, mais nous y voyons d'innombrables occasions. Nous suivons actuellement de plus près la situation pour déterminer ce que ces occasions pourraient nous rapporter à l'avenir.
Permettez-moi tout d'abord de vous parler de la CCC. La corporation a été créée en 1946, surtout pour appuyer les efforts de reconstruction d'après-guerre en Europe. Nous sommes régis par la Loi sur la Corporation commerciale canadienne. Je vais vous lire notre mandat, pour vous donner une idée de l'étendue de nos responsabilités.
Notre mandat, tel qu'il figure dans la loi, est d'aider à l'expansion du commerce entre le Canada et d'autres pays et de fournir une assistance aux personnes intéressées, au Canada, à obtenir des marchandises et denrées de pays étrangers et à trouver des débouchés pour les marchandises et denrées qui peuvent être exportées du Canada.
Vous pouvez voir que le mandat est assez étendu. Avec le temps, nos activités ont évolué. En 1956 — ce fut une importante période pour nous —, nous avons été chargés de la responsabilité, pour le Canada, de l'Accord sur le partage de la production de défense avec les États-Unis, afin de réagir et de faciliter l'exportation de produits et de services militaires au département américain de la Défense. Cela représente une importante partie de notre histoire.
La CCC a deux sources de financement. Nous recevons du gouvernement un petit crédit d'environ 15,5 millions de dollars par an dont l'objet exclusif est de nous permettre de nous acquitter de ce que nous avons à faire auprès du département américain de la Défense. Pour toutes nos autres activités, nous facturons des frais de service qui nous permettent d'être autonomes.
Le personnel de notre organisme est relativement petit. Je vous parlerai dans quelques instants des résultats, qui vous permettront de constater que nous brassons d'assez grands volumes d'affaires. Notre effectif est d'environ 140 employés. Même si ce nombre n'est pas très élevé, nous sommes en mesure, grâce à nos activités, d'engendrer des volumes considérables d'exportations pour le Canada. Nous savons évidemment que ces exportations créent des emplois et renforcent l'économie.
Nous faisons partie du portefeuille du Commerce international, qui compte trois groupes distincts. Le premier est le Service des délégués commerciaux du Canada, qui se trouve au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Les membres du service travaillent dans quelque 150 villes du monde à la promotion des entreprises canadiennes, à la recherche d'occasions et à la collecte de renseignements à l'intention de diverses parties pouvant aider les entreprises à s'établir sur les marchés d'exportation.
Le deuxième groupe, c'est Exportation et Développement Canada, organisme essentiellement chargé d'offrir du financement et de l'assurance pour aider les entreprises canadiennes à exporter leurs produits.
La Corporation commerciale canadienne constitue le troisième groupe. Nous nous occupons de marchés entre gouvernements et d'achats pour le compte de gouvernements étrangers.
La CCC offre deux grands services. Le premier est celui de maître d'œuvre : nous nous mettons en rapport avec un gouvernement étranger et signons avec lui un contrat prévoyant de lui fournir les biens ou les services qu'il souhaite se procurer. Nous signons à notre tour un contrat distinct avec un exportateur canadien pour nous acquitter des obligations du premier contrat. Nous jouons plus ou moins un rôle d'intermédiaire pour aider des gouvernements étrangers à trouver des capacités, des compétences ou des technologies canadiennes pouvant les aider à répondre à leurs besoins d'approvisionnement.
Nous offrons en second lieu un service d'approvisionnement dans les cas où les gouvernements étrangers n'ont pas eux-mêmes les capacités ou la main-d'œuvre nécessaires pour obtenir des services d'approvisionnement. Nous faisons le travail pour eux en qualité d'agents.
Comme vous pouvez le constater, notre rôle est unique en son genre. On peut se demander pourquoi un gouvernement étranger voudrait passer un marché par l'entremise de la CCC ou pourquoi un exportateur canadien voudrait de nous comme intermédiaires dans une opération. À la base de tout cela, il y a la notion de risque et de gestion du risque. D'une façon générale, les gouvernements étrangers ne connaissent pas toujours la situation et le calibre des entreprises canadiennes. S'ils savent qu'une partie gouvernementale canadienne soutient l'exportateur et garantit que le travail sera fait conformément aux conditions du contrat, les gouvernements étrangers sont plus tentés d'acheter à une entreprise canadienne. En même temps, certains des pays avec lesquels nous signons des contrats peuvent avoir un régime juridique qui manque de stabilité ou connaître des changements politiques pouvant occasionner des obstacles à l'exécution d'un contrat. Par conséquent, l'exportateur canadien aime bien qu'un organisme gouvernemental canadien participe au contrat parce que nous pouvons intervenir et aider à régler des différends sans qu'il soit nécessaire de s'adresser à un tribunal international. Dans une perspective de risque, c'est une situation gagnante aussi bien pour le gouvernement étranger acheteur que pour l'exportateur canadien. C'est notre principale proposition de valeur.
Je vous en dirai un peu plus à ce sujet quand je vous parlerai de certains de nos secteurs d'activité.
Pour être en mesure de faire notre travail et de donner l'assurance que les fournisseurs canadiens que nous appuyons fourniront les biens et les services qu'ils se sont engagés à procurer en vertu des contrats, la CCC a établi un régime solide de gestion du risque. Nous procédons à une évaluation approfondie des risques financiers, techniques et de gestion liés aux fournisseurs canadiens pour nous assurer que les engagements que nous prenons, à titre d'organisme gouvernemental, seront honorés par l'exportateur avec qui nous avons signé un contrat.
J'ai également mentionné que nous pouvons intervenir pour faciliter le règlement des différends qui peuvent survenir au sujet des conditions du contrat.
La CCC a cinq secteurs d'activité. Le premier, qui est le plus important et que j'ai mentionné plus tôt, concerne les ventes de produits et de services au département de la Défense du gouvernement des États-Unis, dans le cadre de l'Accord sur le partage de la production de défense. Ce secteur existe depuis des années. En gros, tout contrat d'une valeur supérieure à 150 000 $US signé avec le département américain de la Défense doit, en vertu de l'accord, passer par la CCC.
Je répète encore que c'est notre seul secteur d'activité qui fasse l'objet d'un crédit du Parlement. Pour tous nos autres secteurs, nous sommes autonomes.
Notre deuxième secteur d'activité porte sur les ventes mondiales de matériel de défense et de sécurité aux pays alliés et d'optique commune. Ainsi, nous nous sommes occupés de l'installation d'ailes sur des avions P3 pour le compte de la Norvège et, par l'intermédiaire de Bombardier, de la formation de pilotes pour les forces aériennes de l'Arabie Saoudite.
Notre troisième secteur d'activité concerne les ventes commerciales internationales, surtout dans le secteur de l'infrastructure, dans les marchés émergents et le monde en développement. À part l'infrastructure, il y a d'autres types de contrats qui s'inscrivent dans ce secteur d'activité, qui sert un peu de fourre-tout. Je peux citer comme exemple le projet de l'aéroport international de Quito, en Équateur, où nous collaborons avec la société Aecon Construction pour bâtir l'aéroport le plus moderne de toute l'Amérique latine. Nous avons également travaillé avec Orenda, filiale de Magellan, sur un projet de production d'électricité au Ghana.
Notre quatrième secteur d'activité comprend les services d'approvisionnement donnés aux ministères fédéraux, le plus souvent pour les aider à envoyer des fournitures d'urgence à l'étranger en cas de catastrophe. Nous nous sommes occupés d'un certain nombre de ponts lors des inondations du Pakistan ainsi que de masques pour le Japon. Nous faisons également un certain nombre d'autres choses dans le cadre de ce secteur.
Notre dernier secteur d'activité porte sur le financement d'opérations commerciales avec des acheteurs du gouvernement cubain, dans les domaines du tourisme et de l'agriculture, afin d'appuyer les exportateurs canadiens qui ont des activités à Cuba.
Le travail que fait la CCC présente des avantages dans trois domaines. Comme je l'ai expliqué plus tôt, la participation d'un organisme gouvernemental donne à nos exportateurs canadiens un avantage concurrentiel marqué. Elle permet aux gouvernements étrangers d'avoir l'assurance que les conditions du contrat seront respectées.
Notre intervention permet en outre aux gouvernements de la plupart des pays étrangers de signer directement des contrats sans avoir à lancer un appel d'offres international, qui peut coûter cher en temps et en argent, surtout s'il est urgent de se procurer certains biens ou si les marchandises et les services qu'un fournisseur canadien peut offrir n'existent pas ailleurs.
Le troisième avantage, c'est de mieux faire connaître les capacités du Canada dans le secteur de la haute technologie et dans beaucoup d'autres domaines. Nos capacités en matière de construction sont extraordinaires et l'approche canadienne des affaires est très appréciée à l'étranger. Et plus nous réalisons de projets, plus cette perception se confirme.
Pour ce qui est de nos résultats, j'ai distribué à tous les membres du comité notre rapport annuel le plus récent. Au cours du dernier exercice, nous avons signé des contrats d'une valeur de 1,6 milliard de dollars. Pour nous, c'est un énorme volume d'affaires : 7 p. 100 de plus que notre moyenne des cinq dernières années et 14 p. 100 de plus que la moyenne des dix dernières années.
La raison pour laquelle nous avons tendance à faire des comparaisons par rapport à des périodes de 5 ou de 10 ans, c'est que certains de nos contrats sont extrêmement importants. De ce fait, nos revenus suivent une courbe en dents de scie, avec beaucoup de crêtes et de vallées. En considérant les chiffres par blocs de cinq ans, on a une meilleure idée du volume d'affaires que brasse la CCC.
Nous recevons des crédits du Parlement, mais nous facturons aussi des frais de service. L'année dernière, ceux-ci se sont élevés à 12,9 millions de dollars, ce qui représente 55 p. 100 de plus que la moyenne des cinq dernières années et 79 p. 100 de plus que la moyenne des 10 dernières années. L'importance de cette augmentation s'explique par le fait que ce n'est qu'en 2002 que nous avons été autorisés à facturer des frais de service, grâce à une modification de notre mandat.
Quant à nos recettes, elles sont presque égales à la valeur des contrats signés : environ 1,7 milliard de dollars. Nos activités ont entraîné la création ou le maintien de 18 300 emplois au Canada.
Dans nos activités à l'étranger, nous attachons une grande importance à la responsabilité sociale des entreprises. Nous avons notre propre cadre de responsabilité sociale ainsi que des politiques à cet égard. Nous avons aussi un code de conduite et un code de déontologie des affaires que tous les employés doivent signer une fois par an pour mémoire. Nous nous conformons aux lois fédérales sur la responsabilité sociale des entreprises, y compris la Loi sur la corruption d'agents publics étrangers, le Code régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat s'appliquant à la fonction publique, la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles et la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
À titre de société d'État, la CCC est dirigée par un conseil d'administration. Nous rendons compte de nos activités au Parlement par l'entremise du ministre du Commerce international et collaborons étroitement avec nos collègues du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.
Notre conseil d'administration se compose de 11 membres et a créé cinq comités chargés de la gouvernance, des opérations, de la vérification, des ressources humaines ainsi que de la politique et des priorités. Ces comités se réunissent tous les trimestres et formulent des avis destinés à guider le conseil d'administration et la CCC. De plus, le président du conseil d'administration a des contacts réguliers avec le ministre pour s'assurer que nos activités correspondent aux priorités et à l'orientation du gouvernement.
Je n'ai pas à vous convaincre de l'importance des exportations pour le Canada. Je sais que le comité connaît bien le sujet. Pour avoir des entreprises compétitives dans le pays, avec une population de 35 millions d'habitants, nous avons besoin d'exporter pour renforcer nos entreprises et leur donner un avantage concurrentiel par rapport à des pays ayant une population plus nombreuse et une plus grande économie.
Nous connaissons tous sans doute les dispositions du budget 2011 et du plan d'action économique destinées à aider les entreprises canadiennes à cet égard. Je n'en parlerai donc pas.
Le sénateur A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.
