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Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international

Fascicule 10 - Témoignages

OTTAWA, le mercredi 27 mai 2009

Le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd'hui, à 16 h 8, pour poursuivre son étude de l'émergence de la Chine, de l'Inde et de la Russie dans l'économie mondiale, et de ses répercussions sur les politiques canadiennes.

[Traduction]

Denis Robert, greffier du comité : En l'absence du président, nous devons élire un président de séance. Avez-vous des motions à proposer?

Le sénateur Andreychuk : Je propose que le sénateur Dawson préside la réunion.

M. Robert : Le sénateur Andreychuk propose que le sénateur Dawson préside la réunion. Y a-t-il d'autres candidatures?

Le sénateur Andreychuk : Non.

M. Robert : Dans ce cas, je déclare le sénateur Dawson élu président de séance. Merci.

Le sénateur Dennis Dawson (président suppléant) occupe le fauteuil.

Le président suppléant : Permettez-moi d'ouvrir la séance télévisée du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Le comité poursuit son étude spéciale sur l'émergence de la Chine, de l'Inde et de la Russie dans l'économie mondiale, et les répercussions sur les politiques canadiennes. Nous accueillons aujourd'hui M. Justin Brown, haut-commissaire de l'Australie au Canada, et M. David Tawei Lee, représentant de Taïwan au Canada.

Avant sa nomination au poste de haut-commissaire au Canada, M. Brown était responsable du secrétariat du Review of Export Policies and Programs. En 2006-2007, il a fait partie du secrétariat du groupe de travail chargé par le premier ministre d'examiner les échanges de droits d'émission, et a par la suite travaillé sur le dossier du changement climatique pour l'APEC, l'Organisation de coopération économique Asie-Pacifique. M. Brown a également été consul général à Los Angeles en 2006, chef de mission adjoint auprès de l'Union européenne à Bruxelles, de 1999 à 2001, et premier secrétaire à Copenhague, de 1988 à 1991.

Avant d'être nommé au Canada, M. Lee a été représentant de Taïwan aux États-Unis de 2004 à 2007. Il a aussi été représentant de Taïwan en Belgique, son mandat englobant l'Union européenne et le Luxembourg.

[Français]

Bienvenu au Sénat, messieurs les ambassadeurs. Nous allons commencer par la présentation de M. Brown, laquelle sera suivie par celle de M. Lee.

[Traduction]

Justin Brown, haut-commissaire, Haut-commissariat de l'Australie au Canada : Merci beaucoup. Je suis heureux de comparaître devant votre comité cet après-midi afin de vous aider dans l'étude très importante que vous avez entreprise. Aujourd'hui, je vais vous parler essentiellement de la Chine et des relations actuelles et futures de l'Australie avec ce pays.

Je vais diviser mes remarques en trois parties. Premièrement, je vous donnerai un bref aperçu du contexte général. Deuxièmement, je vous dirai comment l'Australie interprète l'accession de la Chine au rang de puissance économique. Et troisièmement, je vous parlerai des dispositifs que l'Australie a mis en place pour améliorer ses relations avec la Chine. Bien entendu, je serai heureux de répondre à toutes les questions que vous voudrez me poser.

En guise d'introduction, j'aimerais souligner la coopération extrêmement efficace qui existe entre l'Australie et le Canada dans la région Asie-Pacifique. Nos deux pays coopèrent non seulement sur le plan bilatéral mais aussi dans le contexte du forum sur la Coopération économique Asie-Pacifique et dans le cadre de nombreux autres forums, notamment le forum régional de l'ANASE.

Nous considérons le Canada comme un acteur important dans la région. Pour nous, le maintien et le renforcement des liens transpacifiques entre l'Asie de l'Est et l'Amérique du Nord sont indispensables à la prospérité et à la sécurité à long terme de la région.

Permettez-moi d'attirer votre attention sur la proposition qu'a faite en juin dernier le premier ministre australien, M. Rudd, aux pays de la région, à savoir la création d'ici à 2020 d'une communauté Asie-Pacifique qui, en remodelant l'architecture de la région, serait mieux à même de faire face aux enjeux géostratégiques, économiques et autres de la région. Bien entendu, l'Australie et le Canada examinent cette proposition, avec les autres pays de la région.

Voilà pour le contexte.

Pour ce qui est maintenant de l'accession de la Chine au rang de puissance économique, l'Australie s'en réjouit car elle y voit un certain nombre d'avantages. Pour la plupart des pays, et l'Australie n'y fait pas exception, la Chine est devenue non seulement un pays d'usines à faibles coûts mais aussi un débouché de plus en plus important pour leurs produits et leurs services.

La Chine joue de plus en plus un rôle de moteur de la croissance économique mondiale, et on le constate encore davantage avec la récession économique qu'on connaît actuellement. À l'instar d'autres pays, l'Australie encourage la Chine à jouer un rôle de chef de file dans la relance de l'économie mondiale. Certes, la Chine a connu dernièrement un ralentissement économique, mais certains indicateurs laissent présager une reprise imminente. Vous êtes certainement au courant du plan de stimulation économique qu'a annoncé le gouvernement chinois à la fin de l'année dernière et qui consiste, en substance, à investir 800 milliards de dollars dans le développement des infrastructures du pays. Ce programme a donné un véritable coup de fouet à l'activité économique du pays, ce qui, nous l'espérons en Australie, aura des répercussions dans tous les pays de la région Asie-Pacifique.

Quoi qu'il en soit, pour le moyen et le long terme, nous estimons que l'urbanisation et l'industrialisation continueront d'être les principaux moteurs de la croissance économique chinoise; qu'avec le temps, la Chine retrouvera le rythme de croissance qu'elle affichait encore récemment; et que cela se traduira par la croissance de ses importations, notamment dans les secteurs des mines et de l'énergie.

Les relations commerciales et financières que l'Australie entretient avec la Chine se sont développées avec l'expansion du rôle international de la Chine. À bien des égards, nos deux économies sont complémentaires. À titre d'exemple, la Chine est actuellement notre deuxième partenaire commercial pour ce qui est des importations et des exportations de marchandises, dont la valeur combinée s'élève à environ 68 milliards de dollars australiens. La Chine est la destination de 15 p. 100 des exportations totales de l'Australie. Les exportations de services sont en forte hausse et représentent aujourd'hui environ 4,5 milliards de dollars australiens par an. Environ 127 000 Chinois poursuivent des études en Australie chaque année. Nous accueillons aussi un grand nombre de touristes chinois, qui étaient plus de 350 000 l'an dernier. La Chine est aussi un investisseur important en Australie, surtout dans le secteur des mines et de l'énergie.

La crise financière mondiale et l'affaiblissement des marchés des actions ont donné l'occasion à la Chine de placer une partie de ses ressources en devises étrangères dans des investissements à l'étranger, et l'Australie a été l'un des pays à en bénéficier. Notre pays se réjouit de cette diversification du portefeuille d'investissements étrangers de la Chine, car ce portefeuille, jusqu'à présent, se limitait pratiquement aux obligations.

Parallèlement au développement de ses relations commerciales et de ses investissements, la Chine a considérablement accru sa participation à des forums multilatéraux sur l'économie et des questions connexes. Du point de vue de l'Australie, la Chine a joué un rôle constructif dans les efforts déployés par le Fonds monétaire international, l'IMF, et par le G20 pour trouver des parades à la récession économique.

Vous êtes certainement au courant des décisions qu'ont prises les dirigeants du G20 dans le but de moderniser les institutions financières internationales. L'Australie estime que, si nous voulons encourager une plus grande participation de la Chine, nous devons envisager sérieusement de réformer ces institutions afin qu'elles soient plus représentatives aux yeux de pays comme la Chine.

L'Australie et le Canada sont bien sûr tous deux fermement opposés au protectionnisme, et la Chine est précisément intervenue dans ce sens dans le contexte du G20. Cela ne doit pas nous surprendre, étant donné que la Chine est une grande nation commerçante et qu'elle dépend de ses exportations.

