LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le jeudi 22 novembre 2012
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd’hui à 10 h 30 pour étudier l’évolution de la situation économique et politique en Turquie, ainsi que l’influence qu’exerce le pays sur l’échiquier régional et mondial, les implications sur les intérêts et les perspectives du Canada et d’autres questions connexes.
Le sénateur A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Honorables sénateurs, je constate que nous avons le quorum. Nous sommes ici pour étudier l’évolution de la situation économique et politique en Turquie, son influence sur l’échiquier régional et mondial, les implications sur les intérêts et les perspectives du Canada et d’autres questions connexes.
Nous accueillons aujourd’hui par vidéoconférence de Londres M. Robert O’Daly, économiste/éditeur principal pour l’Europe de l’Ouest de l’Economist Intelligence Unit.
Monsieur O’Daly, je crois qu’on vous a informé qu’il serait approprié de faire un exposé préliminaire, après quoi les sénateurs vous poseront des questions. J’ai déjà commencé à prendre des noms. Bienvenue au comité. Merci d’être avec nous et d’avoir modifié votre horaire pour le faire correspondre au nôtre. Vous avez la parole.
Robert O’Daly, économiste/éditeur principal, Europe de l’Ouest, Economist Intelligence Unit: Merci. Je présenterai brièvement ce qui s’est passé en Turquie au cours des dix dernières années, en me concentrant particulièrement sur les cinq dernières étant donné qu’elles sont plus pertinentes pour comprendre ce qui se passe aujourd’hui.
Dans la transcription de vos dernières séances que j’ai reçue, vous avez assez bien souligné les progrès énormes que la Turquie a faits au cours des 10 dernières années sous un gouvernement à parti unique qui a fourni une stabilité gouvernementale et a mené des réformes politiques et économiques substantielles. Certaines mesures ont été présentées concernant la question kurde dans le Sud-Est de la Turquie. Le rôle des militaires en Turquie a été réduit dans une certaine mesure sous supervision civile, et les militaires semblent maintenant l’accepter. Un système plus ouvert de nominations à la magistrature a été mis en place, ce qui constitue toute une réforme pour la Turquie étant donné le rôle du pouvoir judiciaire par le passé, avec le tribunal constitutionnel et des épisodes comme ceux de l’interdiction de parti et, en particulier, la tentative d’interdire l’AKP en 2008.
Au cours des dernières décennies, la croissance économique de la Turquie a été très impressionnante, avec une croissance de 7 p. 100 par année du PIB réel dans la décennie menant à 2011. La performance financière du pays a été extrêmement solide. Il se rétablit de la crise de 2001 qui a laissé le pays avec une dette gouvernementale d’environ 100 p. 100 du PIB, alors qu’aujourd’hui, la Turquie a une dette gouvernementale d’un peu moins de 14 p. 100 du PIB et des déficits gouvernementaux de probablement 2,5 p. 100 du PIB cette année.
De plus, en 2008-2010, après la crise de Lehman Brothers, la tempête mondiale de même que la récession financière, les banques sont demeurées stables et la crainte d’une crise de la balance des paiements ne s’est pas concrétisée.
Le gouvernement s’est sevré des accords de confirmation du FMI qui se sont terminés en 2008. Jusqu’à environ 2010, on parlait constamment d’un autre accord et on s’inquiétait que si un autre accord n’était pas signé, cela nuirait à la formulation des politiques économiques de la Turquie.
En fait, le gouvernement turc a très bien géré l’économie jusqu’à maintenant, et suite à la crise mondiale de 2008-2009, l’économie turque a fermement rebondi en 2010-2011. En 2011-2012, il est important de reconnaître que grâce à ses politiques, la Turquie a connu un atterrissage en douceur, du moins jusqu’à maintenant, suite à la poussée de croissance, et que cet atterrissage se concentre sur une demande intérieure très forte qui a eu comme conséquence une augmentation du déficit du compte courant qui aurait pu être financièrement déstabilisant, du point de vue macroénomique. La croissance a ralenti; la Turquie connaît toujours une croissance modérée dans un contexte difficile, le déficit courant diminue, tout comme l’inflation.
Je crois certainement que son bilan est bon. Il reste des défis à relever. J’en parlerai brièvement, car je présume qu’ils feront l’objet de vos questions.
Du point de vue économique, il est essentiel de maintenir la croissance économique et la stabilité macroéconomique. Il est positif que les ministres essentiels du gouvernement et les autorités financières et monétaires aient un clair souvenir de la crise de 2001; ils ont donc tendance à se concentrer sur des politiques qui génèrent de la stabilité et essaient d’éviter des décisions en matière de politiques qui pourraient être populaires mais s’avérer déstabilisantes.
Il reste encore du travail à faire pour rééquilibrer l’économie, pour que la demande soit plus extérieure qu’intérieure. Pour y parvenir, la Turquie devra en arriver à un taux d’épargne élevé. Les Turcs ont tendance à consommer et non pas à épargner. En conséquence, il y a des caractéristiques structurelles qui expliquent le déficit du compte courant très important de la Turquie. Donc, les réformes ont commencé, mais il faudra en faire plus pour y arriver.