La présidente : Nous aimerions laisser un peu de temps aux questions. Je m'excuse d'être arrivée en retard. J'ai eu des difficultés logistiques. Je ne voudrais pas en arriver au point où il ne nous reste plus assez de temps pour poser des questions.
Vous nous avez distribué de la documentation. Nous l'avons tous. Avez-vous des choses particulières à nous dire au sujet du Brésil? Nous pourrons ensuite ouvrir la discussion parce que j'ai une longue liste de sénateurs qui souhaitent vous poser des questions.
M. Zablocki : Je vais y passer tout de suite. Sur le marché brésilien, la CCC a travaillé avec un certain nombre d'entreprises qui essayaient de décrocher des contrats. Nous avons trouvé ce marché difficile pour différentes raisons.
Je vous ai déjà expliqué que notre modèle de fonctionnement se base sur les contrats entre gouvernements. Or, les lois brésiliennes sur les marchés publics se prêtent mal à ce modèle. Les Brésiliens préfèrent les appels d'offres concurrentiels parce que leurs lois l'exigent. C'est seulement dans des circonstances exceptionnelles qu'ils recourent à des contrats entre gouvernements. Nous avons des sociétés canadiennes qui ont des activités au Brésil, mais elles doivent le plus souvent passer par le système d'appel d'offres, dans lequel les fournisseurs canadiens peuvent décrocher des contrats aux conditions prescrites.
Le deuxième élément concernant le Brésil, c'est que pour la plupart des contrats d'approvisionnement, les sociétés canadiennes doivent être liées à une entreprise brésilienne dans le cadre d'une cœntreprise pour être en mesure de présenter des offres. Par conséquent, il est assez compliqué pour ces sociétés de présenter des soumissions. De plus, le rôle de la Corporation commerciale canadienne dans un tel environnement n'est pas évident.
Cela étant dit, si on considère le rythme de croissance du marché brésilien et le nombre d'occasions qui s'offrent là, il est nécessaire de suivre de près ce qui se passe. Comme le comité le sait sans doute, le Brésil accueillera les championnats de la Coupe mondiale de soccer de la FIFA en 2014. Le budget et les besoins d'infrastructure correspondants sont de l'ordre de 11 milliards de dollars. Et cette grande manifestation sera suivie, deux ans plus tard, par les Jeux olympiques, dont le budget atteindra environ 14 milliards de dollars, surtout pour des infrastructures.
Nous avons été au Brésil. Nous avons accompagné le ministre Fast lors de sa visite en juin en mission commerciale. Nous en apprenons constamment davantage sur les perspectives de ce marché et sur les moyens que les sociétés canadiennes peuvent mettre en œuvre pour s'y établir.
Jusqu'ici, le Brésil a annoncé qu'il maintiendrait la réglementation actuelle relativement à ses besoins en infrastructure et aux investissements considérables qui sont attendus. Par conséquent, nous ne sommes au courant d'aucune règle d'urgence ou d'exception qu'il nous serait possible d'exploiter. N'empêche, nous continuons à suivre la situation de près.
Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
[Français]
Le sénateur Fortin-Duplessis : En tout premier lieu, je veux vous dire que j'apprécie énormément votre témoignage ce matin qui nous permet de grands espoirs. Je voudrais aussi saluer la venue de Mme Lostracco et de M. Jeglic. Soyez les bienvenus.
Ma question concerne les aéroports au Brésil. En 2007, il y avait un manque de capacité et un manque de sécurité. D'ailleurs, comme on a vu, un accident est survenu à l'aéroport de São Paulo où un Airbus 320 s'est écrasé.
Ceci ajoute aussi une insuffisante capacité à contrôler le secteur aérien et cela a amené le Brésil à prendre des mesures fortes pour mettre le système à niveau et réorganiser l'administration de l'aviation civile.
Vous avez mentionné que vous faites affaire de pays à pays. Vous aidez les compagnies canadiennes à pouvoir faire exécuter des travaux ailleurs. Vous avez mentionné aussi que dans un autre pays — je crois que c'est de l'Amérique centrale — le Canada s'était impliqué dans la construction ou l'agrandissement d'un aéroport et que cela a été fait d'une façon extraordinaire.
Est-ce que des mesures ont été prises afin que les compagnies canadiennes puissent apporter leur savoir faire pour rendre plus sécuritaire le domaine de l'aviation au Brésil?
M. Zablocki : Dans le domaine de l'aviation et des aéroports, on a maintenant seulement un projet dans l'Équateur. La première fois qu'on a fait quelque chose de ce genre, c'était avec la corporation Aecon Construction. Dans le domaine, au Brésil, il semble qu'ils aient la même capacité pour créer toute l'infrastructure en ce qui concerne les aéroports. Donc, ce n'est pas vraiment une occasion pour les compagnies canadiennes, maintenant, pour autant que je sache, d'approcher le gouvernement brésilien et pour obtenir un projet dans ce domaine. Par contre, il y a plusieurs pays dans la région de l'Amérique latine dans lesquels on a plusieurs opportunités pour des projets.
Le sénateur Fortin-Duplessis : C'est mon unique question. Beaucoup de sénateurs veulent questionner les témoins.
[Traduction]
Le sénateur Downe : Je me pose des questions sur la structure de votre organisme. Avez-vous des bureaux et des représentants dans ces pays, ou bien travaillez-vous uniquement au Canada?
M. Zablocki : Nous travaillons uniquement au Canada, sauf en ce qui concerne Cuba. Nous avons à La Havane un représentant qui gère les projets sur le terrain. Le marché cubain étant plus risqué que les autres, nous voulons nous assurer d'atténuer le risque dans cette région. Notre représentant fait également de la prospection ailleurs dans la région des Caraïbes.
Aux autres endroits où nous avons des projets importants, comme dans le cas de l'aéroport de Quito, nous engageons du personnel local ou une personne qui nous représentera dans la région. Toutefois, nous n'avons pas de personnel permanent à l'étranger.
Le sénateur Downe : Vous avez mentionné Cuba, que je vais prendre en exemple. Vous avez parlé de risque. Dans quelle mesure le risque est-il élevé dans ces pays? À Cuba, d'après votre rapport annuel, vous avez facilité des opérations commerciales totalisant 600 millions de dollars dans les 20 dernières années. Combien de vos comptes sont impayés?
M. Zablocki : Je suis heureux de dire qu'à Cuba, nous semblons bénéficier du statut de nation la plus favorisée, et peut-être même de société la plus favorisée. Nous faisons des affaires à Cuba depuis 1991 et avons toujours été payés pour tous les travaux que nous avons réalisés.
Pour ce marché, je trouve cela assez extraordinaire. Le comité sait sans doute que le gouvernement cubain a décidé sur une base sélective de ne pas rembourser certaines dettes contractées auprès d'autres pays. Toutefois, nos relations avec Cuba et les résultats que nous y avons obtenus ont été très positifs. Nous avons eu davantage de difficultés dans d'autres marchés. Comme je l'ai dit plus tôt, cependant, nous avons signé un contrat au nom du gouvernement du Canada afin de construire, par exemple, un aéroport pour le gouvernement équatorien. Nous avons un contrat correspondant avec l'exportateur canadien chargé de faire le travail. Par conséquent, s'il y a des risques financiers dans un pays, ce n'est pas la CCC qui les assume. Ils sont entièrement transférés à l'exportateur. Voilà pourquoi il est important pour nous de faire un contrôle préalable rigoureux de la situation financière, de la technologie et des moyens de gestion du fournisseur canadien, pour avoir une certitude raisonnable qu'il sera en mesure de s'acquitter de ses obligations et que son bilan est assez solide pour qu'il puisse assumer les risques en cause.
Le sénateur Downe : Vous avez mentionné, dans votre réponse précédente, que vous avez un représentant permanent à Cuba à cause des risques. Vous avez ajouté que vous avez toujours été payés. Quelles sont ces risques?
M. Zablocki : Les risques découlent du fait que Cuba a décidé sélectivement de ne pas rembourser certains autres pays. Nous avons jugé prudent d'avoir sur place une personne pouvant obtenir des renseignements de première main pour nous avertir d'éventuelles circonstances susceptibles de compromettre la stabilité du pays. J'ajouterai que Cuba est loin de constituer notre plus gros client. Nos activités dans le cadre de l'Accord sur le partage de la production de défense ont engendré l'année dernière un chiffre d'affaires de 1,4 milliard de dollars. Par comparaison, nos activités à Cuba ne rapportent qu'environ 60 millions de dollars par an. Toutefois, à cause des remous créés par la décision cubaine de ne pas rembourser certaines dettes, nous tenions à avoir une personne sur place.
Le sénateur Downe : Parlez-moi de votre financement. Combien recevez-vous du Parlement?
M. Zablocki : Nous recevons 15,5 millions de dollars.
Le sénateur Downe : Et quel revenu tirez-vous de vos autres activités?
M. Zablocki : L'année dernière, nos frais de service se sont élevés à 12,9 millions de dollars. Les crédits de 15,5 millions ont été relativement stables depuis 2001-2002 lorsque le chiffre d'affaires annuel découlant de l'Accord sur le partage de la production de défense ne s'élevait qu'à 700 millions de dollars. Aujourd'hui, ce chiffre atteint 1,4 milliard. Nous avons pratiquement doublé les activités dans ce secteur.
Le sénateur Downe : Vos activités rapportent-elles de l'argent au Trésor?
M. Zablocki : Cela a été le cas dans le passé, depuis 1946, mais pas récemment. Nous nous fixons une très faible marge bénéficiaire parce que nous voulons éviter que les frais de service facturés aux exportateurs canadiens réduisent leur compétitivité lorsqu'ils soumissionnent sur des contrats en concurrence avec d'autres pays.
La présidente : Dans la même veine, vous avez dit qu'il est difficile de signer des contrats entre gouvernements dans le cas du Brésil. D'autres témoins nous ont dit que nous sommes désavantagés parce que d'autres gouvernements ont réussi à conclure des ententes avec le gouvernement brésilien. Je pense en particulier à l'Europe et peut-être à la Chine.
M. Zablocki : Je ne peux pas parler de ce point particulier, mais je peux vous faire part de mes impressions personnelles.
Il est possible, à l'occasion, de conclure des ententes de gouvernement à gouvernement au Brésil, dans les cas où des exceptions sont permises par rapport aux règles régissant ordinairement les marchés publics. Je ne saurais pas vous dire si des cas de ce genre se sont présentés pour d'autres pays. Cela pourrait expliquer les ententes dont vous avez entendu parler.
Le comité n'est pas sans savoir que l'économie mondiale connaît un grave ralentissement, qui a évidemment intensifié la concurrence dans tous les marchés. De nombreux gouvernements font des efforts particuliers pour aider leurs entreprises à décrocher des contrats à l'étranger. Je ne peux pas vous dire si ces efforts ont réussi ou non au Brésil, mais il n'y a pas de doute qu'il y a actuellement une plus forte concurrence sur tous les marchés.
Le sénateur Finley : Bonjour. J'essaie simplement de comprendre un peu mieux vos activités. Vous avez dit que votre chiffre d'affaires de l'année dernière était de 1,6 milliard de dollars. Cela comprend-il ou non les ventes de produits de défense au gouvernement des États-Unis?
M. Zablocki : Ces ventes sont comprises.
Le sénateur Finley : Que représentent exactement les ventes au gouvernement américain?
M. Zablocki : Elles totalisent 1,4 milliard de dollars.
Le sénateur Finley : Il reste donc environ 200 millions de dollars d'activités en dehors secteur de la défense, n'est-ce pas?
M. Zablocki : Ce chiffre est exact pour l'année dernière. Il fluctue beaucoup d'une année à l'autre. Le projet de l'aéroport de Quito, par exemple, avait une valeur de 600 millions de dollars, mais le contrat a été signé en 2005, les travaux étant étalés sur un certain nombre d'années. Vous constaterez que la courbe de notre chiffre d'affaires comporte beaucoup de crêtes et de creux.
Le sénateur Finley : Je comprends. Toutefois, le rapport général entre votre chiffre d'affaires et les activités pour lesquelles vous détenez un monopole est de 1,6 à 1,4 milliard de dollars pour votre exercice le plus récent.