En troisième partie, je vais vous parler des dispositifs que l'Australie a mis au point pour renforcer ses relations avec la Chine. J'ai déjà parlé de certains forums multilatéraux et régionaux, comme l'APEC. Nous avons aussi un certain nombre de mécanismes bilatéraux, que je n'ai pas le temps ici de tous vous énumérer et qui portent sur le commerce, l'économie, les ressources, l'énergie, l'aide au développement, la défense, la sécurité régionale, le désarmement, les droits de la personne, le changement climatique et des questions consulaires.

Avant de revenir sur certains en particulier, j'aimerais vous dire que l'Australie et la Chine ont, certes, des divergences d'opinions, mais qu'elles réussissent à gérer ces divergences pour s'entendre sur un certain nombre de mécanismes, afin de permettre à leurs relations de se développer.

Les droits de la personne sont un domaine dans lequel l'Australie et la Chine ont des opinions très divergentes. Le forum qui a été créé à ce sujet entre l'Australie et la Chine se réunit à peu près une fois par an. Il a donné lieu à des échanges francs et directs et a permis l'élaboration d'un plan d'action visant à améliorer le respect des droits de la personne en Chine. La dernière réunion a eu lieu au début de l'année, et l'Australie en a profité pour soulever les questions de la liberté d'expression, de la liberté de religion, du Tibet, de la peine de mort et du Falun Gong. L'Australie a également mis en place un important programme d'aide technique visant à aider la Chine à améliorer son système juridique, de façon à assurer un plus grand respect des droits de la personne dans la pratique.

Je vais maintenant vous donner un aperçu des autres mécanismes que nous avons mis en place dans d'autres secteurs.

Nous avons la commission économique mixte, la Joint Ministerial Economic Commission, qui, depuis plus de 20 ans, réunit — deux fois par année — le ministre du Commerce de l'Australie et son homologue chinois. C'est pour nous une tribune importante qui nous permet de faire la promotion de nos liens commerciaux et économiques avec la Chine.

Nous avons aussi la rencontre annuelle à haut niveau qu'on appelle High-level Cooperation Dialogue. Là encore, c'est le ministre du Commerce qui représente le gouvernement australien, et le président de la Commission nationale de développement et de réforme qui représente le gouvernement chinois. On y discute de questions bilatérales et commerciales, surtout en ce qui concerne les ressources.

J'aimerais signaler que les deux pays ont signé un accord-cadre de coopération économique et commerciale en 2003, qui a conduit à la réalisation d'une étude de faisabilité en vue d'un accord bilatéral de libre-échange. Peu après l'achèvement de cette étude en 2005, les deux pays ont entrepris des négociations en vue d'un accord bilatéral de libre- échange. Ces négociations se poursuivent.

La coopération bilatérale en matière de changements climatiques est un élément de plus en plus important de notre plan d'action bilatéral. Selon de nombreuses sources, la Chine est aujourd'hui le plus gros producteur au monde d'émissions de gaz à effet de serre. Si nous voulons trouver une solution mondiale à ce problème, il nous semble important d'y faire participer la Chine. L'Australie a entamé un dialogue avec elle sur cette question, au niveau des ministres, et la première rencontre a eu lieu à la fin de l'année dernière.

Au niveau du ministre des Affaires étrangères, l'Australie entretient un dialogue stratégique avec la Chine depuis 2008. Cette tribune permet à des représentants de tous les niveaux du gouvernement chinois de participer activement à l'examen de questions régionales et mondiales.

Enfin, nos deux pays accueillent fréquemment des représentants de l'autre pays. Par exemple, le premier ministre Rudd s'est rendu deux fois en Chine en 2008, notamment à l'occasion des Jeux olympiques de Pékin. Le ministre des Affaires étrangères s'est rendu en Chine en mars dernier, et le ministre du Commerce y est allé à 5 reprises au cours des 18 derniers mois, sans parler des diverses visites que le ministre des Finances y a faites au cours des 18 derniers mois. Le président Hu Jintao est allé en Australie en 2007, et un certain nombre de dirigeants chinois s'y rendent régulièrement.

Cela dit, monsieur le président, je propose de mettre fin à ma déclaration liminaire et suis prêt à répondre à vos questions.

Le président suppléant : Je vais maintenant donner la parole à M. Lee, qui est le représentant de Taïwan au Canada.

David Tawei Lee, représentant de Taïwan au Canada, Taipei Economic and Cultural Office : Monsieur le président, honorables sénateurs, c'est un honneur pour moi de comparaître devant votre distingué comité. Je vais vous parler de la position de Taïwan sur l'émergence de la Chine sur la scène économique mondiale, et, si vous me le permettez, des conséquences que cela peut avoir pour la politique canadienne.

Le 30 avril, le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, a émis un communiqué indiquant qu'il se réjouissait du rapprochement entre Taïwan et la Chine, ainsi que de la participation historique de Taïwan à l'assemblée, ce mois-ci, de l'Organisation mondiale de la santé, l'OMS. Le 17 mai, la ministre canadienne de la Santé, Leona Aglukkaq, a rencontré à Genève son homologue taïwanais, le ministre Yeh, la veille de l'assemblée de l'OMS. Les deux ministres ont parlé des possibilités de collaboration future entre nos deux pays en matière de santé.

D'aucuns pourraient dire que le communiqué du ministre des Affaires étrangères et la rencontre des deux ministres de la Santé font partie des relations bilatérales normales qu'entretiennent deux pays alliés, mais les fins observateurs savent que cette évolution ne s'est pas faite facilement entre Taïwan et le Canada. Trois facteurs clés en sont à l'origine : la décision courageuse du président Ma de chercher à instaurer un climat de détente avec la Chine; la réaction favorable de la Chine; et la décision du Canada, suite à ce rapprochement, d'agir en conséquence.

Honorables sénateurs, depuis son installation il y un an, le président Ma Ying-jeou, de la République de Chine, s'efforce de limiter les conflits avec la République populaire de Chine en vue d'établir une trêve sur le front diplomatique. La politique du président Ma vis-à-vis de la Chine peut se résumer à « 3 ni » : ni unification, ni indépendance, ni recours à la force.

L'amélioration des relations entre Taïwan et la Chine continentale a permis la tenue de rencontres à haut niveau, lesquelles ont conduit à la signature de neuf accords révolutionnaires entre Taïwan et la Chine, l'an dernier. Outre des accords portant sur des liaisons aériennes, maritimes et postales directes et sur la sécurité des aliments, nous en avons récemment signé trois autres pour augmenter les liaisons aériennes régulières directes, la collaboration financière et l'assistance judiciaire réciproque. Un mécanisme de compensation va être mis en place pour nos deux devises, et un accord de type libre-échange est en discussion.

Prenons le cas des liaisons aériennes directes. Auparavant, il fallait sept heures pour se rendre de Taipeh à Shanghai via Hong Kong. Aujourd'hui, cela ne prend qu'une heure et demie. Il y a un an, 36 vols seulement reliaient chaque semaine Taïwan à la Chine continentale; aujourd'hui, il y en a 270. Cela simplifie beaucoup les choses pour les touristes et les hommes d'affaires. L'an dernier, 300 000 touristes chinois ont visité Taïwan, et on en attend le double cette année.

Des progrès ont été réalisés sur bien d'autres fronts. Le premier investissement direct de la Chine a été annoncé à la fin d'avril dernier. China Mobile a accepté d'investir 525 millions de dollars américains dans l'un des grands fournisseurs de services de télécommunications de Taïwan, Far EasTone Telecommunications Ltd.

Tout récemment, la Chine a annoncé l'envoi de plusieurs missions d'acquisitions à Taïwan. Vu l'impact de la récession mondiale, ces missions, et les investissements directs qui en découleront, contribueront certainement à stimuler l'économie taïwanaise.

Honorables sénateurs, j'estime que les politiques visionnaires du président Ma et les récents progrès réalisés dans nos relations avec la Chine continentale contribuent grandement à la paix et la stabilité de la région, et sont aussi conformes à la politique et aux intérêts du Canada dans la région.