L’autre problème majeur s’explique par les liens économiques et financiers très étroits entre la Turquie et la zone euro. La crise de la zone euro et l’incertitude qu’elle crée exigent des autorités turques qu’elles gèrent l’économie de diverses façons afin d’en atténuer les conséquences négatives. Ces conséquences se font sentir du côté commercial, mais également du côté financier puisque la Turquie dépend de l’entrée de capitaux pour sa croissance, et une grande partie de ces capitaux provenant de portefeuilles à court terme du reste de l’Europe. Conséquemment, il a été très difficile au cours des dernières années de gérer la politique monétaire depuis que l’intensification de la crise de la zone euro s’est propagée au-delà de la Grèce, de l’Irlande et du Portugal. Jusqu’à maintenant, la situation a été assez bien gérée. Par contre, il reste peut-être d’autres défis à l’horizon.
Les préoccupations principales de l’Economist Intelligence Unit se trouvent plutôt du côté politique. L’opposition au Parti de la justice et du développement, le parti au pouvoir depuis 10 ans, est fragmentée. Elle est faible; elle échoue généralement à présenter une opposition constructive dans les débats politiques, et il est très difficile de penser qu’un des partis de l’opposition puisse constituer une solution de rechange au gouvernement lors de la prochaine élection, qui doit avoir lieu en 2015.
La question kurde demeure. Dans les faits saillants de votre transcription, ceux qui se sont adressés à vous ont souligné qu’il y avait une escalade inquiétante de la violence de la part du PKK dans le sud-est et qu’en plus, des groupes apparentés au PKK en Syrie avaient pris le contrôle de certaines villes dans ce pays, ce qui a alourdi le fardeau des forces de sécurité dans le Sud-Est. Elles doivent maintenant patrouiller la frontière et se battre contre le PKK le long d’une frontière de 900 kilomètres de longueur, qui va de l’Irak et l’Iran jusqu’à la Syrie, ce qui constitue un défi majeur.
Le dernier enjeu dont je veux parler est l’engagement du gouvernement, et de l’opposition également, à présenter des réformes constitutionnelles, à présenter une constitution qui remplacera la constitution d’inspiration militaire de 1982 afin de mieux protéger les droits individuels, ce qui n’a pas été le cas par le passé.
Malheureusement, le débat entourant la réforme constitutionnelle actuellement se concentre entièrement sur la volonté du premier ministre Erdogan d’augmenter les pouvoirs de la présidence — le président sera élu au suffrage universel pour la première fois en 2014 — avant qu’il se présente probablement pour ce poste en 2014, alors qu’il démissionnera comme premier ministre.
L’année 2014 semble présenter de nombreux défis à cause de l’élection présidentielle, de l’ambition de M. Erdogan de devenir président, et parce que M. Erdogan et ses partisans veulent qu’il y ait une présidence avec des pouvoirs exécutifs. En 2014, d’après les règles des partis au pouvoir, M. Erdogan et plusieurs autres dirigeants du parti devront démissionner parce qu’un membre du parti ne peut pas être élu pour plus de trois mandats. Il semble y avoir un engagement véritable envers cela, mais cela soulève également la question du renouvellement de la direction du parti et de la continuité de la stabilité gouvernementale au-delà de 2014. Je terminerai mon exposé ainsi.
La présidente: Monsieur O’Daly, merci de ce survol de nombreux sujets. Vous ne serez pas surpris d’apprendre que j’ai une longue liste de sénateurs qui veulent vous poser des questions.
Le sénateur Downe: Merci de votre exposé. Je remarque que vous avez parlé de la demande de la Turquie pour devenir membre de l’Union européenne. Je sais que les dirigeants travaillent sur divers chapitres, mais est-il possible que cela se concrétise au cours de la prochaine décennie?
M. O’Daly: Non, je ne crois pas, pour diverses raisons, la première étant les préoccupations graves concernant la position de l’opinion publique dans l’Union européenne contre l’entrée de la Turquie.
Un autre facteur est qu’il reste beaucoup à faire en Turquie sur des questions comme les droits de la personne, les droits individuels et la liberté d’expression, qui est un sujet dont vous avez discuté lors de vos séances précédentes.
Enfin, à cause de la crise de la zone euro et parce que la Turquie joue un rôle plus actif sur la scène internationale et que le pays veut devenir un pouvoir régional, il a progressé sur divers aspects. La crise en Europe et la confiance retrouvée de la Turquie au cours des récentes années a rendu son adhésion à l’Union européenne moins attrayante que par le passé. D’après nous, une combinaison de ces facteurs rend peu probable que la Turquie se joigne à l’Union européenne au cours de la prochaine décennie.