M. Zablocki : C'est exact.
Le sénateur Finley : Sur votre effectif total de 140 employés, y a-t-il des personnes chargées exclusivement des activités liées à la défense avec les États-Unis et d'autres qui s'occupent des activités de type commercial?
M. Zablocki : Le rapport n'est pas parfait, mais, sur le plan des efforts déployés, je dirais que le personnel de la CCC consacre probablement 65 à 70 p. 100 de son temps au secteur de la défense.
Le sénateur Finley : Je n'avais pas pensé à la répartition à ce stade. J'avais simplement pris le chiffre d'affaires total et, en me basant sur des frais de service de 12,9 millions de dollars, j'avais calculé que vous perceviez une commission de 0,8 p. 100. Je me rends compte maintenant que le pourcentage est beaucoup plus élevé parce que vous recevez du financement à l'égard des ventes aux États-Unis. Par conséquent, les 12,9 millions sont perçus sur les ventes commerciales de 200 millions, n'est-ce pas?
M. Zablocki : C'est exact.
Le sénateur Finley : Votre commission, si je peux l'appeler ainsi, doit donc se situer aux alentours de 6 p. 100. Je suppose qu'elle varie.
M. Zablocki : C'est bien le cas. Les 12,9 millions comprennent les frais de financement relatifs aux opérations commerciales réalisées à Cuba. Ces frais se distinguent de ce que nous percevons sur un projet comme celui de l'aéroport de Quito, où nous prélevons un pourcentage sur la valeur.
Nous avons une stratégie de détermination des prix. En général, nous facturons 5 p. 100 ou moins selon la nature du contrat et les risques inhérents. Nous avons tendance à nous contenter d'une faible marge bénéficiaire sur les contrats. Toutefois, nous exigeons les taux commerciaux pour le financement à Cuba.
Le sénateur Finley : Au tout début de votre exposé préliminaire, vous avez parlé de gestion du risque. Je suppose que les ventes de 1,4 milliard de dollars faites aux États-Unis n'exigent pas une gestion particulièrement serrée du risque. Je ne sais pas. J'ai eu recours à la CCC à cette fin il y a bien des années.
Votre gestion du risque a-t-elle pour objet de s'assurer que la société canadienne sera payée? Si le client est insolvable, la CCC doit-elle couvrir les pertes? Je ne sais pas si cela fait partie ou non de votre mandat.
M. Zablocki : Non, nous n'assurons pas du tout les paiements. Les entreprises peuvent recourir aux services d'assurance offerts par Exportation et Développement Canada. Je ne voudrais pas aborder le sujet au nom de cet organisme.
Nous intervenons pour aider les exportateurs canadiens s'ils ont des différends relatifs aux paiements avec l'acheteur étranger.
Le sénateur Finley : J'essaie de comprendre. Madame la présidente, je vous promets d'en venir au Brésil dans un instant. Vous ne participez pas vraiment à l'effort de commercialisation. Si je dirigeais une société, j'examinerai ce qu'il y a sur le marché et je prendrai une décision sur la façon de procéder pour faire des ventes à un pays donné et sur la nature des marchandises à lui vendre. Intervenez-vous ou non dans ce processus?
M. Zablocki : Nous participons dans une très grande mesure à l'effort de commercialisation. D'ordinaire, nous signons des protocoles d'entente avec les gouvernements étrangers. En Amérique latine, nous en avons signé avec la Colombie, l'Argentine et le Pérou. Nous travaillons avec ces pays d'une manière proactive pour cerner les occasions à saisir dans les domaines qui correspondent aux capacités canadiennes. Il y a aussi des cas où les exportateurs canadiens viennent nous voir pour nous parler d'occasions qu'ils ont eux-mêmes trouvées. Ils nous demandent alors de leur expliquer de quelle façon nous pouvons aider le gouvernement étranger en cause à gérer le risque.
Le sénateur Finley : Quelle est la valeur totale des contrats dont vous vous occupez au Brésil en ce moment?
M. Zablocki : Zéro.
Le sénateur Finley : Participez-vous actuellement avec des sociétés canadiennes à des activités de prospection auprès de clients éventuels au Brésil?
M. Zablocki : Nous collaborons avec deux ou trois entreprises canadiennes au sujet de certaines perspectives dans la région. Les projets en cause en sont à différents stades. Il m'est très difficile en ce moment de dire s'ils réussiront ou non.
Le sénateur Finley : J'ai une dernière question. Pouvez-vous nous dire, sans rien nous révéler de confidentiel, dans quels secteurs travaillent ces deux ou trois entreprises?
M. Zablocki : Deux d'entre elles s'occupent de défense, et la troisième appartient au secteur de l'infrastructure.
Le sénateur De Bané : Je voudrais poser deux questions. Tout d'abord, si un gouvernement vous approche, cela signifie-t-il qu'il est prêt à passer un marché en source unique avec le Canada? Approche-t-il en même temps d'autres pays pour leur demander de l'aider à passer un marché?
M. Zablocki : Dans certains cas, il approchera plus d'un gouvernement pour un contrat d'approvisionnement. Nous essayons de faire valoir la qualité des capacités et des technologies canadiennes et de montrer qu'elles sont supérieures à celle de nos concurrents des autres pays.
Le sénateur De Bané : Ma seconde question porte sur votre secteur d'activité militaire. Je suppose que le Canada participe à ce domaine non parce qu'il détient une part garantie du marché américain, mais parce qu'il est compétitif. Est-ce exact? Ou bien avons-nous une part garantie?
M. Zablocki : C'est votre seconde hypothèse qui est la bonne. L'industrie canadienne de la défense dispose de technologies et de capacités extraordinaires dans de nombreux domaines, y compris la réparation et la révision.
Le sénateur De Bané : En gros, 70 p. 100 de vos activités consistent à répondre aux besoins de défense des États-Unis dans le cadre de l'Accord sur le partage de la production de défense ainsi qu'aux besoins de la NASA. Je crois comprendre que vous détenez une toute petite part du marché des ventes mondiales de matériel de défense aux pays alliés et d'optique commune. Comment se fait-il que nous soyons compétitifs sur le marché américain sans l'être autant dans le secteur des ventes aux pays alliés et d'optique commune?
M. Zablocki : Je suis heureux que vous me posiez cette question parce que c'était l'un des points que je voulais aborder tout à l'heure.
Le secteur des ventes mondiales de matériel de défense hors des États-Unis est relativement nouveau pour nous. Pour ce qui est de l'étendue de ce marché, je dois dire que le gouvernement américain fournit les pays alliés et d'optique commune en matériel de défense. L'année dernière, son chiffre d'affaires dans ce secteur a été assez élevé. Toutefois, les responsables américains m'ont dit qu'ils pourraient vendre pour des milliards de dollars de plus, mais qu'ils n'ont pas les moyens de satisfaire cette demande.
La CCC peut maintenant se substituer aux États-Unis dans ce domaine, mais sans être en concurrence avec eux puisque, de toute façon, ils ne peuvent pas répondre à cette demande supplémentaire. Ce secteur d'activité est relativement nouveau pour nous. Cela explique que notre chiffre d'affaires à cet égard n'a pas été très élevé jusqu'ici. J'estime cependant qu'en ce moment, c'est probablement le secteur qui a le plus de chances de croître rapidement à la CCC.
Le sénateur Mahovlich : Je vous remercie. J'avais des questions de même nature. Si je m'en souviens, le Canada est actif dans le secteur minier depuis ma naissance. Je suis né en pays minier. À ma connaissance, nous avions des mines au Brésil dans les années 1940. La CCC participait-elle à ces projets?
À l'heure actuelle, le Brésil possède et exploite des mines dans le nord de l'Ontario. Est-ce que la CCC participe d'une façon quelconque à ces projets?
M. Zablocki : Non, la Corporation commerciale canadienne ne s'occupe pas du secteur des mines.
Le sénateur Mahovlich : Relève-t-il entièrement du secteur privé?
M. Zablocki : Oui, ce sont des sociétés privées. Le secteur comporte des risques. Dans la mesure où une partie de ses activités est de nature exploratoire et où on ignore s'il sera possible de tirer des revenus de certaines mines, c'est un secteur spéculatif. Ce n'est pas vraiment un domaine pour nous. Les entreprises canadiennes semblent être en mesure de négocier avec les gouvernements étrangers et d'obtenir d'eux des conditions satisfaisantes d'accès.
Pour répondre à la seconde partie de votre question, sénateur, nous ne nous occupons pas d'activités intérieures au Canada. Nous ne participons à aucune forme d'importation.
Le sénateur Mahovlich : Le Canada a-t-il toujours été réputé pour ses exportations de matériel militaire à différents pays?
M. Zablocki : Il est difficile pour moi de le dire, mais il n'y a pas de doute que nous avons bonne réputation parmi les militaires américains. Nous avons toujours essayé de maintenir une base nord-américaine dans le domaine des industries de défense. Je crois que les deux pays ont toujours jugé prudent de ne pas faire double emploi en évitant de créer au Canada des capacités qui peuvent aussi être établies aux États-Unis. Étant de proches alliés, nous évitons ce genre de redondance. L'industrie de défense nord-américaine est appuyée par l'Accord sur le partage de la production de défense, dans le cadre duquel chacun des deux pays peut profiter des technologies de l'autre.
Le sénateur Mahovlich : Les militaires de Cuba ou du Brésil peuvent obtenir du matériel militaire russe.
M. Zablocki : C'est possible.
Le sénateur Mahovlich : Ils peuvent bien acheter du matériel militaire aux Russes, n'est-ce pas?
M. Zablocki : C'est exact.
Le sénateur Mahovlich : Je vous remercie.
Le sénateur Johnson : Je voudrais poursuivre dans la même veine que le sénateur Finley. J'ai trouvé ses questions très pertinentes.
Vous avez dit, de même que la présidente, que le Brésil n'aime pas traiter de gouvernement à gouvernement, préférant lancer des appels d'offres. En même temps, le Canada n'a pas de cœntreprises en ce moment. Est-ce exact?
M. Zablocki : Je tiens à faire une mise au point si j'ai donné cette impression. Je n'ai pas voulu dire que le Brésil n'aime pas traiter de gouvernement à gouvernement. Ce qu'il n'aime pas, ce sont les contrats directs en source unique. Les Brésiliens préfèrent lancer des appels d'offres internationaux pour recevoir des soumissions concurrentielles. Notre modèle d'affaires se base sur les contrats entre gouvernements et la facilitation des marchés directs.
Le sénateur Johnson : Je comprends mieux maintenant.
Que pensez-vous des visites de notre premier ministre et de ses discussions avec la présidente Rousseff? Croyez-vous qu'elles améliorent nos chances au Brésil et facilitent nos contacts avec les milieux d'affaires brésiliens?
M. Zablocki : Absolument. J'ai laissé entendre tout à l'heure que les gouvernements des différents pays deviennent de plus en plus compétitifs dans l'économie mondiale et que la nature des relations bilatérales peut considérablement aider les sociétés nationales à décrocher des contrats.
Le sénateur Johnson : Quels sont vos projets d'avenir à cet égard? Avez-vous actuellement des projets en cours que nous pouvons mentionner dans notre rapport?
M. Zablocki : Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous suivons actuellement trois possibilités sur le marché brésilien, de concert avec des sociétés canadiennes. Nos meilleures perspectives, que nous surveillons étroitement, se situent dans le secteur des projets d'infrastructure qui entoureront les deux grandes rencontres que le Brésil doit accueillir dans les prochaines années.
Le sénateur Johnson : Que pensez-vous de l'attitude des entreprises canadiennes? Préfèrent-elles avoir des activités au Chili ou dans d'autres pays plutôt qu'au Brésil? Ce genre d'attitude est-il courant parmi les sociétés auxquelles vous avez affaire?