Malgré des divergences politiques, Taïwan et la Chine ont tissé des liens économiques solides au cours des 20 dernières années. C'est le résultat des avantages comparatifs que détient chaque partie dans la chaîne d'approvisionnement mondiale. Depuis 2000, c'est la Chine, et non plus les États-Unis, qui est le premier marché d'exportation de Taïwan. Taïwan est la cinquième source d'investissements directs en Chine, après Hong Kong, les îles Vierges, le Japon et les États-Unis. D'après les statistiques les plus récentes, on compte 6 entreprises taïwanaises parmi les 10 plus grands exportateurs chinois en 2008. Taïwan continue d'utiliser le modèle « commandes reçues par Taïwan, produits transformés en Chine » pour s'implanter sur le marché chinois.

Par ailleurs, honorables sénateurs, Taïwan et le Canada ont tous deux des économies de libre marché, où le secteur des services représente 70 p. 100 du PIB de chaque pays. Les relations économiques bilatérales sont bien établies. Taïwan est le quatrième partenaire commercial asiatique du Canada, et le 13e au niveau mondial. Selon le Forum économique mondial, le FEM, Taïwan et le Canada se classaient en 2008 parmi les 15 premiers pays pour ce qui est de la compétitivité et de l'innovation.

La compatibilité économique et la capacité technologique de Taïwan et du Canada sont très complémentaires, et nos deux pays devraient conclure un partenariat pour réaliser des projets commerciaux sur les marchés de la Chine élargie et de l'Asie du Sud-Est. À cet égard, les quelque 150 000 Canadiens d'origine taïwanaise pourraient être d'une aide précieuse pour les entreprises canadiennes.

Honorables sénateurs, à l'instar des nombreuses multinationales qui ont fait du Canada leur point d'entrée en Amérique du Nord, à la création de l'ALENA, les Canadiens devraient profiter de l'occasion pour faire de Taïwan leur point d'entrée pour accéder aux marchés de la Chine élargie et des pays d'Asie du Sud-Est. Avec la libéralisation des échanges commerciaux, des investissements, des transports et des déplacements entre Taïwan et la Chine continentale, mon pays est bien placé pour servir de siège régional à des entreprises de logistique, de commercialisation, de finances, de transport et de gestion. Ayant l'avantage de parler la même langue, de partager le même héritage, de comprendre toutes les nuances de la culture commerciale complexe des Chinois, et, surtout, de traiter avec eux depuis 20 ans, Taïwan a beaucoup de cordes à son arc.

Permettez-moi de vous donner trois exemples. Dans le secteur de la fabrication des TI, l'entreprise Quanta Computer Inc., de Taïwan, est le numéro un mondial de la fabrication de blocs-notes électroniques et figure dans la liste de Fortune Global 500. Toutefois, quand la société a voulu transférer des informations de gestion recueillies en Chine vers son siège social à Taïwan, elle s'est heurtée à quelques problèmes, qui ont perturbé quelque peu les approvisionnements mondiaux de blocs-notes électroniques. Grâce à la plate-forme Soleus Transit, mise au point par Intrynsic Software International Inc., un fournisseur de logiciels de solutions établi à Vancouver, Quanta dispose aujourd'hui d'un modèle commercial prévoyant un délai de lancement plus court et moins coûteux. Ce modèle illustre bien la formule gagnant-gagnant-gagnant : le savoir-faire du Canada, la logistique de Taïwan et l'assemblage en Chine.

Un autre exemple est celui de l'acquisition par la société taïwanaise TSMC, Taïwan Semiconductor Manufacturing Company Limited, le premier fabricant au monde de semi-conducteurs, de la société canadienne Emerging Memory Technologies Inc., qui a son siège à Kanata et qui conçoit des circuits intégrés. Nous avons encore là l'illustration de la formule gagnant-gagnant-gagnant : conception canadienne, gestion taïwanaise et fabrication chinoise.

Dans les industries numériques liées aux médias, la société Corel, d'Ottawa, a racheté la société taïwanaise Ulead Systems en 2006 et a fait de ses bureaux à Taïwan un centre de recherche et développement et la plaque tournante de ses activités dans la Chine élargie. Cet exemple illustre lui aussi la formule gagnant-gagnant-gagnant : conception canadienne, commercialisation taïwanaise et distribution chinoise.

En avril, le ministre du Commerce international, Stockwell Day, a annoncé l'ouverture de bureaux commerciaux à Chengdu et à Shenzhen, et de quatre autres bureaux d'ici à la fin de 2009. Nous nous en réjouissons, car nous pensons que cela renforcera les relations commerciales entre la Chine et le Canada.

Enfin et surtout, je ne saurais trop insister sur le fait que, pour les Canadiens, l'itinéraire le plus court pour se rendre en Chine passe par Taïwan. Comme mon temps est limité, je conclurai mes remarques en vous disant ceci : l'influence grandissante de la Chine sur la scène économique mondiale est un fait incontestable, qui s'accompagne à la fois de défis et d'opportunités. Avec le climat de détente qui s'est instauré entre Taïwan et la Chine continentale, le Canada, Taïwan et la Chine ont une occasion en or de travailler ensemble pour illustrer encore une fois la formule gagnant-gagnant- gagnant et contribuer à la prospérité de tous dans la Chine élargie et dans les pays d'Asie du Sud-Est.

Honorables sénateurs, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant votre comité. Je serai heureux de répondre à vos questions ou à vos commentaires. Merci.

Le président suppléant : Merci, messieurs, de ces déclarations fort intéressantes. Je vais commencer par donner la parole au sénateur Andreychuk.

Le sénateur Andreychuk : J'aimerais me faire l'écho du président, et vous dire que vos deux déclarations vont nous être extrêmement utiles pour notre étude. Nous allons parler essentiellement de la Chine et de vos relations avec ce pays.

J'aimerais commencer par poser une question au haut-commissaire de l'Australie. Vous nous avez dit que vous avez entamé un dialogue avec la Chine au sujet des droits de la personne, et je suis contente que vous ayez abordé la question. Vos discussions portent-elles sur la situation des droits de la personne dans vos deux pays ou vous limitez- vous essentiellement aux normes et conventions internationales? Comment faites-vous pour poursuivre le dialogue avec la Chine lorsque vous n'êtes pas d'accord?

M. Brown : Merci, sénateur. Le dialogue sur les droits de la personne porte principalement sur les normes internationales et vise à faire mieux comprendre à la Chine l'objectif de ces normes et les types de comportement qui y sont conformes. Comme je l'ai indiqué, nous discutons aussi de certains cas précis au niveau bilatéral. Ainsi, les deux pays proposent divers cas se rapportant aux droits de la personne et à la relation Australie-Chine, et nous en discutons.

À mon avis, ce dialogue sur les droits de la personne comporte trois volets : une discussion des normes internationales, une discussion de cas précis qui concernent les deux pays, et un programme technique qui permet à l'Australie de fournir une aide juridique à la Chine, tant dans le public que dans le privé, afin d'accroître la capacité du système à régler de façon concrète les problèmes relatifs aux droits de la personne.

Pour répondre à votre question, je vous dirais que ce dialogue ne se limite pas à une simple discussion sur les normes internationales. Nous avons de nombreux échanges sur toutes sortes de situations qui concernent les deux pays.

Le sénateur Andreychuk : Il y a une vingtaine d'années, votre pays a pris la décision stratégique, acceptée par tous les partis, de concentrer ses efforts, ses échanges commerciaux et ses relations sur l'Asie et le Pacifique-Sud, et aujourd'hui, vous semblez être bien implantés en Chine. On nous conseille souvent d'en faire autant, car votre stratégie a bien réussi. Pensez-vous que c'est votre situation dans la région qui vous avantage, le Canada s'étant concentré sur l'Amérique du Nord, ou bien est-ce la complexité des relations que vous avez établies avec tous les pays de la région qui vous donne un avantage en Chine? Quel conseil donneriez-vous au Canada s'il voulait intensifier ses relations avec les pays de la région? On nous a dit que les États-Unis et l'Australie se faisaient concurrence sur ces marchés, et, bien souvent, nous nous retrouvons sur ces marchés avec les mêmes types de produits à vendre, comme le blé. Pourriez-vous nous expliquer comment vous avez réussi à vous implanter sur ces marchés, et comment, à votre avis, le Canada pourrait y parvenir?