Le sénateur Downe: Merci. Le gouvernement précédent, surtout les anciens chefs militaires de la Turquie, était très près d’Israël, mais j’ai lu dans un journal canadien cette semaine que le premier ministre de la Turquie a dit d’Israël que c’était un État terroriste.
Pourriez-vous nous parler des plans à long terme de la Turquie dans la région? Avec quel pays essaie-t-elle de s’aligner? Est-ce que sa relation avec Israël peut être rétablie?
M. O’Daly: Voilà une question très difficile. Présentement, la Turquie semble beaucoup se concentrer sur ses relations avec l’Occident à cause des problèmes le long de la frontière syrienne. Je suis certain que vous avez vu hier que la Turquie a demandé à ce que des missiles de défense aérienne de l’OTAN soient déployés le long de la frontière entre la Turquie et la Syrie, ce qui exige que l’OTAN prenne une décision à savoir si l’organisation s’engagera plus activement dans les tensions continues entre la Turquie et la Syrie et se rapprochera du conflit syrien.
Mise à part cette relation avec l’Occident, la Turquie favorise des liens très étroits avec les gouvernements régionaux kurdes dans le Nord de l’Irak aux dépens du gouvernement fédéral irakien surtout, il semble, parce que la Turquie croit que pour contenir le PKK et les attaques qui ont augmenté dans le Sud-Est au cours de la dernière année, le pays doit privilégier les liens avec le gouvernement régional du Kurdistan.
La Turquie a aussi des liens avec l’Iran, mais qui sont passés du positif au négatif dans le cadre de la médiation au sujet du programme nucléaire; la Turquie rivalise donc avec l’Iran pour être le chef de file de la région.
Les relations de la Turquie avec Israël sont influencées, je crois, par la volonté de la Turquie de jouer un rôle de chef de file dans la région. Dans de nombreux autres pays, le rôle d’Israël et son traitement des Palestiniens n’est pas acceptable; alors l’opinion populaire en Turquie est anti-Israël et on condamne les attaques sur Gaza. Je ne vois pas comment la Turquie pourrait en venir à une certaine coopération avec Israël, même si elle serait hautement souhaitable étant donné la situation en Syrie.
Le sénateur Downe: Ma dernière question concerne les médias. Je vois constamment des articles sur la répression de la liberté de presse en Turquie. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet?
M. O’Daly: Il s’agit certainement d’un problème. Il a été souligné par les rapports sur les progrès annuels de la Commission européenne au cours des deux dernières années. Il semble qu’il y a des lois, notamment la loi pour combattre le terrorisme, qui ont été utilisées pour museler et arrêter les journalistes. Le gouvernement dit que beaucoup de ces journalistes étaient associés à des groupes qui planifiaient un coup d’État, et il y a eu des enquêtes et des procès marteau.
Cependant, je pense que l’aspect le plus inquiétant de la relation du gouvernement avec les médias en Turquie est que de nombreux journaux font maintenant ce qu’on appellerait de l’autocensure. Il y a très peu de journalistes qui sont prêts à critiquer les actions du gouvernement de peur d’être poursuivis ou emprisonnés. C’est un problème dont le président de la Turquie, Abdullah Gul, s’inquiète beaucoup. Par contre, il ne semble pas y avoir de mouvement de la part du gouvernement pour corriger la situation depuis qu’elle est devenue évidente au moment où les enquêtes ont commencé et que des journalistes ont été arrêtés. Alors il y a certainement des aspects très inquiétants de la scène politique turque.
[Français]
Le sénateur Fortin-Duplessis: Merci, madame la présidente, alors, Monsieur O'Daly, merci de comparaître en vidéoconférence devant notre comité malgré votre horaire très chargé. Mes questions concernent aussi l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Mon collègue vous a précédemment questionné là-dessus. J'aimerais que vous élaboriez un petit peu plus sur les aspects litigieux des négociations.
[Traduction]
M. O’Daly: Essentiellement, la Turquie a fait des progrès considérables pendant les deux premières années des négociations, à partir d’octobre 2005. Cependant, depuis le début du deuxième mandat du gouvernement — il en est maintenant à son troisième mandat —, des progrès moins constants ont été accomplis. Il y a 35 chapitres qui couvrent des enjeux tels que la réglementation des douanes, la réglementation financière, l’environnement, et cetera, que vous connaissez sûrement. De ces 35 chapitres, il n’y en a que 13 qui sont vieux, et les nouveaux ont été temporairement clos. Les autres ont soit été suspendus, soit font l’objet d’une opposition interne à leur ouverture de la part de Chypre ou de la France, ou d’un autre État membre de l’Union européenne. Aucun chapitre n’a été ouvert depuis le début de 2009. Nous sommes maintenant en 2012. Je ne pense pas qu’il y ait de problèmes techniques, et je ne pense pas qu’il y ait de problèmes particuliers en matière de politique qui causent cette absence de progrès.