M. Zablocki : Il m'est difficile de me prononcer sur ce qu'elles préfèrent. Toutefois, notre modèle de fonctionnement réussit mieux dans d'autres régions de l'Amérique latine, où les gouvernements aiment bien définir une solution et signer un contrat en source unique lorsqu'ils ont besoin de biens ou de services en urgence ou encore lorsqu'ils se rendent compte qu'ils peuvent réaliser d'importantes économies et courir moins de risques en traitant avec le gouvernement du Canada. En ce moment, nous avons beaucoup plus de pistes et de contrats en cours dans d'autres régions de l'Amérique latine qu'au Brésil.
Le sénateur Johnson : Les autres gouvernements ont un mode de fonctionnement très différent de celui du Brésil.
M. Zablocki : C'est cela.
Le sénateur Johnson : C'est sur ce point que nous devrions concentrer nos efforts dans le cadre de l'étude du comité.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Vous offrez un service aux pays étrangers. Vous leur garantissez, d'une certaine façon, que les compagnies canadiennes pourront répondre aux exigences. Et vous donnez aussi un service aux compagnies canadiennes.
Maintenant les autres pays qui font affaire avec le Brésil, est-ce qu'ils ont une corporation semblable à la vôtre, qui les aide à traverser les différents obstacles? Ou est-ce que le Canada est unique à avoir une corporation comme la vôtre?
[Traduction]
M. Zablocki : Nous sommes uniques en fonction de la manière dont nous sommes organisés pour faire ce travail. Cela ne signifie pas que les autres gouvernements n'ont pas leur propre stratégie pour renforcer la compétitivité de leurs entreprises. Par exemple, le gouvernement chinois, comme vous le savez probablement, présente souvent des offres de financement extrêmement avantageuses. Dans certains cas, la Chine propose des ensembles complets de services comprenant des moyens de financement. Elle peut offrir de charger une entreprise de s'occuper de l'infrastructure. En même temps, elle maintient des relations très étroites avec les responsables du pays en cause aux niveaux politiques les plus élevés.
Les autres gouvernements usent de différents moyens pour influencer d'éventuels clients. En ce qui concerne le Canada, la CCC est plus ou moins unique. À ma connaissance, l'Espagne est le seul autre pays qui ait un organisme semblable, l'ISDEFE, mais il est beaucoup plus petit que la CCC sur le plan du chiffre d'affaires, probablement parce qu'il est plus récent.
Le sénateur D. Smith : Je compte poser une question au représentant de Bombardier qui doit comparaître sous peu, mais je vais vous demander essentiellement la même chose pour voir ce que vous avez à répondre.
La société brésilienne Embraer construit des avions de ligne dont Air Canada se sert beaucoup. Nous avons environ 45 appareils du petit modèle et une vingtaine du grand. Au total, nous en avons une soixantaine. Si Bombardier essayait de vendre des avions à une compagnie aérienne brésilienne, les règles du jeu seraient-elles équitables? Il n'y a pas de doute qu'Embraer peut compter sur des règles du jeu équitables lorsqu'elle essaie de vendre ses appareils au Canada. À votre avis, en serait-il de même si Bombardier tentait de vendre des avions au Brésil?
M. Zablocki : C'est difficile à dire parce que nous nous occupons de marchés publics. Si le gouvernement du Brésil cherchait à acquérir des avions, nous aiderions Bombardier, comme tout autre fournisseur canadien de ce secteur, en cherchant à négocier une entente pour faciliter la vente des produits canadiens. Beaucoup des ventes d'aéronefs civils se négocient au niveau des entreprises. Ce n'est pas un marché dans lequel nous avons tendance à intervenir.
Le sénateur D. Smith : Entendez-vous jamais des gens exprimer une opinion sur la question de savoir si les règles du jeu sont équitables?
M. Zablocki : C'est difficile pour moi. Surtout dans le cas du Brésil, je ne dirais pas que je suis très au courant.
Le sénateur D. Smith : Je vous remercie.
La présidente : Je vous remercie d'avoir comparu devant le comité et de nous avoir expliqué non seulement le fonctionnement de la CCC, mais aussi vos activités en Amérique du Sud. Comme vous pouvez le constater, notre étude est axée sur le Brésil. Votre témoignage nous est indirectement utile parce qu'il nous renseigne sur ce que nous devrions faire ou ne pas faire dans ce pays. Dans le cadre de notre étude, il nous est extrêmement utile de savoir où vous vous situez et quelles sont vos possibilités. Je vous remercie de votre présence ce matin.
Nous allons maintenant accueillir notre second groupe de témoins, toujours dans le cadre de notre étude. Nous avons, de la société Bombardier Inc., George Haynal, vice-président aux Affaires gouvernementales; de la société HB Global Advisors Corp., Michael Woods, associé, et Élie Ducharme, stagiaire en droit. C'est bien cela?
Élie Ducharme, stagiaire en droit, HB Global Advisors Corp. : C'est exact.
La présidente : Vous êtes bien brave. Si j'avais été moi-même stagiaire en droit, je n'aurais peut-être pas osé me présenter devant le Sénat.
Enfin, de la société LED Roadway Lighting Ltd., nous avons Charles Cartmill, président et premier dirigeant.
Comme je l'ai déjà dit à nos témoins, nous avons entrepris une étude sur le Brésil. Nous avons entendu parler de sociétés et d'initiatives qui ont connu des difficultés dans ce pays. D'autres nous ont dit que nous avons manqué des occasions qui étaient ouvertes à la participation canadienne. Nous avons maintenant des gens expérimentés à la table des témoins. Nous vous invitons à présenter un bref exposé préliminaire, après quoi nous espérons pouvoir engager un dialogue avec vous, sous forme de questions et réponses.
Monsieur Cartmill, vous êtes le premier. Je sais que vous avez des choses à nous montrer et à nous dire. Vous pouvez le faire dans les cinq minutes qui vous sont attribuées. Je vous souhaite la bienvenue au comité.
Charles Cartmill, président et premier dirigeant, LED Roadway Lighting Ltd : Merci beaucoup. Je vous présente mon produit. J'espère que chacun aura l'occasion de le voir. Je vous encourage, une fois que j'aurai terminé mon exposé, à venir regarder et toucher parce que nous avons une technologie secrète. Je ne saurais même pas si ce lampadaire est allumé. Il éclaire le chemin et fonctionne à si basse température que les circuits électroniques peuvent durer 20 ans. Voilà le secret qui nous distingue des autres.
Je suis Charles Cartmill, président et premier dirigeant de la société LED Roadway Lighting. Je voudrais remercier le comité ainsi que les autres témoins de cette occasion de parler des relations commerciales entre le Canada et le Brésil et, plus particulièrement, des difficultés auxquelles s'exposent les exportateurs canadiens.
La société LED Roadway Lighting fabrique des produits à diodes électroluminescentes pour l'éclairage des voies et des lieux publics. Nous avons notre siège à Halifax et une usine de 55 000 pieds carrés à Amherst, en Nouvelle-Écosse. Nos produits sont actuellement installés dans 24 pays et plus de 300 villes et services publics.
Notre intérêt pour le marché brésilien a commencé au départ lorsque nous avons participé, plus tôt cette année, à une mission commerciale du gouvernement fédéral dirigée par le ministre Fast. Après d'autres visites au Brésil, nous avons bénéficié d'un appui extraordinaire de la part du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, qui nous a notamment présenté des clients et des partenaires possibles. Nous avons trouvé extrêmement précieux les services du MAECI, et surtout le soutien que nous avons reçu du Service des délégués commerciaux. Cet appui est inappréciable lorsqu'on veut s'établir dans un nouveau marché. Nous croyons que le Brésil a de nombreuses possibilités, compte tenu des dépenses que le gouvernement a prévu de consacrer aux technologies propres et aux projets d'infrastructure, surtout à l'approche des championnats de la Coupe mondiale de 2014 et des Jeux olympiques de 2016.
Le marché présente d'importantes possibilités. Avec quelque 14 millions de lampadaires d'une technologie désuète sur l'ensemble du territoire brésilien, le marché a une valeur approximative de 7 milliards de dollars canadiens. Dans les seules villes de Rio de Janeiro et de São Paulo, il y aurait environ 500 000 et 560 000 lampadaires à remplacer. L'électricité coûte 27 cents canadiens le kilowatt, et les dispositifs actuels posent de sérieux problèmes d'entretien. Dans ces conditions, notre technologie écoénergétique fondée sur les diodes électroluminescentes pourrait parfaitement convenir au marché brésilien. Elle n'exige presque pas d'entretien et permet d'épargner jusqu'à 80 p. 100 sur la consommation d'énergie.
Pour ce qui est des défis et des obstacles pour les petites et moyennes entreprises, la société LED Roadway Lighting a actuellement un effectif d'environ 155 employés, ce qui nous classe dans la catégorie des PME. Pour une petite entreprise comme LRL, la conquête d'un nouveau marché est à la fois difficile et coûteuse. Dans le cas du marché brésilien, nous avons pu noter plusieurs problèmes réglementaires et autres qui nécessitent un examen, comme d'importantes barrières tarifaires et un droit d'importation de 60 p. 100. Les municipalités et d'autres utilisateurs finals ont dit qu'ils souhaitaient acheter nos produits sur grande échelle, mais les droits d'importation élevés constituent pour nous un important inconvénient sur le plan du coût livré.
De plus, des formalités douanières compliquées imposent des frais et des délais assez importants. LRL a eu beaucoup de difficultés à expédier au Brésil des produits à des fins d'évaluation. Le pays a deux régimes de dédouanement : un régime accéléré et un régime officiel. Malgré les délais prévus pour les deux régimes, nous avons constaté qu'en pratique, le dédouanement peut littéralement prendre des mois. De plus, malgré nos tentatives, nous n'avons pas eu accès au régime prétendument accéléré.
Les délais qu'implique le système actuel pourraient devenir très coûteux pour notre société. En particulier, les retards imposés par le dédouanement des produits expédiés à des fins d'évaluation en vue d'un appel d'offres devant être lancé à São Paulo pourraient compromettre de nouvelles ventes d'une valeur de 280 millions de dollars parce que nos échantillons sont encore pris au piège d'un processus de dédouanement compliqué.
Il y a ensuite les problèmes de financement et d'assurance-crédit à l'exportation. LRL est cliente d'Exportation et Développement Canada depuis près de 10 ans. Nos consultations auprès d'EDC ont révélé que, dans bien des cas, les municipalités brésiliennes pourraient ne pas être admissibles à l'assurance d'après les politiques actuelles.
L'examen des barrières tarifaires, particulièrement dans le cas des technologies propres et des produits écoénergétiques, est nécessaire si on veut augmenter les chances de succès des PME sur le marché brésilien. Je répète : il est nécessaire d'examiner les barrières tarifaires, surtout dans le cas des technologies propres et des produits écoénergétiques, et de rationaliser le processus douanier afin de réduire les coûts de la chaîne d'approvisionnement pour tous les intéressés. Compte tenu des préoccupations d'EDC au sujet du financement et de l'assurance-crédit, il faudrait aussi envisager un mécanisme qui permettrait à la Corporation commerciale canadienne et à Exportation et Développement Canada de financer des projets d'infrastructure favorisant les technologies vertes et les économies d'énergie et d'obtenir un rendement fondé sur les économies d'énergie réalisées.
Il faudrait simplifier le processus de participation de la CCC aux projets d'infrastructure. Nos discussions nous amènent à croire que l'intervention de la CCC aux premiers stades peut accélérer le processus d'appel de propositions. La ville de São Paulo était en fait d'avis que la CCC constituait l'option la plus avantageuse pour elle. Un nouveau maire devant être élu l'année prochaine, la ville souhaite lancer le processus. Son mécanisme actuel d'appel de propositions retarderait le lancement du plus grand programme énergétique brésilien, qui consiste à convertir les lampadaires de São Paulo.
Comme le Brésil fait partie des marchés prioritaires de la stratégie commerciale mondiale, les associations d'entreprises et les organismes gouvernementaux devraient établir des liens interculturels pouvant favoriser le commerce et le développement économique pour les deux pays. La plupart des sociétés d'optique traditionnelle qui cherchent à développer leurs exportations se limitent à considérer nos voisins du Sud. La conjoncture économique mondiale exige une approche différente. Les programmes pouvant préparer les chefs d'entreprises actuels et futurs à aborder le marché brésilien se révéleront très payants à l'avenir.