M. Brown : C'est une question complexe. Quand le Royaume-Uni est entré dans le Marché commun européen, et c'était au début des années 1970, l'Australie s'est vue obligée, économiquement parlant, de chercher de nouveaux marchés pour se diversifier.

Cela a conduit à une réorientation radicale de la politique étrangère australienne, qui s'est faite à l'époque où l'Asie de l'Est commençait à connaître une expansion vertigineuse. On peut dire que l'engagement de l'Australie dans la région s'est fait par étapes. La première était économique, l'objectif étant d'accroître nos échanges commerciaux et nos investissements afin d'optimiser nos exportations de produits de base vers ces pays. L'Australie a toujours été un important producteur et exportateur de produits de base, tout comme le Canada. Au fur et à mesure que ces pays se sont industrialisés et urbanisés, l'Australie est devenue pour eux un fournisseur naturel puisqu'elle était située dans le même fuseau horaire et qu'elle avait des produits dont ils avaient grand besoin.

À partir des années 1980, nos échanges se sont élargis à d'autres secteurs. J'ai parlé tout à l'heure du grand nombre de Chinois qui viennent étudier en Australie. C'est la même chose pour beaucoup d'autres pays asiatiques, où l'Australie est devenue la destination préférée des étudiants chinois. À l'heure actuelle, dans les écoles, même au niveau primaire, et dans les universités australiennes, le japonais et le mandarin sont les langues asiatiques les plus parlées. Notre premier ministre parle mandarin. C'est un exemple vivant de la façon dont le système produit de plus en plus de compétences asiatiques. Bon nombre d'entreprises chinoises sont aujourd'hui des investisseurs et des industriels importants dans la région.

Contrairement au Canada, l'Australie n'a pas l'avantage que confère la proximité de la première puissance économique et politique mondiale. À partir des années 1970, nous avons dû nous ajuster à notre réalité géographique, et nous l'avons fait en nous concentrant sur la région.

Cela a pris du temps, et ce n'est pas encore fini, tant s'en faut. J'estime que la transition d'une relation essentiellement commerciale vers une relation politique plus globale dans la région est aujourd'hui bien avancée. J'ai dit dans mes remarques liminaires que le premier ministre Rudd avait proposé la création d'une communauté Asie- Pacifique. Certes, on ne devrait pas parler de l'Asie comme une région, car c'est plutôt un ensemble de sous-régions et de pays. C'est une région très complexe. Il est inexact de dire, par exemple, que l'Indonésie fait partie de la même région que la République de Corée. Il ne faut donc pas perdre de vue la grande diversité de la région.

Pour ce qui est de la collaboration à l'échelle de la région, nous avons aussi beaucoup de relations bilatérales, que nous nous efforçons de développer.

Vous m'avez demandé comment le Canada pourrait s'implanter sur ces marchés. Je ne veux surtout pas me mêler de politique canadienne. J'ai l'impression que la récession économique mondiale s'accélère, et qu'on assiste à un déplacement des pôles économiques que représentent l'Europe et l'hémisphère Nord vers l'Asie de l'Est. C'est un phénomène qui, à mon avis, va se poursuivre pendant quelque temps.

La classe moyenne de pays comme la Chine se développe rapidement. Avec le temps, la région va certainement devenir un moteur important de l'économie mondiale.

J'espère que le Canada va participer au développement et à l'évolution des structures et des relations régionales. J'ai dit tout à l'heure que l'Australie était en train de négocier un accord de libre-échange avec la Chine. Ce n'est pas à moi de vous dire si votre pays devrait en faire autant, mais l'architecture de la région, au niveau du commerce et des investissements, et sur les plans politique et économique, évolue très rapidement. Il est important que des pays qui partagent les mêmes valeurs et qui sont favorables à la sécurité, à la prospérité et à l'ouverture des marchés participent au dialogue.

À mon humble avis, un engagement du Canada dans la région serait un bon investissement à long terme et serait très bien accueilli par les pays de la région, y compris l'Australie.

Le président suppléant : Monsieur Lee et monsieur Brown, si une question est posée à l'un d'entre vous et que vous voulez compléter la réponse, n'hésitez pas à intervenir.

Le sénateur Downe : Monsieur Lee, dans votre déclaration liminaire, vous avez dit que, pour la première fois, une entreprise de Chine continentale avait fait un investissement direct à Taïwan. Imposez-vous des restrictions aux sociétés d'État et à ce qu'elles peuvent acheter à Taïwan?

M. Lee : Oui, et pour de bonnes raisons. Nous avons besoin de construire nos infrastructures de défense. Ainsi, nous n'autorisons pas les investisseurs chinois à s'implanter dans certaines industries liées au domaine militaire et stratégique, dans des industries de haute technologie comme les semi-conducteurs, les écrans plats TFT LCD, ainsi que le secteur de la construction, la sidérurgie, les services publics, les machines-outils et autres.

Le sénateur Downe : Je comprends vos raisons pour tous les exemples que vous avez donnés, à l'exception de la construction. Qu'est-ce qui vous préoccupe?

M. Lee : C'est parce que les coûts de la main-d'œuvre sont relativement moins élevés, et nous ne voulons donc pas ouvrir le marché de la construction aux investisseurs chinois.

Le sénateur Downe : Je vais poser la même question à monsieur Brown. Vous connaissez la différence entre une entreprise privée et une société d'État : la première vise à rentabiliser l'investissement de ses actionnaires, tandis que la deuxième a une vocation nationale. Quelles restrictions imposez-vous dans votre pays?

M. Brown : L'Australie s'est dotée d'un mécanisme d'examen des investissements étrangers qui n'est pas tellement différent de celui du Canada. Ainsi, les investissements dépassant un certain seuil — je ne me souviens plus exactement, mais c'est assez élevé — doivent obtenir l'approbation de notre ministre des Finances. Celle-ci est donnée si l'investissement sert l'intérêt national, je ne parle pas de la sécurité nationale mais de l'intérêt national. C'est un critère assez général. L'intérêt national n'est pas défini dans la loi.

Ce sont les critères de sélection qui s'appliquent à tous les investissements. Au début de l'année dernière, le ministre des Finances a également annoncé que des critères précis s'appliqueraient dorénavant aux investissements faits par des sociétés d'État et des fonds souverains. Il y en a un certain nombre, et je serai heureux de vous en faire parvenir la liste. Il s'agit en substance d'une définition plus précise de la façon dont le critère de l'intérêt national s'applique aux sociétés d'État et aux fonds souverains qui font une demande pour acquérir des entreprises australiennes. Comme vous l'avez dit, ces entités ne fonctionnent pas nécessairement selon les règles du marché.

Nous avons eu un cas type très intéressant récemment, lorsqu'une entreprise chinoise a voulu acheter des sociétés d'énergie australiennes. Comme je l'ai indiqué, l'Australie est une source importante de minerai de fer et de charbon pour la Chine. Des sociétés d'État chinoises se sont dites intéressées à acheter des sociétés de minerai de fer australiennes afin d'assurer la régularité de leurs approvisionnements, de la mine à la fonderie. Ça a été un changement de politique difficile pour l'Australie, et c'est maintenant le régime réglementaire qui est en vigueur.

Le sénateur Downe : J'aimerais en savoir plus sur votre processus de sélection. Même si vous n'êtes pas un expert en la matière, pouvez-vous nous dire si un nombre important de demandes sont refusées ou si, au contraire, la plupart satisfont au critère de l'intérêt national et sont donc approuvées?