C’est une question politique. Chypre, en particulier, s’oppose à de nouveaux progrès dans le cadre des négociations pour que la Turquie devienne membre tant que les Chypriotes grecs négocient avec les Chypriotes turcs pour régler la question de la division de l’île. La Turquie refuse de reconnaître le gouvernement chypriote grec de facto de la République de Chypre, qui contrôle sa partie mais aussi le gouvernement reconnu de l’île entière, y compris le Nord qui est occupé par quelque 35 000 à 40 000 militaires turcs.
Il y a des obstacles politiques majeurs en Turquie et concernant les limites à la liberté de presse, le problème kurde, et cetera, alors il y a de la résistance à des réformes dans plusieurs de ces secteurs.
Il y a aussi la résistance politique au sein de l’Union européenne. Le changement de président en France, par exemple, de Sarkozy à Hollande, n’a fait absolument aucune différence jusqu’à maintenant. Sarkozy était ouvertement critique. Il n’y a eu aucune initiative afin d’effectuer un rapprochement sur la question de l’Union européenne. La majorité des Français, comme les populations de nombreux autres pays de l’Union, s’opposent à ce que la Turquie devienne un membre à part entière de l’Union européenne. Étant donné l’état de l’Union européenne actuellement, évidemment, si suite à la crise de la zone euro, l’Union devenait une organisation plus souple avec différents niveaux d’intégration pour différents pays de différentes régions, cela serait peut-être plus acceptable aux pays de l’Union européenne et à la Turquie pour que cette dernière devienne membre. Il s’agirait peut-être plutôt d’un partenariat privilégié comme en parlaient Merkel et Sarkozy par le passé.
Dans l’état actuel des choses, la possibilité que la Turquie devienne autre chose qu’un membre à part entière n’est pas acceptable. La perception de l’opinion publique turque vis-à-vis de l’Union européenne s’est effondrée et la proportion de Turcs qui croient qu’un jour ils pourront se joindre à l’Union européenne est tombée à quelque chose comme 25 à 30 p. 100 de la population. Ce niveau se situait à 75 p. 100 lorsque les négociations ont commencé. Il s’agit d’une question hautement politique et non pas technique de réforme et d’harmonisation des lois.
La présidente: Je dois tenir compte des questions et des réponses. Si nous pouvions être un peu plus efficaces, je pourrais faire passer tout le monde pendant le premier tour.
Le sénateur Nolin: Bonjour, monsieur O’Daly. Hier, nous avons commencé à explorer la question de l’accès au financement avec un autre témoin. Nos documents d’information nous expliquent que pour la population turque, il est assez difficile d’avoir accès au financement. Nous prenons comme preuve le rapport du Forum économique mondial de 2011-2012, qui indique en gros que l’accès au financement est probablement le plus grave problème pour les entreprises en Turquie.
Êtes-vous d’accord? Pourquoi cet accès est-il si difficile?
M. O’Daly: Il s’agit certainement d’un problème pour la Turquie. La difficulté d’avoir accès à du financement s’explique en partie par le faible taux d’épargne et, qu’une grande partie des achats par les entreprises turques se fait par d’importants conglomérats familiaux qui ont accès au financement international, alors que le financement local est assez rare.
Aussi, 99 p. 100 des entreprises turques sont de petites ou moyennes entreprises et, comme dans de nombreux pays, l’accès au financement local est limité pour ces entreprises.
Si vous examinez la bourse turque, les actions à cette bourse sont détenues de 60 à 65 p. 100 par des investisseurs étrangers, ce qui signifie qu’il y a très peu d’investissements nationaux dans des entreprises turques inscrites à la Bourse turque.
Les obstacles ou les complexités financières me dépassent probablement. Par exemple, il semble qu’il soit très difficile d’obtenir du financement à moyen ou long terme. Toutes les formes de financement des banques se font sur une ou deux années, ce qui peut aller pour des capitaux généraux de fonctionnement, mais ne convient pas aux entreprises qui doivent investir à moyen ou à long terme, afin d’élargir leurs activités ou d’investir dans de nouvelles technologies. Je pense que cela est relié fondamentalement à la forte dépendance aux capitaux externes et au très faible niveau d’épargnes nationales en Turquie.
Le sénateur Finley: Merci de votre exposé, monsieur O’Daly. Je veux clarifier la réponse que vous avez donnée à mon collègue, le sénateur Nolin, et quelque chose également que vous avez dit pendant votre exposé au sujet de la culture de consommation en Turquie. L’âge moyen, je crois, est de 29 ans. Puisqu’il est passé par diverses périodes de récession et de croissance, le pays semble avoir une tendance à dépenser. Les gens achètent beaucoup de choses et ont très peu d’épargne-retraite, ce qui explique la situation dont vous avez parlé avec le sénateur Nolin concernant la capacité de prêter.
Croyez-vous que la situation changera avec le vieillissement de la population? Lorsqu’elle sera à un âge moyen plus élevé, croyez-vous qu’il y aura une plus grande tendance à épargner pour l’avenir?