D'après un récent article du Vancouver Sun signé par Ray Castelli, chef de la direction de Weatherhaven, l'enseignement du portugais brésilien serait un moyen de favoriser le développement du commerce avec un pays qui comptera dans peu de temps parmi les cinq plus grandes économies du monde.
Nous avons nous-mêmes engagé à cette fin des diplômés de commerce brésiliens, portugais et espagnols.
George Haynal, vice-président, Affaires gouvernementales, Bombardier Inc. : Je suis heureux d'avoir l'occasion de parler aux honorables sénateurs d'une question aussi importante qu'opportune, nos relations avec le Brésil. Je vous félicite d'ailleurs d'avoir entrepris l'examen de ce sujet.
Je m'occupe des relations internationales chez Bombardier. Nous vivons dans un monde complexe. Nous construisons des avions et des trains. Je crois qu'il est très pertinent de souligner le fait que nous construisons des trains parce que cela s'inscrit dans l'équation brésilienne, même si la plupart des gens n'en sont pas conscients.
Bombardier se classe troisième parmi les plus grands constructeurs mondiaux d'aéronefs civils. Je reviendrai sur cette question dans un instant. Dans le passé, notre seul concurrent dans le domaine des avions régionaux était Embraer, porte-drapeau du secteur manufacturier moderne du Brésil. Embraer est aussi pour nous un concurrent très fort.
Bombardier est en outre le plus grand constructeur et fournisseur mondial de systèmes de transport sur rail. Je crois que la plupart des gens au Canada ne le savent pas parce que notre marché intérieur n'est pas assez important dans ce domaine pour attirer l'attention du public. C'est pourtant la réalité : nous sommes les plus grands du monde. Pour le rester, nous sommes également à l'avant-garde des technologies du rail, y compris le transport urbain. Cela concerne particulièrement le Brésil.
Je crois que, pour beaucoup de gens, les relations commerciales entre Embraer et Bombardier, qui se sont envenimées à l'occasion, reflètent les relations actuelles de Bombardier avec le Brésil et sa présence dans le pays. Cela est faux. Je voudrais dire quelques mots à ce sujet. Il est également important de comprendre le contexte et les raisons pour lesquelles la question a tellement retenu l'attention.
Le contexte est défini par l'absence de contexte. Dans une autre vie qui n'avait absolument aucun lien avec mes fonctions actuelles, je m'inquiétais beaucoup de nos relations avec le Brésil. Je vais me servir d'une très mauvaise analogie pour vous décrire la situation. À un moment donné, les relations entre le Canada et le Brésil étaient tellement ténues qu'elles ressemblaient à la membrane d'un tambour. Chaque fois qu'on laissait tomber un petit caillou, il rebondissait interminablement et était très difficile à contrôler à cause de l'absence de contexte. Par contre, nos relations avec les États-Unis étaient semblables à une pelouse verte et dense : on peut laisser tomber un gros bloc de rocher sans pour autant manquer de moyens d'utiliser le contexte pour régler individuellement chaque problème ponctuel qui se pose.
Cela fait 20 ans que j'attends l'occasion d'utiliser cette analogie dans un contexte assez vaste. Vous en avez été les victimes. Bref, il est important de comprendre que, dans un cas de ce genre, les problèmes ponctuels ont un retentissement qu'ils ne méritent probablement pas.
Nous sommes des concurrents très forts. Embraer, de son côté, est un excellent concurrent, particulièrement dynamique. Comme je l'ai dit, nous étions seuls en lice dans le temps. Il y a lieu de noter que ce n'est plus le cas. Le marché de l'avion régional à réaction n'est plus un duopole : d'autres entreprises du Brésil, de la Russie et de la Chine ont fait leur entrée sur le marché et travaillent fort pour s'assurer de la présence de règles du jeu équitables pour nous tous sur le marché mondial. Cela a donné lieu à une dynamique différente pour tout le monde, y compris les constructeurs en cause.
Je serais heureux de répondre à des questions à ce sujet, mais je crois qu'il est important de situer cela en contexte. Des progrès sensibles ont été réalisés entre notre gouvernement et ceux des autres pays en vue d'établir des règles internationales qui permettront d'éviter les différents commerciaux inutiles et injustifiés.
Il y a un autre segment du marché aéronautique qu'il vaut la peine de mentionner. Nous construisons non seulement des avions de ligne, mais aussi des avions d'affaires. En fonction de la valeur de sa production, Bombardier est en fait le plus important constructeur mondial d'avions d'affaires. C'est un autre fait qui est peu connu. Dans ce domaine, le Brésil est pour nous un marché très important. Plus de 120 de nos avions d'affaires sont actuellement en service au Brésil. C'est donc un très grand marché. Nous y avons même établi un centre de maintenance. Nous sommes bien enracinés dans le pays à cet égard. Ce n'est probablement pas le tableau que vous ont présenté les témoins précédents.
Nous pourrons revenir là-dessus plus tard. Je suis sûr que vous aurez des questions à poser à ce sujet.
Sans vouloir abuser de mon temps de parole, j'ajouterai que nous sommes également présents au Brésil dans le secteur du rail. C'est à mon avis une dimension très importante de nos relations. Bombardier a pour la première fois établi une présence dans ce secteur en 2001 grâce à une acquisition axée sur la maintenance des wagons du métro de São Paulo et d'ailleurs. Ce secteur d'activité s'est développé. Nous avons maintenant 200 employés qui travaillent au Brésil dans le seul secteur du rail.
L'événement le plus marquant que je peux vous signaler dans ce domaine, c'est que nous avons récemment réussi à décrocher un gros contrat pour construire un monorail révolutionnaire à São Paulo. Cette ligne, qui est notamment construite en prévision des championnats de la Coupe mondiale et d'autres rencontres, devrait littéralement révolutionner le transport en commun dans une partie de la ville, faisant passer le trajet de plus de deux heures à 40 minutes. La surface d'encombrement sera toute petite. Il s'agit d'une technologie développée au Canada. En fait, le programme a commencé à Kingston, où se trouve notre centre d'ingénierie. C'est un prolongement de la technologie utilisée pour notre navette automatisée, que beaucoup d'entre vous ont sans doute vue à Vancouver et ailleurs. Nous la commercialisons maintenant à l'échelle mondiale. Nous avons déjà installé des systèmes en Arabie Saoudite et ailleurs.
Encore une fois, nous sommes présents des deux côtés de la barrière. Nous sommes à la fois des concurrents et des partenaires. C'est un monde aussi étendu que compliqué, et nous avons tout intérêt à développer notre partenariat et nos relations avec le Brésil.
Michael Woods, associé, HB Global Advisors Corp. : Ordem e Progresso est la devise qui figure sur le drapeau du Brésil; elle signifie « ordre et progrès » en portugais. Lorsque l'équipe de Heenan Blaikie était au Brésil avec le ministre Ed Fast en juin dernier, j'ai remarqué à quel point les Brésiliens étaient fiers de leur pays et de leur devise, ce qui en dit long sur le pays, tout comme la devise « paix, ordre et bon gouvernement » en dit long sur le Canada. Les deux expressions ont beaucoup en commun. Il en va de même pour l'histoire des deux pays et, je l'espère, pour notre avenir commun.
[Français]
Hennan Blaikie est reconnaissant de l'occasion qui lui est donnée de s'adresser au comité aujourd'hui. Je commencerai par quelques mots, conscient de l'importance qu'il convient d'accorder à la période des questions et réponses. Je m'appelle Michael Woods. Je suis associé chez Hennan Blaikie, et je travaille au bureau d'Ottawa, à quelques pas d'ici.
Je suis accompagné, aujourd'hui, d'un représentant de la prochaine génération, M. Élie Ducharme. Ce dernier est un stagiaire très travaillant, qui s'intéresse aux questions internationales, à l'instar de la plupart de ses amis et collègues.
[Traduction]
Je travaille depuis cinq ans chez Heenan Blaikie, ayant passé la plus grande partie de ma carrière dans les domaines du droit commercial et de la politique internationale auprès du ministère des Affaires étrangères et Commerce International. Grâce à mes antécédents au MAECI, lesquels comprennent des affectations à l'étranger, je suis ravi de vous faire part de l'expérience très positive de Heenan Blaikie lors de la mission commerciale du ministre Fast.
Nous sommes conscients de l'énorme tâche que l'organisation d'une telle mission suppose, et nous tenons à remercier le ministre et son équipe. Nous aimerions, en particulier, remercier John Allen, sous-ministre adjoint pour les Amériques et son équipe du Brésil à l'administration centrale du ministère, notamment Sylvain Fabi, Hilary Esmonde- White et Jane deVille, de la Direction des relations bilatérales avec l'Amérique latine et les Caraïbes. Karen Sleiman, Jennifer Gowan et Carrie Marr, de la Direction des missions commerciales internationales — qui a des fonctions très importantes —, ont aussi joué un rôle déterminant.
Nous tenons en outre à saluer l'excellent travail de notre ambassadeur, Jamal Khokhar, et de son équipe, dont les consuls généraux Abbie Dann et Charles Larabie, le délégué commercial principal Ed Jager et toute l'équipe du MAECI au Brésil. Tous ces gens font un travail très important, et s'en tirent vraiment très bien.
La préparation et l'attention au détail étaient manifestes dès les premiers jours de la mission. La contribution du ministre a bien sûr été cruciale — je dirais même exceptionnelle — de même que la stratégie axée sur l'infrastructure et les sous-secteurs ciblés, le tout étant placé dans le contexte des prochains Jeux olympiques.
J'ai participé à des missions commerciales depuis 1983, et j'en ai vu de toutes les sortes. Je suis heureux de dire que, cette fois-ci, j'étais un participant plutôt qu'un délégué commercial surchargé devant tout organiser.
Compte tenu des contraintes de temps et des priorités du comité, je me contenterai de dire que les missions commerciales sont un outil de choix pour nouer de nouvelles relations d'affaires et ouvrir de nouveaux débouchés. J'en aurai davantage à dire en réponse aux questions que vous voudrez bien me poser.
Vous avez peut-être aussi des questions au sujet de Heenan Blaikie et de la Société de Conseils HB Global. Je dois préciser que nous étions invités à participer à la mission en tant que Société de Conseils HB Global, entreprise internationale de consultants affiliée à notre cabinet d'avocats. Cela nous donne beaucoup de souplesse, nous permettant d'avoir des ingénieurs, des géologues, d'anciens diplomates et tout un éventail de spécialistes qui appuient notre travail juridique.
Même avant d'amorcer les préparatifs de la mission de juin, nous étions au courant des nombreux débouchés qu'offre le marché brésilien de l'infrastructure, dont la valeur s'élève à 800 milliards de dollars. L'envergure de ce marché est due en grande partie aux exigences liées au respect du double mandat de la Coupe du monde de soccer en 2014 et des Jeux Olympiques de Rio en 2016. La mission nous a permis de rencontrer des personnes clés et d'étudier les possibilités et les défis du pays. Durant la mission, mon collègue Frederico Marques, notre avocat maison brésilien, et moi-même avons eu l'occasion de faire la promotion des partenariats publics-privés et des capacités canadiennes dans ce domaine.
Je regrette que Frederico ne soit pas présent aujourd'hui. Il est actuellement dans un avion en route pour le Brésil, où il passe une grande partie de son temps pour s'occuper de différentes affaires. Frederico m'a beaucoup appris sur son pays. Il nous a été très précieux à cet égard.
Pour revenir à la mission, elle nous a confirmé que le Brésil est devenu un géant économique et qu'il aspire à un nouveau rôle de chef de file dans la communauté internationale. J'ai vu dans les délibérations du comité que vous envisagez de vous rendre au Brésil. Je vous le recommande. La visite que j'y ai faite avec la mission commerciale était ma première depuis les années 1990. J'étais alors un fonctionnaire fédéral et j'essayais de négocier un accord sur les investissements étrangers. Vous devez vraiment voir de vos propres yeux ce miracle économique et le grand optimisme qui anime le pays.