M. Brown : Plus de 97 p. 100 sont approuvées. L'Australie, tout comme le Canada, a toujours été une destination pour les investissements étrangers. Nous accueillons favorablement les investissements étrangers. Le critère de l'intérêt national ne vise absolument pas à écarter les investissements étrangers; il s'agit uniquement de s'assurer que, dans certains secteurs, l'intérêt national général est protégé.

Le régime a été mis en place principalement à cause des investissements japonais dans notre secteur immobilier, ce qui avait causé une surenchère des prix et eu un impact sur la classe moyenne australienne. Depuis, étant donné l'intérêt considérable que des sociétés d'État ont manifesté pour certaines de nos entreprises clés, nous avons décidé d'appliquer davantage nos critères à ce domaine plutôt qu'à celui de l'immobilier.

En général, on ne refuse pas plus d'une demande par an, quelquefois deux, mais c'est rare.

Le critère de l'intérêt national est essentiellement un mécanisme qui permet au ministre des Finances et au gouvernement de demander aux auteurs des propositions de quelle façon ils pensent pouvoir maximiser les retombées positives de leurs propositions sur l'Australie, tout en ménageant les susceptibilités.

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : Bienvenue. Je m'excuse de mon retard, une autre réunion m'a empêchée d'être ici au début de la réunion. Ma question s'adresse à M. Lee.

Lors du forum organisé à Xiamen sur les relations entre Taïwan et la Chine, du 16 au 22 mai dernier, le responsable des affaires taïwanaises au conseil d'État annonçait, contre toute attente, que Pékin était désormais prêt à signer l'accord cadre sur les relations économiques. Cette avancé chinoise inattendue se produit alors qu'à Taïwan monte la controverse sur le rapprochement économique des deux rives. Le 17 mai, des dizaines de milliers de manifestants protestaient contre la politique d'ouverture économique avec la Chine au motif que la rafale des récents accords engageait l'île sur la pente dangereuse d'un rapprochement politique irréversible avec Pékin.

Comment répondez-vous à ceux qui pensent que la politique chinoise du président taïwanais, Ma Ying-jeou, place le futur et la destinée des habitants de Taïwan entre les mains des Chinois?

[Traduction]

M. Lee : Merci, sénateur. Vous avez posé une question difficile. Un accord de type libre-échange est actuellement envisagé par mon gouvernement et ses homologues chinois. Hier, lorsque le président Hu Jintao a rencontré le président du Kuomintang, Wu Poh-hsiung, à Pékin, il lui a dit que la Chine était prête à entamer des négociations de libre-échange dès le second semestre de cette année, et qu'il pensait que l'accord serait signé d'ici à l'an prochain.

Pour mon gouvernement, c'est une étape importante car, comme vous le savez, Taïwan est isolée sur la scène internationale. Elle ne peut participer à aucun projet d'intégration économique régionale. D'autres pays de l'ANASE y participent avec la Chine, le Japon et la Corée, mais Taïwan en est exclue. Une fois que cette intégration économique régionale sera concrétisée, les biens et services de Taïwan feront face à une concurrence déloyale. Il est donc très important, pour nous, de commencer par conclure un accord avec la Chine. Nous aurons peut-être l'occasion, par la suite, de discuter avec l'ANASE et d'autres pays. C'est donc dans l'intérêt de l'économie taïwanaise.

Comme vous le savez, nous sommes une démocratie pluraliste. On peut dire qu'à peu près 30 à 40 p. 100 des Taïwanais sont souverainistes, si je peux emprunter le vocabulaire canadien. Ces gens-là voudraient que la séparation soit encore plus nette avec la Chine. Bien entendu, ils s'opposent vivement à la politique de rapprochement du président Ma et à la signature d'un accord de libre-échange. Le 17 mai, ils ont manifesté dans les rues de Taipei pour exprimer leur mécontentement. Le président Ma leur a assuré que les négociations de libre-échange avec la Chine ne concernaient pas la politique et qu'elles ne porteront aucunement atteinte à la souveraineté de Taïwan. Mon gouvernement ne fera aucun compromis là-dessus. Nous espérons que ces 30 à 40 p. 100 de gens qui se disent souverainistes comprendront les intentions du président Ma.

Le sénateur Zimmer : Excellence, je suis ravi de vous accueillir parmi nous. Je vous remercie de votre déclaration liminaire. Avec votre permission, je vais poser aux deux témoins la même question. Pour quelles raisons, parmi les trois pays étudiés, est-ce que ce sont les relations de l'Australie et de Taïwan avec la Russie qui sont les moins développées? Est-ce que cela tient à la Russie? Dans quelle mesure l'absence de la Russie à l'Organisation mondiale du commerce a-t- elle freiné le développement des relations commerciales de l'Australie et de Taïwan avec ce pays?

M. Brown : Vous avez raison : parmi les trois pays étudiés par votre comité, ce sont les relations de l'Australie avec la Russie qui sont les moins développées. J'aimerais vous faire remarquer que la Russie est membre de l'APEC. C'est une tribune importante, qui nous a permis d'entreprendre une coopération avec la Russie sur un certain nombre de questions économiques.

Vous avez parlé de l'absence de la Russie à l'OMC, qui a eu un impact important. Les négociations avec les Russes se poursuivent depuis de nombreuses années. Ce sont surtout des produits agricoles que l'Australie cherche à exporter en Russie. Récemment, la Russie a décidé, après avoir signé plusieurs résolutions du G20 dénonçant le protectionnisme, de mettre en place un certain nombre de mesures protectionnistes et régressives. Cela fait déjà un certain temps que ce pays impose des barrières tarifaires importantes aux importations de produits agricoles. Il peut s'agir de barrières traditionnelles comme des quotas et des tarifs douaniers, ou de barrières moins traditionnelles comme des règlements imprévisibles qui concernent la sécurité des aliments et des mises en quarantaine. Nous estimons que l'adhésion de la Russie à l'OMC doperait considérablement les échanges et les investissements entre les deux pays, car cela l'obligerait à se conformer aux normes internationales qui encouragent le libre-échange et les investissements.

J'ai reçu des messages de notre mission de l'OMC au début de la semaine, et je suis encouragé par le nouvel élan qui semble animer les négociations, surtout grâce aux États-Unis. La réaction de la Russie a été encourageante et laisse présager une plus grande souplesse de sa part dans le secteur de l'agriculture. Nous espérons que ces négociations se termineront dans un proche avenir.

M. Lee : À propos des relations de la Chine avec la Russie, je dois avouer que nos relations sont beaucoup plus limitées, en comparaison de celles que nous entretenons avec le Canada. La Russie a toujours été très proche de la Chine. Pendant les 60 dernières années, et surtout pendant les 25 premières, la Russie a été le principal allié de la Chine. Étant donné les relations tendues qui existaient entre Taïwan et la Chine, la Russie évitait de travailler avec nous. Mais les temps ont changé, et nous avons aujourd'hui de meilleures relations avec la Chine.

Nous espérons qu'à l'avenir, la Russie envisagera d'un œil différent l'instauration de relations plus étroites avec Taïwan.

Le sénateur Wallin : Moi aussi je suis arrivée un peu en retard, et je vous prie de m'en excuser.

J'aimerais poser une question à l'ambassadeur Brown, mais M. Lee peut y répondre lui aussi.

Je pense aux comparaisons que les gens font souvent entre l'Australie et le Canada. Vous en avez peut-être parlé dans vos remarques liminaires, mais nous sommes en quelque sorte dans le même bateau. Nos deux pays sont situés à proximité d'énormes moteurs économiques, qui sont l'oxygène de nos économies. Mais nous sommes bien placés pour savoir que le libre-échange ne garantit pas des échanges toujours faciles et n'offre aucune protection contre le protectionnisme, dont la popularité actuelle aux États-Unis est due à la fois aux convictions du nouveau gouvernement et à la conjoncture économique.

Vivez-vous la même situation? Cela a-t-il un impact sur l'accord de libre-échange que vous êtes en train de négocier avec la Chine? J'aimerais bien savoir ce que vous en pensez.