M. O’Daly: Eh bien, l’âge moyen au Royaume-Uni est beaucoup plus élevé et il est quand même très difficile là-bas de faire en sorte que la majorité des citoyens épargnent pour leurs vieux jours, alors ce n’est pas seulement une question démographique.
Le gouvernement a présenté des réformes au cours de la dernière année pour encourager les régimes de retraite privés, afin de favoriser l’épargne et les régimes de retraite. Le départ est lent, mais nous n’en sommes encore qu’au début. Offrir des incitatifs fiscaux aux gens pour qu’ils épargnent à long terme sera avantageux à long terme. Cependant, le problème actuel se manifeste dans le court et le moyen terme, étant donné que la Turquie a un énorme déficit gouvernemental, bien qu’il diminue, mais il sera toujours à 55 milliards de dollars cette année, environ 7 p. 100 du PIB.
En outre, elle a une dette à court terme d’environ 100 milliards de dollars qui doit être reportée à l’exercice suivant, et cette dette doit donc être remboursée ou les banques turques et les entreprises privées, les institutions non financières, devront emprunter à l’international une fois de plus afin de reporter cette dette.
Les politiques qui ont été mises en place au cours de l’année dernière afin de tenter de stimuler davantage d’économies peuvent avoir eu des effets positifs à long terme, probablement en même temps que les habitudes démographiques changent et que la population vieillit, comme vous l’avez mentionné, ou que les populations ayant une plus grande stabilité macroéconomique reconnaissent les avantages financiers et sont informés des incitatifs que fournit le gouvernement afin d’économiser pour l’avenir.
Cependant, il semble y avoir une incohérence dans le cas de la situation à court terme, à un moment où il règne une grande incertitude à l’international concernant le droit au capital. En ce moment, les flux de capitaux sont largement suffisants pour satisfaire les besoins de la Turquie en matière de financement externe. Cependant, nous avons vu par le passé qu’il suffit d’une profonde détérioration du climat entourant la crise de la zone euro pour que les investisseurs se retirent des marchés émergents, plus particulièrement des marchés émergents qui, comme la Turquie, ont d’importants déséquilibres externes.
Le sénateur Finley: J’ai une dernière question qui s’inscrit dans la foulée des questions de mon collègue.
Parlez-moi de l’attitude du gouvernement ou des entreprises à l’endroit des étrangers, le Canada, par exemple, qui participe de façon commerciale ou autre aux dépenses du gouvernement en matière d’infrastructure et de défense. Y a-t-il, par exemple, des impôts sur les sociétés ou des obstacles particulièrement irritants auxquels se heurtent les entreprises canadiennes lorsqu’elles souhaitent obtenir des contrats?
M. O’Daly: D’après ce que je comprends, les investisseurs étrangers bénéficient exactement du même traitement fiscal et du même accès aux incitatifs à l’investissement que les entreprises nationales. Je ne crois pas qu’il y ait quelque obstacle législatif que ce soit.
Cependant, comme dans bien des pays, les entreprises qui ont des liens étroits avec le gouvernement peuvent bénéficier d’une opinion plus favorable. Il convient de souligner, si l’on regarde ce qui s’est passé au cours des dernières années, depuis que la Turquie a divisé son réseau de distribution d’électricité en 20 régions différentes, qu’environ la moitié d’entre elles ont été vendues et que l’autre moitié est en passe de l’être, car le gouvernement actuel est très favorable à une croissance dirigée par le secteur privé et à la réduction de la taille de l’État. Cependant, les entreprises étrangères se sont montrées peu intéressées à ces appels d’offres. Les contrats ont pratiquement tous été attribués à des conglomérats turcs ou à des consortiums dirigés par des entreprises turques. Cependant, Halkbank, une des dernières banques, a vendu je crois 24 p. 100 de l’intérêt du gouvernement dans la banque il y a quelques jours et les intérêts étrangers dans cette institution de placements sont énormes. Je crois que les investisseurs institutionnels étrangers en contrôlent 80 p. 100.
Il semble y avoir une réticence à participer à des accords de privatisation et une volonté d’acquérir des intérêts dans une offre publique, un premier appel à l’épargne ou un placement secondaire. Cela peut être attribuable à des variables comme la connaissance du système juridique. L’un des atouts des investissements étrangers en Turquie, qui sont relativement modestes en proportion de l’économie, est que la plupart des investissements étrangers rentables en Turquie jusqu’à présent ont été faits dans le cadre de coentreprises où une compagnie étrangère désigne un partenaire turc, bien souvent l’un des grands conglomérats familiaux.
L’économie turque se diversifie rapidement. Un grand nombre d’entre eux sont très prospères. Koc et Fiat et Oyak-Renault en sont des exemples. Peut-être qu’un des moyens de surmonter les obstacles consiste à s’intéresser principalement initialement à des entreprises conjointes plutôt que de grandes filiales à 100 p. 100 au pays.