Pour nous, il est temps de tirer parti des possibilités que la mission du ministre Fast a mises en lumière. L'heure est venue de miser sur la bonne volonté et les perspectives que la visite du premier ministre Harper a laissé entrevoir en août dernier. Il semblerait que le Canada et le Brésil se connaissent très mal et commencent tout juste à s'intéresser l'un à l'autre. C'est ce que nous faisons maintenant. Le problème pour nous — et nous devrions en être très conscients — est que nous ne sommes pas les seuls à vouloir nouer des relations étroites avec le Brésil.
J'ai entendu un commentaire avant d'entrer dans la salle. Quelqu'un disait que c'était peut-être trop tard, que nous aurions dû ou pu faire différentes choses. Je ne crois pas qu'il soit trop tard. Si nous pouvons miser sur une stratégie particulière fondée sur ce que le Canada a de meilleur, qui nous montrerait sous un jour particulièrement attrayant pour le Brésil, nous pourrions avoir la formule gagnante.
Chez Heenan Blaikie, nous croyons qu'il est très important d'avoir une stratégie qui permette d'exploiter les Jeux olympiques. Tout comme les sports l'on fait dans beaucoup d'autres domaines, le lien olympique ouvre des possibilités intéressantes. Comme vous le savez peut-être, l'un des associés principaux de notre cabinet, Marcel Aubut, est le président du Comité olympique canadien. Il a joué un rôle déterminant dans le succès des Jeux Olympiques et de nos athlètes à Vancouver en 2010. Nous sommes toujours déterminés à clamer « À nous le podium » à Sochi, à Rio et aux Jeux panaméricains. À titre de président du COC, Marcel Aubut travaille très fort pour nouer des liens particuliers avec le Comité olympique brésilien.
À l'occasion de sa visite officielle au Brésil en août, le premier ministre Harper a signé un protocole d'entente visant à renforcer la coopération entre les deux gouvernements dans le domaine olympique.
Je crois que nous devrions formuler les éléments d'une stratégie susceptible d'établir un lien entre le rêve que les jeunes canadiens et brésiliens partagent de monter sur le podium et les objectifs de deux géants industriels. Nous devons travailler ensemble à l'édification d'un héritage fort et durable sous forme de nouvelles infrastructures modernes aux avantages durables au Brésil. Essayons de trouver notre créneau.
Au chapitre des négociations commerciales, nous invitons le gouvernement à amorcer un dialogue sur le libre échange avec les pays du Mercosur. Cela ne sera pas facile, mais ce serait un bon point de départ. Considérons ce dialogue en gardant l'esprit ouvert et en restant centrés sur un but bien précis. Veillons à ce que le dialogue reste intimement lié aux réalités du secteur privé canadien et de ses principaux objectifs commerciaux.
Au sujet des visas, j'ai l'habitude de dire aux étudiants avec qui je travaille lorsque nous faisons nos petites missions commerciales qu'ils ont besoin de trois choses : une chambre d'hôtel, un billet d'avion et un visa. Une fois qu'ils ont les trois, le reste se met en place tout seul, surtout s'ils peuvent compter sur l'aide du délégué commercial canadien dans le pays en cause.
Les visas constituent un enjeu important pour les avocats spécialisés dans le droit commercial parce qu'ils ne relèvent pas vraiment de ce droit. Toutefois, si on ne peut pas voir le client, si on ne peut pas le faire venir au Canada, si on ne peut pas discuter face à face, on a un grand problème. La majorité des gens d'affaires vous diront que le visa est une exigence fondamentale, qui conditionne la facilité et la rapidité d'accès au marché. Nous devrions faire en sorte que le Canada fasse quelque chose de créatif. À mon avis, la meilleure solution consisterait à calquer notre approche sur celle de l'Union européenne en cessant d'exiger un visa.
Pour ce qui est du travail d'équipe, nous devrions miser sur nos avantages et travailler ensemble dans le cadre d'une stratégie collective canadienne. J'ai vu se dessiner quelque chose de ce genre en juin, et encore plus en août. Commençons par une stratégie de base pour déterminer comment tirer parti au mieux des capacités canadiennes dans le contexte brésilien. Si nous ne le faisons pas, nos concurrents ne manqueront pas de le faire.
Mon ami, Charles Cartmill, a cité M. Ray Castelli, qui travaille en partenariat avec nous au bureau de Vancouver de la HB Global Advisors Corp. Il m'a aidé en m'apportant un article de lui qui a paru dans le Vancouver Sun sous le titre « Nos enfants devraient-ils apprendre le portugais brésilien? » Dans cet article, Ray Castelli souligne l'importance du leadership du gouvernement. Sa société, Weatherhaven, est un exemple d'entreprise canadienne qui a su tirer parti de compétences particulières dans le domaine des ressources naturelles canadiennes. Il a parlé de la façon dont nous avons abordé ce sujet ainsi que des besoins d'infrastructure du Brésil.
J'espère que je n'ai pas trop dépassé mon temps de parole. Nous vous remercions de votre invitation et somme maintenant prêts à répondre à vos questions. Je vous encourage à vous rendre au Brésil. Nous lirons votre rapport avec un grand intérêt.
Le sénateur D. Smith : Ma question s'adresse principalement à M. Haynal, mais les autres témoins peuvent également y répondre. Vous avez probablement entendu la question que j'ai posée au témoin précédent.
M. Haynal : J'en ai eu un avant-goût.
Le sénateur D. Smith : Ma femme et moi avons un appartement en copropriété dans le centre-ville de Toronto. Je vole donc régulièrement sur Porter, comme le font d'autres sénateurs, pour atterrir dans le centre-ville. J'ai déjà volé souvent dans des appareils Embraer, sur Air Canada et d'autres compagnies. Je voulais savoir si les règles du jeu sont équitables lorsque vous soutenez la concurrence au Brésil. Vous devez peut-être faire la comparaison avec les compagnies aériennes parce que j'ai noté que les Brésiliens ont plus de 100 compagnies aériennes privées.
Je vais peut-être poser ma question autrement. Vous avez semblé suggérer que les règles du jeu n'étaient pas équitables dans le passé. Pouvez-vous nous expliquer les raisons fondamentales de cette situation? Vous nous avez donné l'impression que c'est mieux aujourd'hui. Dans la mesure où les règles du jeu ne sont pas encore équitables, que faudrait-il faire pour remédier à la situation?
M. Haynal : C'est une très grande question.
Le sénateur D. Smith : Je le sais. Je n'essaie pas de m'en prendre à vous. Je veux simplement connaître les faits.
M. Haynal : Les faits résident tant dans le passé que dans l'avenir. L'OMC a répondu à votre question concernant les règles du jeu dans le cadre des programmes des deux sociétés visant à construire un nouvel appareil. M. Woods est probablement mieux placé que moi, sur le plan professionnel, pour formuler des commentaires au sujet des jugements rendus. Le différend a abouti à une certaine transparence et à un désir d'éviter des malentendus inutiles au sujet de la façon d'aborder les marchés.
Le problème ne se situe pas nécessairement dans les marchés intérieurs. C'est plutôt que le marché mondial de l'aéronautique est rempli d'incohérences qui n'ont parfois rien à voir avec Bombardier ou Embraer. L'environnement est très embrouillé et très concurrentiel. Nous y figurons tous les deux comme des joueurs relativement petits par rapport aux géants. C'est aussi un marché très dynamique.
En fin de compte, la concurrence dépend du produit. Quand un produit sert un marché d'une manière particulièrement avantageuse, il y aura toujours des moyens de s'établir dans ce marché. C'est la raison pour laquelle je dis que tant le passé que l'avenir sont importants à cet égard.
Lorsqu'Embraer a vendu son avion à Air Canada, il était un peu plus grand que celui que nous construisions. C'est une réalité de la concurrence. Aujourd'hui, nous construisons une génération révolutionnaire d'appareils de la série C, qui seront plus grands que la classe actuelle d'avion régional. Il s'agit d'un avion continental qui est très bien accueilli un peu partout dans le monde. Nous sommes en contact avec de nombreuses compagnies aériennes, y compris des sociétés des Amériques. Il n'y a aucune raison pour que ces appareils ne se vendent pas bien dans chacun des marchés où il existe une demande. J'inclurai le Brésil dans cette catégorie parce que notre avion de la série C est vraiment unique et occupe une place à part dans une catégorie où nous n'avons actuellement aucun concurrent.
Parler du manque d'équité des règles du jeu revient à aborder une question qui va bien au-delà de ce qu'il y a entre nous et notre concurrent brésilien.
Le sénateur D. Smith : Y a-t-il encore des problèmes à régler?
M. Haynal : Entre nous?
Le sénateur D. Smith : Oui.
M. Haynal : Il y a des problèmes à gérer, pas à régler. Cette gestion relève des gouvernements, et pas de nous. Nous ne sommes pas impliqués dans des différends commerciaux, dont la gestion est assurée par les gouvernements. Les entreprises fonctionnent selon des règles énoncées par les gouvernements. Nous faisons ce que les gouvernements nous disent de faire, nous permettent de faire ou nous encouragent à faire. Notre rôle consiste à construire un avion pouvant soutenir la concurrence à un prix compétitif. Nous le faisons et mettons au défi nos concurrents d'en faire autant. Ensuite, il appartiendra au marché de trancher.
Le sénateur D. Smith : Je crois que les observations de M. Woods sur la décision de l'OMC...
La présidente : Nous laisserons cela à M. Woods, s'il souhaite formuler des commentaires à ce sujet.
M. Woods : J'ai emmené M. Ducharme avec moi pour le cas où on me poserait des questions difficiles.
M. Ducharme est stagiaire en droit. Ce dont nous parlons est beaucoup plus important pour lui et ceux de sa génération que pour nous. Au sujet des guerres entre constructeurs aéronautiques, qui sont maintenant passées à l'histoire, je dois dire que le sujet n'a pas du tout été soulevé au cours de la mission commerciale. Si vous volez à bord d'appareils construits au Brésil et au Canada, il y a de bonnes chances pour que les avions de l'un contiennent des pièces fabriquées par l'autre.
Y a-t-il des problèmes commerciaux? Nous en avons évidemment avec le Brésil. Je ne cherche pas à éluder la question, mais il y a une chose qui m'a frappé pendant ma visite là-bas. J'étais au Brésil il y a 16 ans essayant de négocier un accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers. L'accord était conçu sur le modèle du chapitre 11 de l'ALENA : c'était la Cadillac des traités d'investissement. Je me suis rendu au Chili, non par suite de mes efforts, mais à cause de ceux de nombreux avocats plus intelligents que moi du MAECI et du ministère de la Justice. Nous avons abouti à un accord de libre-échange avec le Chili. Les Chiliens étaient attirés par l'ALENA. Ensuite, nous avons apporté le même modèle lourd au Brésil en 1994-1995, mais nous n'avons réussi à rien obtenir. Si nous nous étions montrés plus flexibles, si nous avions adopté une approche différente des barrières établies au Brésil, nous serions peut-être en meilleure position aujourd'hui.
Le Brésil a des droits de douane élevés ainsi que des barrières non tarifaires sous forme de taxes fédérales et d'État appliquées aux importations. Il y a des problèmes d'enregistrement, de permis, de douane, d'évaluation et de recours. Comme je l'ai dit, il y a des problèmes d'enregistrement et beaucoup de bureaucratie. Il est difficile de se conformer aux règles douanières, qui manquent d'uniformité. Les subventions à l'exportation constituent une difficulté qui ne disparaîtra pas de sitôt. Cela est vrai dans le contexte de l'OMC parce que nous ne pouvons pas perdre de vue que le cycle de Doha s'est effondré et est parti en flammes. La situation aurait été différente si nous avions pu compter sur le cycle de Doha pour créer de nouveaux régimes permettant aux gouvernements du monde d'agir tout seuls.
Les marchés publics peuvent poser des problèmes. Je crois que cette question a été abordée dans vos discussions avec la CCC et d'autres. Il y a aussi les questions de la propriété intellectuelle et des services. À titre de spécialistes du droit commercial, nous pourrions passer la liste en revue et cerner les problèmes. Le gouvernement du Canada a décidé de frapper à la porte du Mercosur. C'est une solution possible. Toutefois, je crois que nous avons besoin d'une politique commerciale créative qui s'attaque au vrai problème. Pour moi, c'est l'accès au marché.