M. Brown : Je vous remercie de votre question. L'Australie a des accords bilatéraux de libre-échange avec deux pays de la région : Singapour et la Thaïlande. Nous avons également signé un accord-cadre de libre-échange avec tous les pays de l'ANASE. Nous sommes en train de négocier avec la Chine et le Japon, et nous venons d'entreprendre des négociations avec la République de Corée et des discussions bilatérales avec la Malaisie.

Le sénateur Wallin : Les autres négociations sont bilatérales aussi?

M. Brown : C'est exact. Nous avons des accords avec les États-Unis et la Nouvelle-Zélande, mais en Asie de l'Est, ce sont ceux que je viens de vous mentionner.

Les accords sont très différents de l'ALENA en ce sens que leur portée réglementaire n'est pas aussi grande. Ils éliminent tous les tarifs et tous les obstacles visibles au commerce, ainsi que les nombreuses mesures discriminatoires qui s'appliquent aux services, au commerce et aux investissements, et ils encouragent l'instauration d'un environnement plus prévisible. Par contre, ils ne sont pas aussi élaborés et ne prévoient pas une intégration économique aussi poussée que l'ALENA. La raison en est évidente.

La plupart des pays en développement de l'Asie de l'Est imposent des barrières très élevées aux échanges commerciaux. J'ai été négociateur en chef de l'Australie pendant les négociations qui ont conduit à un accord de libre- échange avec la Thaïlande. Avant ces négociations, la Thaïlande imposait des tarifs douaniers de 250 et même de 300 p. 100 dans certains secteurs. C'est donc tout un défi que d'amener ces pays à accepter d'éliminer leurs barrières tarifaires.

Notre situation est un peu différente de la vôtre, au Canada. En effet, vous dépendez tellement du marché américain que le moindre changement apporté à leurs politiques de marchés publics peut avoir pour vous des conséquences importantes.

Dans le cas de l'Australie, nos échanges commerciaux avec les pays de la région sont constitués en grande partie de produits de base et de services. Même si les services sont très protégés et qu'il y a bien sûr quelques problèmes agricoles, pour un grand nombre de produits de base, le commerce est relativement libre. Les accords de libre-échange permettent en fait de bloquer les mesures de protection à un niveau assez bas et de prévoir leur diminution progressive, tout en empêchant un retour en arrière.

Nos attentes restent toutefois relativement modestes, car, pour nous, ces accords sont avant tout un moyen d'empêcher un retour en arrière. Bien sûr, il n'y a aucune garantie, et ces accords ne sont pas parfaits. En effet, ils ne peuvent pas empêcher des politiciens de prendre parfois des mesures qui vont à l'encontre de leurs objectifs, mais ce sont tout de même, à notre avis, des instruments importants pour amener les pays de la région à accepter le principe de la libéralisation des marchés, qui est le meilleur moyen d'assurer la prospérité de la région.

Le sénateur Wallin : La Chine est votre principal partenaire commercial, n'est-ce pas?

M. Brown : Pour le commerce des marchandises, oui.

Toutefois, si l'on fait le total des échanges commerciaux et des investissements, c'est-à-dire si l'on tient compte de l'ensemble de la relation économique, les États-Unis et l'UE sont encore des partenaires très importants. Et si l'on fait le total du commerce des marchandises, des services et des investissements, la Chine, les États-Unis et les 27 pays de l'UE sont pratiquement au même rang pour nous.

M. Lee : Tout le monde sait que Taïwan est une île. Elle a donc absolument besoin d'exporter et d'importer. En fait, les exportations et les importations représentent environ 130 p. 100 de notre PIB. L'intégration économique régionale est donc très importante pour nous, pour notre économie et pour l'avenir de notre pays.

Aujourd'hui, l'ANASE compte un pays de plus, et d'ici à l'année prochaine, elle en comptera trois de plus. Si Taïwan est exclue, imaginez l'impact négatif que cela aura sur le pays. C'est la raison pour laquelle le président Ma tient tellement à négocier un accord de type libre-échange avec la Chine; il sait que l'absence d'un accord de libre- échange aura des conséquences très négatives pour Taïwan. Nous savons tous qu'il s'agit là de relations internationales particulièrement délicates.

Trop souvent, l'objectif principal des pays est de maintenir une relation étroite avec la Chine car ils ont peur de la froisser. Si nous réussissons à améliorer nos relations et même à signer un accord de type libre-échange avec la Chine, cela encouragera beaucoup d'autres nations commerçantes à essayer de négocier quelque chose avec nous. Nous poursuivons donc la négociation de cet accord avec beaucoup d'enthousiasme.

Le sénateur Andreychuk : Quel serait l'avantage pour le Canada de s'engager dans une stratégie gagnant-gagnant- gagnant, comme vous l'appelez, avec la Chine et Taïwan? Vous avez dit qu'une telle stratégie serait très prometteuse, avec l'accord de libre-échange, mais ça c'est pour plus tard. Pour le moment, votre succès tient au fait que, étant donné l'importance des ressources de main-d'œuvre et, partant, de la capacité d'assemblage de la Chine, votre savoir-faire et vos connaissances vous donnent un certain avantage dans la R-D et dans certaines technologies.

Outre ce que nous avons réussi à accomplir jusqu'à présent, dans quels secteurs pensez-vous que nous pourrions nous améliorer en attendant la signature de l'accord de libre-échange?

M. Lee : Je continue de penser que le secteur de la haute technologie est sans doute un domaine que nous pourrions exploiter davantage ensemble. En fait, dans le domaine des TI et des TIC, nos deux pays jouissent de la même réputation internationale. C'est la raison pour laquelle je pense qu'il y a beaucoup de compatibilité et de complémentarité entre nos deux pays.

Avec le temps, le Canada et Taïwan vont avoir de nombreux échanges dans les domaines de la science et de la technologie, surtout en ce qui concerne les TI et les TIC. À ce propos, Pierre Coulombe, le président du Conseil national de recherches du Canada, m'a dit un jour, et il l'a répété en public, que c'est avec Taïwan que le CNR avait les échanges les plus fructueux. Il faut aller encore plus loin, non seulement pour que les organismes de recherche puissent travailler ensemble, mais aussi pour que les milieux de la haute technologie de nos deux pays puissent travailler ensemble. À mon avis, cela contribuera à enrichir nos relations bilatérales et nous aidera à développer le marché de la Chine élargie.

Le sénateur Andreychuk : Cela répond à ma question. Vous avez dit que nous devions miser sur ce que nous avions. Mais n'y a-t-il pas d'autres domaines que nous pourrions explorer, éventuellement dans l'optique d'un accord de libre- échange avec la Chine, le vôtre et peut-être aussi le nôtre? Le Canada a-t-il des capacités dans d'autres secteurs qui seraient complémentaires de celles de Taïwan et que nous aurions stratégiquement intérêt à développer en vue de notre implantation sur le marché chinois?

M. Lee : Pour le moment, je pense que la haute technologie reste le secteur le plus compétitif. Certes, le Canada a de nombreuses ressources naturelles et énergétiques, mais nous n'en avons pas, et par conséquent, nous ne pouvons pas renforcer votre avantage dans ce domaine. Pour ce qui est des produits de base, étant donné la distance, ils risquent de ne pas être très concurrentiels sur le marché chinois. Par conséquent, je continue de penser que l'information de gestion et le savoir-faire fondé sur les connaissances sont les créneaux que nous devrions continuer d'explorer.

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : Ma question s'adresse à Son Excellence Brown. Le gouvernement australien a récemment salué la réponse décisive de la Chine à la récession économique mondiale, c'est-à-dire le lancement de son ensemble de mesures de stimulation fiscale de 656 milliards de dollars. Selon vous, Votre Excellence, quel secteur de l'économie australienne sentira le plus rapidement les retombées de cette initiative chinoise?