Le sénateur D. Smith: Je suis curieux de savoir ce que vous pensez de la Syrie. Si cette crise syrienne perdure et s’éternise, à quel moment cela va-t-il commencer à avoir des répercussions graves sur la stabilité dans cette zone et sur l’économie? Je sais qu’il y a ces passages frontaliers. Je ne pense pas que la Syrie souhaite davantage perturber les choses, mais il y a eu un certain nombre d’incidents. Il y a aussi la possibilité de raviver certains éléments kurdes, ce qui pourrait devenir un autre problème, et la possibilité d’un nombre énorme de réfugiés. Pensez-vous qu’Assad va s’accrocher au pouvoir encore plusieurs années, ou cela va-t-il finir?
M. O’Daly: Il y a déjà des centaines de milliers de Syriens dans des camps le long de la frontière en Turquie. Ils traversent la frontière depuis des mois. C’est une grande source de préoccupations pour le gouvernement, car à un moment donné, le fait d’héberger autant de réfugiés peut devenir extrêmement difficile d’un point de vue financier et humanitaire.
Je pense que pour ce qui est des politiques étrangères assez affirmatives du gouvernement turc au cours des dernières années et de son désir d’accroître son indépendance des orientations occidentales qu’il suivait généralement, il a manqué de fermeté à cette occasion. Le premier ministre Erdogan est l’un de ceux qui critiquent le plus vivement al-Assad après avoir été l’un de ses plus fidèles alliés pendant plusieurs années. Je crois qu’il pense que le conflit en Syrie se terminera bientôt et que c’était une décision habile pour la consommation publique nationale d’un point de vue régional que de prendre parti pour les rebelles syriens.
Cependant, cette crise semble sans fin. Je me souviens, il y a six mois je crois, on s’approchait de la fin et il y a eu ensuite une escalade. Les relations entre la Turquie et la Syrie se sont énormément détériorées depuis juin, depuis que l’avion a été abattu et le bombardement du village de l’autre côté de la frontière début octobre. Il y a eu des bombardements çà et là des deux côtés de la frontière depuis début octobre et on demande maintenant à l’OTAN de déployer des missiles de défense aérienne le long de la frontière.
Il semblerait que les tensions vont s’accroître plutôt que de s’apaiser. Cependant, comme vous l’avez indiqué, si ce conflit ne s’achève pas bientôt, la Turquie va se retrouver dans une situation extrêmement difficile, du fait surtout que ses alliés occidentaux n’ont pas vraiment envie d’intervenir en Syrie, étant donné qu’ils sont déjà intervenus en Afghanistan et en Libye en 2011. Il ne semble pas y avoir de volonté à participer. C’est une grande source de préoccupations pour le gouvernement turc et il n’y a pas de moyens faciles de s’en sortir.
Je ne crois pas qu’il soit dans l’intérêt de la Syrie ou de la Turquie de permettre à la situation de s’envenimer pour atteindre une confrontation militaire importante. La Turquie est trop occupée à régler des problèmes associés au PKK dans le Sud-Est, ce qui est exacerbé par le conflit en Syrie, et le régime al-Assad combat une guerre civile. Je pense qu’il va y avoir un certain degré de prudence et un certain désir de voter, mais on ne peut garantir que cela va se dérouler de la sorte. C’est une situation très préoccupante.
Le sénateur D. Smith: Lorsqu’on veut on peut. Il est bon de voir la rapidité avec laquelle on est parvenu à un cessez-le-feu entre Israël et Gaza, mais la situation syrienne semble s’éterniser.
Le sénateur Wallace: Merci, monsieur O’Daly. D’après ce que nous avons entendu, il semble y avoir une excellente occasion d’accroître le commerce et les relations entre le Canada et la Turquie. Pourtant, j’aurais tendance à penser que chez les gens d’affaires canadiens — et il y a évidemment des exceptions à la règle —, la Turquie est un peu méconnue. Je dirais que d’après ce que j’ai entendu, il y a d’excellentes occasions de renforcer cette relation.
En affaires, il est important de prendre les bonnes décisions au bon moment. Je me demande ce que vous en pensez. Pour qu’une entreprise canadienne élargisse ses liens avec la Turquie en ce moment, il faudrait qu’elle tienne compte, comme vous l’avez indiqué, des liens étroits que la Turquie entretient avec la zone euro. Si l’on regarde ce qui s’est passé l’année dernière, plus particulièrement, cette zone connaît une certaine incertitude financière qui pourrait avoir des répercussions sur la Turquie pour ce qui est de ses relations avec ses pays limitrophes et avec qui elle a des liens commerciaux étroits — l’Iran, l’Iraq et la Syrie — de même que la situation actuelle à Gaza et ses répercussions sur Israël.