Aucun autre aspect des relations avec le Brésil n'est aussi important pour le Canada. Nous n'avons pas à nous lancer dans une chasse aux trophées en essayant de conclure une entente très vaste. Le véritable objectif, c'est l'accès au marché pour des entreprises comme celle de M. Cartmill, qui peut faire quelque chose dans le pays. Il faut ensuite régler les problèmes. Je crois que nous pouvons le faire, et nous le faisons déjà. À titre de spécialiste du droit commercial qui ne travaille plus pour le ministère, les problèmes que je dois affronter sont liés aux aspects pratiques de l'accès au marché.
Oui, il y a beaucoup de problèmes commerciaux, mais nous faisons quand même affaire avec la Chine. Les gens veulent aller en Chine. Dans le cas du Brésil, il n'y a pas de difficultés liées aux fuseaux horaires puisque le pays fait partie des Amériques. J'estime que, sur le plan de l'accès au marché et des problèmes de politique commerciale, nous avons moins de difficultés avec le Brésil qu'avec la Chine.
Nous parlons par ailleurs d'un pays en pleine évolution. J'y étais en 1990. Maintenant, en 2011, je vois un pays qui me rappelle la période du centenaire, quand j'étais jeune. Pendant que je grandissais, le Canada n'était en pratique qu'une colonie. Aujourd'hui, nous sommes témoins de cet essor, de ce fantastique optimisme. C'est ce qui se passe au Brésil en ce moment.
Vous le constaterez si vous allez là et parlez aux Brésiliens. Ils sont très confiants. Le monde connaît actuellement une crise de confiance, mais pas le Brésil. Je crois que c'est contagieux.
La présidente : J'ai moi-même des problèmes d'accès au marché. Plusieurs sénateurs souhaitent poser des questions, mais il ne nous reste que 20 minutes. Je vous prie de vous en tenir à des questions et des réponses courtes. Avec un effort, nous devrions y parvenir grâce à l'optimisme de votre présidente.
Le sénateur Finley : Je vais essayer de poser une question aussi brève que possible puisqu'il ne reste que 20 minutes pour une douzaine de questions.
Plusieurs de nos témoins précédents nous ont dit que le protectionnisme se manifeste de plus en plus au Brésil. Nous avons pu le constater dans différentes industries, le secteur de l'automobile étant l'exemple classique le plus récent.
Je voudrais d'ailleurs féliciter Bombardier pour avoir réussi à décrocher le contrat du système de trains légers de São Paulo. Bombardier est évidemment une société mondiale, mais ce contrat a en fait été remporté par Bombardier Transport dont le siège est en Allemagne, n'est-ce pas?
M. Haynal : Oui. Le siège de cette composante de la société se trouve bien en Allemagne.
Le sénateur Finley : Où seront fabriqués les éléments dont vous aurez besoin pour ce projet particulier?
M. Haynal : Partout. Les travaux d'ingénierie se feront à Kingston. Nous y avons un établissement qui emploie environ 300 personnes. Ce sera un de ses grands projets. Le prototype du train sera également construit à Kingston, mais le train lui-même sera produit par notre usine du Brésil. Nous aurons recours à une chaîne mondiale d'approvisionnement pour nous procurer les pièces nécessaires.
Le sénateur Finley : Je suppose que cela faisait partie de l'entente et des négociations qui ont permis à Bombardier de remporter le contrat. Je sais qu'il y a d'autres raisons, comme la technologie, les sciences, et cetera. Toutefois, vous êtes sans doute tenus d'avoir des partenaires brésiliens ou de faire profiter le pays acheteur d'une forme ou d'une autre de compensation.
Je voudrais revenir un instant à l'incident des avions dont mon collègue, le sénateur Smith, a parlé. Nous avons eu un témoin — je ne me souviens pas de son nom — qui nous a dit qu'Embraer était un important acheteur de pièces canadiennes, y compris des moteurs Pratt & Whitney fabriqués au Canada.
Je ne me souviens pas d'avoir jamais vu des moteurs Pratt & Whitney sur un Embraer. Les moteurs sont produits par General Electric à Cincinnati, en Ohio, je crois.
De son côté, Bombardier s'est servi de moteurs Pratt & Whitney fabriqués pour la plus grande part à Montréal. Air Canada a acheté des avions Embraer. En quoi consistait la compensation dans ce cas?
Air Canada avait acheté un nombre X d'appareils — je ne me souviens pas combien — des modèles I-75 et I-90. Quelle était la valeur des compensations? Le savez-vous?
M. Haynal : Sénateur, je n'en ai pas la moindre idée. Je regrette, je ne le sais vraiment pas. Vous allez devoir le demander à Air Canada. S'il y a quelqu'un qui le sait, ce serait bien la compagnie.
Le sénateur Finley : J'ai pensé qu'un concurrent aurait au moins une idée là-dessus. Non? D'accord. Je poserais peut- être la question à Air Canada. J'aimerais beaucoup approfondir cette question, mais nous manquons de temps.
Je voudrais si possible poser une question à M. Cartmill. Vous avez eu des difficultés pour dédouaner les échantillons que vous aviez expédiés en vue de présenter une soumission. Pouvez-vous me donner une idée des délais? Que pourrions-nous faire, ou que pourrions-nous recommander à notre gouvernement de faire pour essayer d'accélérer le dédouanement?
M. Cartmill : Je dirai tout d'abord que nous trouverons une solution pour contourner le règlement. Il serait cependant utile que notre gouvernement intervienne auprès du gouvernement brésilien pour l'amener à rationaliser le processus douanier.
À cause du protectionnisme, le Brésil interdit les expéditions directes à une entreprise qui ne détient pas un permis d'importation. Lorsque la ville de São Paulo nous a demandé d'envoyer nos échantillons à son service technique pour qu'il puisse les installer, les échantillons ont été retenus. Toutefois, nous avons trouvé un partenaire possible ayant des racines canadiennes et qui compte 2 000 employés. Ce partenaire se charge de l'importation pour nous. Nous avons procédé à des vérifications à son sujet. Les renseignements recueillis sont positifs.
L'important, c'est que les règlements sont là. C'est un fait. Ils constituent une barrière, mais les Brésiliens sont vraiment des gens charmants et chaleureux. Ils aiment bien les Canadiens et veulent traiter avec nous.
En fait, le directeur du service d'éclairage, qui constitue un énorme groupe à São Paulo, m'a invité à déjeuner lors de ma seconde visite avec le premier ministre. À la fin du repas, il m'a pris à part, loin de ses employés et du représentant du MAECI, pour me donner quelques tuyaux. Il m'a dit qu'il aimerait beaucoup nous voir remporter le contrat et m'a donné des conseils sur ce que nous devrions faire. Lorsque nous nous sommes quittés, il m'a serré dans ses bras. Quand je raconte l'histoire aux gens, on me demande : Qu'as-tu fait? Je réponds que je lui ai donné l'accolade à mon tour.
Le sénateur Finley : Malheureusement, le comité ne peut ni ordonner ni recommander de donner l'accolade, mais merci beaucoup.
M. Cartmill : Si je compare aux États-Unis, j'ai l'impression que nous n'avons plus de libre-échange. Vous savez, je m'occupe aussi d'équipement militaire. Les États-Unis nous ont évincés de partout. Avec la politique Buy America, les municipalités américaines ne peuvent presque plus rien nous acheter. Nous avons dû créer une installation de fabrication aux États-Unis, ce qui nous revient 20 p. 100 plus cher. Les Américains ne veulent plus acheter qu'à des Américains. Ils veulent des produits fabriqués aux États-Unis par des sociétés américaines.
Au Brésil, le Canada a une réputation extraordinaire dans le domaine de la technologie. Brookfield et Vale sont installés là. Nos antécédents remontent d'ailleurs très loin. En fait, le Canada a participé à l'électrification du Brésil il y a une centaine d'années. On m'a montré quelques dispositifs que nous avions installés il y a 100 ans. Ils fonctionnent encore. Les Brésiliens me croient quand je leur dis que nous avons les meilleurs dispositifs d'éclairage du monde.
Le sénateur Finley : Je sais exactement à quoi ressemblent ces dispositifs. J'ai touché.
M. Haynal : Je voudrais formuler un bref commentaire au sujet du protectionnisme que le sénateur a mentionné. Nous devons considérer le chemin parcouru. Dans les années 1980, le marché brésilien était complètement fermé. Le processus de libéralisation est maintenant en cours depuis une vingtaine d'années. Le Brésil avance sur la voie menant à la libéralisation de son économie, à un moment où, malheureusement, beaucoup d'autres pays ont pris la direction contraire. Je crois qu'il est important de ne pas perdre de vue cet aspect.
Le sénateur Finley : Certaines décisions concernant les chemins de fer ou les flottes d'aéronefs ont un cycle de vie extrêmement long. Si on est engagé dans une opération de vente, de négociation ou de commercialisation à un moment où le protectionnisme est très fort — simplement à cause de la situation économique mondiale en ce moment —, les effets peuvent durer très longtemps. C'est la raison pour laquelle j'ai posé une question au sujet du cycle. Je vous remercie.
Le sénateur De Bané : Monsieur Cartmill, pouvez-vous nous dire très rapidement à quels pays où vous avez réussi à vendre vos produits?
M. Cartmill : Nous sommes présents au Royaume-Uni où nous produisons des sous-ensembles de concert avec Sony. Nos activités au Royaume-Uni sont très étendues. Nous sommes également présents en Norvège, où nous devons être chargés d'une part d'un projet de 8 millions de dollars. Nous avons aussi des activités en Colombie et au Mexique. Nous nous attendons à décrocher un très gros contrat au Costa Rica ou au Salvador. Nous sommes en outre présents en Suisse, partout dans les Caraïbes et en Islande. La liste est longue. La technologie que nous offrons a énormément de succès partout où nous allons.
Le sénateur De Bané : Et au Canada?
M. Cartmill : Les choses vont très bien au Canada, mais nous avons constaté qu'il est beaucoup plus facile de vendre à l'extérieur de notre coin de la Nouvelle-Écosse. Tout le monde semble craindre de donner l'impression de nous privilégier. La ville d'Edmonton nous a choisis en exclusivité. Nous lui avons expédié 4 000 ou 5 000 lampadaires. Merci, Edmonton. Et merci, Ottawa, d'avoir adjugé le gros contrat aux chantiers navals de Halifax.
Le sénateur De Bané : J'ai cru comprendre que le contrat de São Paulo est imminent. Est-ce le cas?
M. Cartmill : Oui. Très rapidement, c'est la raison pour laquelle l'intervention de la CCC est importante. Je sais que les accolades ne veulent pas dire grand-chose, mais, partout où nous allons, elles nous aident à éliminer les barrières.
Le sénateur De Bané : Nous sommes politiciens. Nous comprenons.
M. Cartmill : Tous nos interlocuteurs nous ont réservé un accueil vraiment spécial, y compris le groupe des normes, les groupes techniques et les entrepreneurs. Nous travaillons simultanément sur cinq initiatives différentes pour en arriver à quelque chose avant la fin de l'année. Je me suis entretenu avec le chef de la direction de Brookfield ainsi qu'avec le maire de São Paulo. Rencontrer le maire, c'est un peu comme être reçu par le premier ministre. Même lui a voulu toucher le lampadaire après mon exposé.
Le sénateur De Bané : Serait-il rentable d'établir une installation de fabrication là-bas?
M. Cartmill : Nous pouvons certainement fabriquer les composants électroniques ici. Il s'agit d'un produit électronique. Il comprend un dispositif d'éclairage et un pilote électronique. Nous pouvons le faire. Nous fabriquons le « cerveau » de l'appareil à notre installation d'Amherst. Nous pouvons faire le montage. Ces lampadaires sont lourds. Nous aurons donc besoin de faire faire les pièces coulées au Brésil. Nous devons établir une chaîne mondiale d'approvisionnement. Nous pouvons nous débrouiller. Nous avons trouvé à Porto Alegre une société canadienne qui a 2 000 employés et qui fabrique des guichets bancaires. Ce sera un partenaire parfait pour nous. Nous avons un arrangement qui nous permettra d'utiliser cette société comme prête-nom. Nous avons procédé à des vérifications mutuelles. Il faut pouvoir se faire confiance.