[Traduction]

M. Brown : À mon avis, les avantages pour l'Australie sont de deux ordres. Premièrement, le plan de stimulation économique annoncé par la Chine porte surtout sur le développement des infrastructures. C'était déjà la tendance en Chine depuis quelques années, et cela a permis à l'Australie d'y exporter davantage de produits de base, notamment du minerai de fer. Nous pensons donc que, puisque le gouvernement chinois continue de mettre l'accent sur le développement des infrastructures, nos exportations de produits de base en bénéficieront.

Outre ses avantages économiques bilatéraux directs, nous estimons, comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, que le plan de stimulation économique adopté par le gouvernement chinois est important pour l'ensemble des pays de la région. La Chine a des accords de libre-échange avec les pays de l'ANASE, et, comme l'a indiqué M. Lee, il y a de plus en plus de coopération entre les pays de l'ANASE, la Chine, la Corée et le Japon. Dans la mesure où la région est de plus en plus intégrée sur le plan économique, le plan de stimulation économique de la Chine peut bénéficier à tous les pays de la région. Et parce qu'elles représentent approximativement les deux tiers ou les trois quarts de la totalité des exportations australiennes, nos exportations vers les pays de la région en bénéficieront aussi en ce sens qu'elles permettront d'atténuer les impacts de la récession des six à 12 derniers mois.

Le sénateur Zimmer : J'aimerais adresser ma question à Son Excellence le haut-commissaire, mais c'est en fait une question supplémentaire à celle du sénateur Wallin. Vous avez dit que la Chine et les États-Unis étaient vos principaux partenaires commerciaux. Où se situe le Canada?

M. Brown : Je vais vous dire quelques mots du contexte avant de répondre à votre question, si vous le voulez bien. Les relations économiques extérieures de l'Australie peuvent se résumer de la façon suivante : nos exportations et nos relations avec les pays de l'Asie de l'Est sont axées sur les produits de base. Nous leur exportons des produits de base et d'autres marchandises, ainsi que des ressources naturelles. Nos relations avec l'Europe sont axées sur les investissements, et nos relations avec l'Amérique du Nord sont axées sur les produits manufacturés, les services et les investissements. Chaque partenaire représente environ le tiers de notre engagement économique extérieur, si je peux m'exprimer ainsi.

Très franchement, le Canada est un partenaire commercial mineur pour l'Australie. Nous y exportons principalement du tourisme et du vin, bien sûr. Dans l'autre sens, le Canada exporte chez nous des produits de l'industrie aérospatiale et de la viande de porc. En comparaison de ce que vous exportez aux États-Unis, c'est infime, et cela s'explique facilement. Nos économies sont assez similaires, et nous n'avons donc pas les complémentarités naturelles qui existent, par exemple, entre l'Australie et la Chine ou l'Australie et le Japon.

En ce qui concerne les échanges entre le Canada et l'Australie, il convient de souligner que les investissements et les secteurs des mines et de la viticulture ont affiché une croissance importante ces derniers temps, surtout les investissements, dans les deux sens. À mon avis, ce sont les secteurs qui vont être les plus porteurs. Nous avons par ailleurs des systèmes de réglementation similaires, ce qui facilite la circulation des capitaux et des personnes, dans les deux sens, et va continuer de stimuler nos relations économiques pour les années qui viennent.

Le sénateur Zimmer : Merci. Je dois dire que vous avez du bon vin.

Le sénateur Di Nino : Sénateur Zimmer, j'espère que vous êtes allé en Australie pour apprécier non seulement ses bons vins mais aussi l'hospitalité chaleureuse des Australiens. Sinon, je vous encourage à y aller. Je n'enverrai pas la facture au haut-commissaire!

Merci de comparaître devant nous aujourd'hui. Il y a quelques semaines, j'ai lu dans un article que certaines entreprises chinoises ne fabriquent plus leurs produits sous des grandes marques. J'essaie de me souvenir de ces marques, mais il s'agissait uniquement de produits de consommation. Autrement dit, si nous voulons acheter leurs produits, nous devrons dorénavant acheter leurs propres marques. Êtes-vous au courant? Monsieur Lee, puis-je vous demander de répondre?

M. Lee : La récession mondiale nous a tous frappés, et la Chine n'a pas été épargnée. Afin de stimuler l'économie, le gouvernement chinois a décidé d'encourager la population de l'intérieur du pays à acheter davantage de biens de consommation. Comme cette population n'aurait probablement pas eu les moyens d'acheter des cellulaires et des téléviseurs à écran plat de grandes marques, le gouvernement a fait fabriquer des appareils de moindre qualité mais abordables pour ces gens-là, qui se vendent sous la marque Mountainside. En fait, Taïwan a beaucoup profité de cette stratégie. C'est notamment l'une de nos entreprises de conception de circuits intégrés qui a aidé les Chinois à concevoir les cellulaires destinés à cette population. C'est un autre exemple qui montre bien la souplesse et la rapidité d'adaptation des entreprises taïwanaises sur les marchés chinois.

Le sénateur Di Nino : Voulez-vous dire qu'ils fabriquent les deux types de produits, les produits pour l'exportation sous des grandes marques nord-américaines et européennes, et les mêmes produits sous leurs propres marques pour la consommation intérieure?

M. Lee : Que je sache, la plupart de ces produits sont destinés à la consommation intérieure, et ne sont même pas commercialisés dans les grandes villes. Ils sont disponibles dans les régions rurales et dans les régions économiquement défavorisées.

M. Brown : Nous avions constaté une certaine évolution. La Chine est l'usine du monde entier depuis longtemps, et elle a profité des nombreuses délocalisations opérées par les pays industrialisés. La fabrication sous licence est une caractéristique de l'économie chinoise.

Nous avons constaté que les fabricants chinois cherchent à faire plus de valeur ajoutée. Leur dépendance à l'égard des secteurs à faible coût de main-d'œuvre n'est pas nécessairement compatible avec une croissance durable. Bon nombre de fabricants chinois s'orientent maintenant résolument vers la commercialisation de leurs propres marques et de leurs propres produits, avec une forte valeur ajoutée, ce qui est conforme à un modèle d'entreprise tout à fait typique.

Le gouvernement australien estime qu'il s'agit là d'une évolution naturelle. Certains secteurs franchiront plus rapidement cette étape, tandis que d'autres se cantonneront dans des activités de production à faibles coûts pendant encore quelque temps.

Le sénateur Di Nino : J'aimerais vous poser une autre petite question, Excellence. Si elle l'a déjà été, je vous prie de m'en excuser. La Chine fait-elle beaucoup d'investissements directs en Australie?

M. Brown : Non, pas beaucoup. D'après les derniers chiffres que j'ai vus, la Chine occupait le 15e ou le 16e rang des investisseurs étrangers en Australie, ce qui est relativement mineur. En tout cas, elle est devancée par le Canada et par beaucoup d'autres pays.

Je disais tout à l'heure, en réponse à une question du sénateur Zimmer, que même si ses investissements sont relativement mineurs, ils ont été problématiques dans certains secteurs, notamment dans le secteur des ressources, où la Chine a essayé de faire l'acquisition d'entreprises australiennes. Cela a créé une certaine inquiétude, et on s'est demandé si le contrôle de ces entreprises par des intérêts étrangers servait les intérêts de l'Australie. Ça a été un problème, récemment, dans le secteur des ressources énergétiques.

Le sénateur Di Nino : Pour terminer, j'aimerais vous demander, Excellence — et encore une fois, si la question vous a déjà été posée, je vous prie de m'en excuser —, quelle est la position de l'Australie en ce qui concerne les fonds souverains, non seulement de la Chine mais de tous les autres pays?

M. Brown : Je serai bref car j'ai déjà essayé d'expliquer le régime que nous appliquons aux investissements étrangers. Il est semblable à celui du Canada. Selon ce régime, les investissements supérieurs à un certain seuil doivent satisfaire au critère de l'intérêt national, auquel nous avons récemment ajouté des critères qui s'appliquent précisément aux investissements effectués par des fonds souverains et des sociétés d'État. Notre objectif est de nous assurer que ces investissements sont commercialement crédibles, si je peux m'exprimer ainsi. Cela ne s'applique pas uniquement la Chine, mais à tous les autres fonds souverains, qu'ils viennent du Moyen-Orient ou d'ailleurs. En Australie, depuis quelque temps, les fonds souverains étrangers investissent surtout dans des portefeuilles d'actions, mais beaucoup s'intéressent de plus en plus à l'IDE. Les nouveaux critères que nous avons ajoutés visent les grosses sommes d'argent qui circulent d'un pays à l'autre, à la recherche d'acquisitions d'entreprises.