Compte tenu de tout cela, à cette étape-ci, pour une entreprise canadienne — ayant peu ou pas d’expérience avec la Turquie — d’envisager de nouer des liens avec ce pays constitue un projet auquel elle devrait réfléchir sérieusement. Mais encore, compte tenu de toutes ces incertitudes, le risque serait-il trop élevé pour l’entreprise? Je comprends que dépendamment du domaine d’affaires, la façon de voir les choses sera différente. Compte tenu de tous ces éléments, que diriez-vous à ceux qui ne sont pas tout à fait à l’aise pour l’instant de brasser des affaires dans cette partie du monde?
M. O’Daly: Je me rappelle que durant la crise de 2001, il y avait de nombreuses sociétés étrangères. Parmi les Burger King et les McDonald, l’une des chaînes de restauration s’est installée en Turquie alors que la crise battait son plein, et l’autre chaîne a plutôt quitté le pays. C’est une question de perception par rapport aux occasions d’affaires. Je ne me rappelle pas quelle chaîne est entrée sur le marché turc et laquelle en est sortie, mais celle qui a décidé de pénétrer le marché a extrêmement bien réussi depuis. Ces décisions d’affaires stratégiques sont réalisées par les sociétés et elles dépendent de la situation contextuelle.
En ce moment, je crois qu’il y a des occasions d’affaires pour les sociétés canadiennes de secteurs comme celui de l’énergie. Les activités sont fort diversifiées dans ce secteur, allant de la distribution de l’électricité au gazoduc, en passant par les oléoducs. La Turquie est certainement devenue un carrefour en matière d’énergie dans la région située entre la mer Caspienne, le Moyen-Orient et l’Europe. Ce type d’activités nécessite des investissements et une planification à long terme, or, le moment opportun est peut-être arrivé.
Pour ce qui est des biens de consommation, en ce moment la Turquie s’efforce dans la mesure du possible de restreindre les importations en vue de réduire son déficit courant. À moyen terme, la Turquie cherche à produire davantage de biens intermédiaires et de produits de consommation qui seront vendus sur son marché intérieur pour en contrer l’importation. Peut-être que ce n’est pas le moment de se lancer sur ce marché. Je ne suis pas un expert en stratégie d’affaires.
Je crois que les perspectives à moyen et à long terme de l’économie turque sont positives en raison des statistiques démographiques et de l’emplacement géographique du pays, qui se trouve entre l’Occident et l’Orient. Malgré les difficultés avec la Syrie, les tensions avec le gouvernement fédéral irakien et avec l’Iran, ainsi que les relations désastreuses avec Israël, la Turquie a continué d’accroître ses exportations depuis le début de l’année. Ce pays jouit d’une économie en plein essor qui est extrêmement dynamique, et il est fort capable de diversifier cette économie lorsqu’un secteur s’épuise. La Turquie est très efficace lorsqu’il s’agit de chercher de nouveaux débouchés ailleurs. Personnellement, je miserais sur la Turquie à titre de pays où il fait bon investir.
Le sénateur Wallace: J’ai une autre question pour vous. Vous avez parlé de la réforme constitutionnelle en cours en Turquie qui vise à revoir la constitution militaire de 1984. Vous avez déclaré que l’un des changements constitutionnels envisagés aurait trait aux médias et aux droits individuels qui, je présume, existent en Turquie.
Quelles seraient les quelques autres principales questions qui pourraient être abordées dans le cadre de cette réforme constitutionnelle? Sans entrer dans les détails, j’aimerais savoir quels seraient les principaux enjeux, dans une optique occidentale, qui permettraient un meilleur alignement sur les pays occidentaux?
M. O’Daly: La réforme constitutionnelle et la question kurde vont de pair et sont étroitement reliées.
La Constitution accroîtrait les droits individuels et les droits des minorités ethniques, de sorte que les droits individuels seraient enchâssés dans la Constitution comme cela n’a jamais été fait auparavant. Cela changerait considérablement la façon dont l’Union européenne, par exemple, évalue la Turquie. Le fait de modifier la constitution, c’est bien certes, mais il faut également que les changements soient mis en application et qu’ils soient reflétés dans le droit du pays par la suite. Il s’agit d’un très long processus et d’un projet très ambitieux.
Malheureusement, il ne semble pas y avoir de consensus au Parlement quant à l’aspect que prendra la nouvelle Constitution en cours de rédaction. Il y a une majorité nette qui appuierait les propositions présentées jusqu’à présent. Les nombreux changements positifs qui seraient introduits pour garantir les droits des minorités, les droits religieux et les droits des groupes ethniques en Turquie pourraient faire en sorte qu’il soit plus difficile pour le judiciaire d’interdire les partis politiques. Certaines réformes seront malheureusement abandonnées, car on se concentre à l’heure actuelle uniquement sur la question controversée, à savoir si le système devrait passer d’un système parlementaire à un système présidentiel ainsi qu’une élection directe d’un président détenant un pouvoir exécutif. Les tensions et les propositions positives qui sont ressorties pendant la campagne électorale l’année passée portant sur les réformes constitutionnelles semblent avoir été écartées.