[Français]
Le sénateur Fortin-Duplessis : Tout d'abord, je suis heureuse d'avoir entendu vos témoignages. Je serai brève. J'ai deux questions.
Vous avez sans doute une vision à long terme. J'ai lu en quelque part que Mme Dilma Rousseff se réunit le matin, très souvent, avec ses conseillers les plus proches pour tenter de faire face à un problème qui, pour elle, est apparemment insoluble, soit celui de la Chine. On travaille à savoir comment le Brésil pourrait être plus compétitif et on essaie de trouver une solution à ce problème. Depuis 2005, les produits de la Chine entrent à flot au Brésil, ce qui a eu pour effet à court terme que le Brésil a adopté des tarifs beaucoup plus ciblés pour les produits manufacturés en provenance de la Chine. Le Brésil a également un contrôle douanier plus rigide et mis sur pied des procédures anti- dumping.
Si le Brésil se penche sur le fait que la Chine puisse être un problème, il tentera sans doute de trouver des solutions. À votre avis, les changements qui s'annoncent dans la politique brésilienne sur les relations avec la Chine auront-ils des conséquences? Est-ce que ceci pourrait avoir une influence, soit positive ou négative, sur un possible accord de libre-échange entre le Canada et le Brésil?
[Traduction]
M. Cartmill : Je crois que cela nous aiderait. Nous avons constaté deux choses en Europe et en Amérique latine. Dans le secteur des diodes électroluminescentes, les Chinois ont été parmi les premiers à se manifester au Brésil, mais ils cherchent toujours des moyens de faire baisser les coûts : ils réduisent la qualité et commencent alors à avoir des ennuis. Comme c'est un produit de haute technologie, les Chinois sont automatiquement écartés en Europe. Partout en Amérique latine, on nous demande d'aider le client à rédiger un cahier des charges restrictif pour qu'il puisse écarter les Chinois. Je dirais donc que cela nous aiderait.
[Français]
Le sénateur Fortin-Duplessis : Est-ce que d'autres aimeraient faire un commentaire?
[Traduction]
M. Woods : « Compétitivité » est l'un des mots clés que vous avez utilisés. Comme M. Haynal l'a signalé, le Brésil est un grand pays qui, traditionnellement, n'a pas compté autant sur le commerce international que beaucoup d'autres. Il a toujours essayé de protéger sa main-d'œuvre, se retranchant le plus souvent dans une position protectionniste.
Quand les pays où je me rends, comme l'Arabie Saoudite, veulent être compétitifs, ils ouvrent la porte aux investissements et au commerce avec des pays qui se situent au niveau du Canada. Les relations Canada-Brésil, au niveau tant des gouvernements que des gens d'affaires, reflètent le désir de la présidente de rendre son pays plus compétitif. Je crois que c'est un avantage pour nous.
Je pense que la Chine constitue un problème pour tous les pays sur le plan de l'accès à nos marchés. Le protocole d'accession à l'OMC donne aux membres de l'organisation des moyens spéciaux au chapitre des mesures de sauvegarde antidumping et des droits compensateurs. Le Canada se sert des mêmes moyens pour contester les produits introduits dans le pays sur la base d'une analyse hors marché.
Je ne me sens pas en mesure de porter un jugement sur la politique du Brésil ou de la Chine. Je peux juste dire que c'est un sujet de discussion intéressant. Compte tenu de sa vaste expérience dans ce domaine, M. Haynal est peut-être mieux placé pour formuler des commentaires. Il y a un facteur politique qui joue parce que les Brésiliens cherchent à devenir des chefs de file dans certains domaines et veulent faire la transition entre le statut de pays en développement et un statut différent.
Je suis bien d'accord avec M. Cartmill. Si vous allez au Brésil et parlez aux gens, ils vous donneront l'accolade parce que vous venez du Canada. Vous constaterez que la plupart des gens sont portés à nouer des relations avec quelqu'un comme mon ami, M. Cartmill. Les Chinois, eux, arrivent comme une armée. Ils sont plutôt radins. Ils font ce qu'ils ont à faire, puis s'en vont. À qui faut-il s'adresser en cas de difficultés? C'est évidemment une considération pratique.
La situation est compliquée si on envisage un accord de libre-échange. Je pense qu'une telle entente ouvrirait des perspectives pour le Canada à l'autre bout de l'échelle.
Le sénateur Johnson : Pourriez-vous nous donner quelques explications au sujet des problèmes douaniers? Nous avons entendu hier des témoins qui nous ont parlé des difficultés que les gens connaissent. C'est l'un des sujets de plainte qui reviennent le plus souvent chez les gens qui essaient d'avoir des activités au Brésil.
M. Cartmill : D'ordinaire, les villes vont soumettre un produit à des essais pilotes. Elles l'installent et l'observent pendant six mois ou un an. À São Paulo, il y a des essais pilotes des produits de trois entreprises différentes depuis près d'un an. Toutefois, les responsables municipaux ont tellement aimé notre technologie qu'ils nous ont permis de participer au processus, même s'il a déjà atteint un stade assez avancé, pourvu, nous ont-ils dit, que nous soyons en mesure de présenter notre produit. C'était en août. Nous avons expédié environ deux douzaines de lampadaires par avion dans les jours qui ont suivi. Nous devions les présenter à deux endroits différents. Les responsables ont passé beaucoup de temps à travailler avec nous pour choisir le bon produit, le bon niveau d'éclairage, la bonne zone et tout le reste. Ils nous ont dit où placer les lampadaires. Nous les avons donc expédiés par messageries aériennes, ce qui est assez coûteux, puis nous avons commencé à les chercher. Il nous a fallu des semaines rien que pour les trouver dans les entrepôts de la douane. Cela fait des mois que nous essayons. Hier, nous avons parlé aux responsables de São Paulo qui nous ont dit qu'il leur fallait recevoir les lampadaires très bientôt ajoutant : « Nous gardons le processus ouvert pour vous, mais nous devrons y mettre fin bientôt. Nous aimerions que vous soyez présents. » Nous avons finalement trouvé cette société de Porto Alegre qui veut bien devenir notre partenaire. Elle s'occupera pour nous de la fabrication dans la région. Comme la société avait un permis d'importation, nous lui avons expédié un autre lot de lampadaires.
Le sénateur Johnson : Est-ce que vos collègues canadiens qui travaillent dans le même domaine ont des difficultés du même ordre?
M. Cartmill : Je ne le sais pas. Nous sommes allés au Brésil pour la première fois en juin. L'accueil est extrêmement chaleureux. C'est la même chose partout : tout le monde trouve la technologie extraordinaire. Elle leur permettrait de récupérer leur investissement en moins de deux ans. Le contrat de 130 ou 140 millions de dollars que nous essayons de décrocher — c'est une partie du projet de São Paulo — assurerait des économies d'énergie de 80 p. 100. Sur le plan technologique, les Brésiliens sont en retard de toute une génération. Ils en sont encore à l'éclairage au mercure, qui est désuet. Notre technologie pourrait même leur permettre de recouvrer leur investissement en un an. Ce que je trouve difficile à comprendre, c'est pourquoi ils n'agissent pas tout de suite. Le taux de recouvrement est énorme. Bref, les choses avancent, mais c'est plutôt lent.
Le sénateur Johnson : De quelle façon le gouvernement peut-il vous faciliter les choses? Les visites ont-elles aidé?
M. Cartmill : Nos responsables ont été extraordinaires. Le ministre Fast et le MAECI ont réussi à m'obtenir un rendez-vous avec le maire. J'ai toujours aimé commencer au sommet. Je cherchais à rencontrer le maire, et j'ai réussi à le faire. J'étais accompagné de représentants du MAECI, de la CCC et d'EDC. Je suis également allé dans une autre grande ville où j'ai pu m'entretenir avec le maire. Pour les missions commerciales, nous avons recours à des intermédiaires. Cela ne marche pas. Nous ciblons toujours ceux que nous voulons voir. Je dis ensuite aux intermédiaires que je serai pour eux un vrai cauchemar parce que je tiens à rencontrer tous ceux qui figurent sur ma liste.
Le sénateur Johnson : C'est vraiment pratique de pouvoir compter sur des intermédiaires.
M. Woods : Chaque fois qu'on affronte un problème, c'est aussi une occasion. Les difficultés douanières constituent un problème universel pour tous les partenaires commerciaux du Brésil. De notre côté, nous avons un excellent système grâce à l'Agence des services frontaliers du Canada. Nous devrions essayer d'envoyer au Brésil des agents de l'ASFC pour montrer aux douaniers brésiliens comment nous administrons notre système.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Monsieur Woods, dans votre présentation, vous avez cité un article : « Nos enfants devraient-ils apprendre le portugais brésilien? »
Est-ce que vous recommanderiez à la nouvelle génération d'apprendre le portugais afin de maximiser nos opportunités à faire du commerce là-bas?
M. Woods : Oui, bien sûr, certainement.
[Traduction]
C'est un fait qu'on peut dresser la liste des barrières commerciales pour essayer d'en négocier l'élimination. Toutefois, dans le domaine du commerce international, la barrière linguistique n'est pas négociable. Elle se manifeste chaque fois qu'on a besoin de recourir à quelqu'un pour traduire. On a alors besoin d'un intermédiaire. Le Brésil est bien plus étendu que le Canada. Dans le passé, il a souvent été isolé parce que c'est un pays de langue portugaise entouré de pays hispanophones. Les Brésiliens sont farouchement attachés à leur langue, comme il se doit. Je dirais, en passant, qu'une autre possibilité se dessine de plus en plus. J'ai vu dans les comptes rendus du comité que des Brésiliens en nombre croissant viennent au Canada pour apprendre l'anglais comme langue seconde. Je dois dire qu'au niveau supérieur, j'ai pu constater en parlant à des responsables du gouvernement brésilien que la plupart de mes interlocuteurs en sont au même point que nos représentants du MAECI : ils parlent trois, quatre ou cinq langues. En fait, il faut parler trois ou quatre langues pour accéder au service extérieur. Par conséquent, à un certain niveau, la barrière linguistique n'existe pas vraiment. Par contre, si c'est l'accolade qu'on recherche — comme dans le cas de M. Cartmill —, si on va là pour conclure une entente, on a besoin d'être accompagné d'une personne qui connaît le portugais.
Aujourd'hui, les petits apprennent le mandarin au jardin d'enfants. C'est très bien, mais, au-delà de la Chine, il faut considérer des endroits plus proches qui ont une dynamique différente. De plus, le portugais est une belle langue.
Le sénateur Robichaud : Monsieur Cartmill, devons-nous aussi nous entraîner à bien donner l'accolade?
M. Cartmill : Oui. Vous pouvez même y ajouter les embrassades, si vous voulez.
La présidente : Je crois que nous arrivons à la fin de la réunion. Je remercie les sénateurs de leur patience pendant que j'essayais de donner la parole à chacun. Je remercie en particulier nos témoins. Avant de commencer, quelqu'un m'a demandé : « Qu'est-ce qui se passe après les exposés? » J'ai dit que c'est alors que les sénateurs posent des questions découlant des observations formulées par les témoins. Vous avez pu constater que vous avez suscité beaucoup d'intérêt. J'aurais bien voulu que nous ayons davantage de temps. Nous allons suivre les différents efforts que vous déployez au Brésil. J'espère que le comité sera d'une certaine utilité pour les entreprises grâce aux recommandations qu'il présentera. Nous ne prétendons pas connaître toutes les réponses, mais nous réussirons peut-être à nous faire l'écho de certaines de vos préoccupations et recommandations dans notre rapport.
Je vous remercie de nous avoir fait part aujourd'hui de votre expérience et de vos recommandations.
(La séance est levée.) |