Le sénateur Corbin : Excellence, faites-vous de la pisciculture en Australie?

M. Brown : Oui.

Le sénateur Corbin : Bien. Exportez-vous beaucoup de poisson en Chine, au Japon et en Inde?

M. Brown : Oui.

Le sénateur Corbin : Pouvez-vous me donner une idée du volume?

M. Brown : Je vais devoir vous faire parvenir ces chiffres un peu plus tard.

Le sénateur Corbin : Je ne voulais pas vous mettre dans l'embarras.

M. Brown : Je vous en prie. Notre industrie de la pisciculture se limite essentiellement aux mollusques, aux crustacés et au saumon. Nous avons une industrie spécialisée dans les produits de la mer, qui dessert exclusivement les marchés de l'Asie septentrionale, notamment en ormeaux et en oursins, qui sont des produits de luxe. Nous avons aussi des industries qui se sont créées pour servir exclusivement les marchés japonais, coréen, chinois et taïwanais. Je serai ravi de vous fournir une réponse plus détaillée par écrit.

Le sénateur Corbin : Je suis content que vous ayez parlé du saumon parce qu'il y a quelques années, j'ai fait partie d'une délégation de parlementaires du Commonwealth en Australie, et nous avions soulevé le problème des importations de saumon canadien. Les Australiens prétendaient que notre saumon avait des maladies ou des parasites. J'aimerais savoir si cette question a été réglée depuis.

M. Brown : Je suis heureux de pouvoir vous dire qu'elle a été réglée. Cela a pris des années, mais le saumon canadien est maintenant disponible presque partout en Australie.

Le sénateur Corbin : À l'occasion du même voyage, je me suis rendu en Tasmanie, et j'ai été surpris d'apprendre que la majeure partie du bois était exportée, surtout vers la Chine pour ce qui est du bois brut. Est-ce toujours le cas?

M. Brown : Je suis désolé, mais je n'ai pas de chiffres précis en tête. Je sais que nous exportons beaucoup de copeaux de bois pour la production de papier, surtout à destination du Japon, et que la Tasmanie en exporte beaucoup. Nous exportons aussi beaucoup de bois d'œuvre vers l'Asie de l'Est, étant donné le boom de l'industrie de la construction dans cette région, dont j'ai parlé tout à l'heure. C'est un commerce très mineur par rapport à l'industrie du bois d'œuvre au Canada. Notre industrie est très embryonnaire, et on parle depuis longtemps, en Australie, de la façon dont on pourrait en faire une industrie durable. Dans certains coins de la Tasmanie, il y a des forêts anciennes d'une certaine valeur, et il faut trouver un juste milieu entre la nécessité de protéger ces ressources et les intérêts économiques des collectivités concernées, ce qui n'est pas sans rappeler la situation de certaines régions de la Colombie-Britannique.

C'est une petite industrie, axée essentiellement sur les besoins domestiques, mais qui dessert aussi des marchés d'exportation précis, surtout en Asie de l'Est.

M. Lee : Il y a un an et demi, je me suis rendu dans votre province, le Nouveau-Brunswick, à l'invitation de votre collègue, le sénateur Ringuette. J'ai eu l'occasion de rencontrer votre ministre des Pêches et Océans, et j'ai constaté que le Nouveau-Brunswick exportait beaucoup de produits du poisson à Taïwan. Comme vous le savez, notre pays est une île, et nous aimons tout particulièrement les poissons et les fruits de mer. Je crois que votre province exporte surtout des queues de homard et des crustacés congelés à Taïwan. Les fonctionnaires de votre ministère participent chaque année à des festivals et à des foires de fruits de mer à Taïwan. Nous avons avec votre province des échanges commerciaux importants pour ce qui est des produits de la mer.

Le sénateur Corbin : Vous pouvez acheter tout le homard que vous voulez cette année, car les pêcheurs ne tirent pas beaucoup d'argent de leurs prises.

Le président suppléant : Si vous le voulez bien, sénateur Corbin, nous laisserons le Comité des pêches et océans s'occuper de ce problème.

Le sénateur Corbin : Mais cela concerne le commerce.

Le président suppléant : Le sénateur Downe désire invoquer le règlement.

J'aimerais remercier M. Lee et M. Brown de nous avoir donné des témoignages extrêmement intéressants. Merci d'être venus.

Le sénateur Downe : Mon rappel au règlement concerne le témoignage du président d'Exportation et développement Canada, M. Siegel, devant notre comité. Lorsque je lui ai demandé si EDC finançait des entreprises qui faisaient affaire en Birmanie ou avec le gouvernement birman, M. Siegel a dit qu'il transmettrait sa réponse par écrit. Nous avons reçu deux lettres séparées. Après réception de la première, le greffier du comité a pris la peine d'insister auprès d'EDC, et nous en avons reçu une deuxième, adressée au président du Comité des affaires étrangères, le sénateur Di Nino, dans laquelle EDC explique ses politiques. Malheureusement, la question initiale reste sans réponse.

Permettez-moi de replacer toute l'affaire dans son contexte. À l'occasion d'autres réunions, j'ai posé les mêmes questions à des représentants du Régime de pensions du Canada, le RPC, et ils nous ont fait parvenir les documents nécessaires, ont répondu aux questions et ont organisé une séance d'information à l'intention des sénateurs que cela intéressait. Je sais que nous allons examiner le rapport du comité la semaine prochaine, et je voudrais donc que le greffier du comité envoie un courriel à EDC pour lui demander de répondre à ma question par oui ou par non, étant bien entendu, comme je l'ai indiqué dans ma question initiale, que je ne cherche pas à connaître les noms des entreprises.

La question que j'ai posée à EDC est la suivante : financez-vous des entreprises qui font affaire en Birmanie ou avec le gouvernement birman? La réponse est oui ou non, mais je ne la trouve pas dans les pages de réponses qu'EDC nous a envoyées.

Le président suppléant : Le greffier m'indique qu'il le fera très volontiers.

Le sénateur Andreychuk : J'aimerais savoir si les lettres ont été distribuées aux membres du comité. EDC hésite-t-elle à répondre par oui ou par non parce qu'il y aurait peut-être un financement indirect? Autrement dit, il se peut qu'EDC finance une entreprise qui opère par l'intermédiaire d'une autre entreprise. Si c'est le cas, j'aimerais bien le savoir. Il faudrait donc que leur réponse indique : « Pour autant que nous sachions, et cetera. »

Le sénateur Downe : EDC a dit qu'elle respectait la politique du gouvernement, qui est claire à ce sujet. Si elle le fait de façon indirecte, je suppose que la réponse est oui. Dans ce cas, je peux essayer d'obtenir le renseignement par l'accès à l'information ou par d'autres moyens. Je ne voudrais pas empiéter davantage sur le temps du comité, mais j'aimerais bien avoir une réponse à ma question. Les représentants du RPC ont donné une réponse claire et proactive. Le sénateur Nancy Ruth était présente lorsque les représentants du RPC en ont discuté. EDC, par contre, semblait vouloir esquiver la question avec des réponses très vagues.

Le sénateur Di Nino : Monsieur le président, je suis d'accord avec le sénateur Downe. Qu'il s'agisse d'une société d'État ou d'un ministère, lorsque nous posons une question, nous voulons une réponse. J'ai demandé au personnel de mon bureau de collaborer avec le greffier car j'approuve sans restriction la demande du sénateur Downe.

Le président suppléant : Le greffier va s'occuper du dossier et nous informera dès que possible.

(La séance est levée.)

 

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