Le sénateur Wallace: Merci, monsieur O’Daly.
Le sénateur Robichaud: Vous avez répondu à ma question lorsque vous avez parlé de réforme constitutionnelle. Vous avez également souligné dans votre exposé le pouvoir de la présidence. Je crois que vous l’avez abordé dans une réponse au sénateur Wallace.
Le sénateur Johnson: Merci, monsieur O’Daly.
J’aimerais en savoir davantage quant à la demande par la Turquie hier à l’OTAN, en ce qui a trait aux missiles Patriot. Aussi, Rasmussen a indiqué qu’il explorerait les sites possibles. Si tel est le cas, ou si cela devient une possibilité, quels pays fourniraient le système? Je sais qu’ils doivent le faire, car l’OTAN examine la demande, mais avez-vous autre chose à ajouter sur le sujet?
M. O’Daly: D’après ce que je lis et d’après ce que je comprends, les États-Unis, l’Allemagne et les Pays-Bas possèdent des missiles Patriot. Le ministre des Affaires étrangères de l’Allemagne a fermement souligné son appui aujourd’hui. Il a été cité dans le Financial Times, ce qui indique qu’il y a une volonté d’appuyer la Turquie à cet égard. Cependant, la décision doit être prise.
Je crois qu’il y aura une grande réticence parmi les membres de l’OTAN à se mêler de la situation en Syrie et des tensions entre la Syrie et la Turquie. Je crois que cela dépend de la volonté d’appuyer la Turquie et de la disponibilité des missiles provenant d’un des pays qui les possèdent.
Le sénateur Johnson: Sur un autre sujet, vous avez parlé de l’intensification de la lutte avec les militants kurdes. Cependant, le premier ministre a indiqué qu’il rétablirait la peine de mort qui a été abolie en 2002, mais qui était une des conditions à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. Avez-vous d’autres renseignements sur le sujet? Est-il sérieux? Il l’a mentionné à plusieurs reprises.
M. O’Daly: Je crois qu’il a dit « pour les crimes liés au terrorisme, si nécessaire ». Je crois qu’il veut contenter un public particulier, notamment la droite radicale en Turquie, le vote nationaliste. Il doit veiller à garder le soutien dont il aurait besoin pour être élu à titre de président en 2014. Il se pourrait que le parti nationaliste qui est à l’opposition, et qui a consenti, non sans réticence, à l’abolition de la peine de mort lorsqu’il était au pouvoir en 2001. Ce parti pourrait donner le soutien nécessaire pour les réformes constitutionnelles que souhaite M. Erdogan afin de, entre autres, introduire le pouvoir exécutif pour la présidence.
Il me faut cependant souligner que personne n’avait été exécuté en Turquie 10 ou 15 ans avant l’abolition de la peine de mort. Même si cela plaît à certains nationalistes de la ligne dure en Turquie, je ne crois pas qu’il y ait un vaste appui de la population pour ce genre de volte-face sur les réformes qui ont été menées sous la direction de l’Union européenne.
La présidente: Monsieur O'Daly, j’ai une petite question. Si je peux résumer vos réponses, elles semblent dire que le gouvernement veut adopter un programme économique ouvert qui soit axé sur le commerce. Ce qui est moins clair, c’est le programme politique du gouvernement, qui semble être plus pragmatique qu’idéologique. Le pays s’est tourné vers l’Union européenne lorsque c’était dans son meilleur intérêt. Mais puisque le progrès était lent sur ce front-là, le pays s’est tourné vers de nouveaux marchés dans des républiques d’Afrique, et il a commencé à jouer un rôle stratégique beaucoup plus important du côté du Moyen-Orient.
Est-ce exact de dire que ce pays se positionne de façon pragmatique et pratique, mais que son économie a quand même progressé de façon continue?
M. O'Daly: Il ne fait aucun doute que le pays n’a pas de parti d’opposition fort. Le gouvernement est au pouvoir depuis 10 ans, et je suppose donc qu’il y a eu un certain degré de consolidation des institutions en Turquie.
Cela dit, le parti au pouvoir est très conscient du fait que la raison principale de son élection, et la raison principale de sa réélection à plusieurs reprises, c’est à cause de sa bonne gestion de l’économie. Mais si l’économie tourne mal, le parti ne sera pas reporté au pouvoir. Donc, l’économie est une priorité pour le gouvernement, et jusqu’ici, ces politiques ont été bonnes. Je crois que cette tendance va se maintenir.
La présidente: Monsieur O'Daly, nous avons écoulé notre temps. Merci beaucoup d’avoir abordé un si grand nombre de sujets et d’avoir témoigné par vidéoconférence. Cela ne fonctionne pas toujours, mais nous sommes très heureux que nous ayons pu obtenir autant d’information de vous aujourd’hui. Merci beaucoup d’avoir été des nôtres aujourd’hui.
M. O'Daly: Merci de m’avoir invité. (La séance se poursuit à huis clos.) |