Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international
OTTAWA, le jeudi 4 mai 2017
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, auquel a été renvoyé le projet de loi C-30, Loi portant mise en œuvre de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne et ses États membres et comportant d'autres mesures, se réunit aujourd'hui, à 10 h 30, pour étudier le projet de loi.
La sénatrice A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Chers collègues, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit ce matin pour poursuivre son étude du projet de loi C-30, Loi portant mise en œuvre de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne et ses États membres et comportant d'autres mesures.
Le comité est heureux d'accueillir les fonctionnaires d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Nous entendrons M. David Manicom, sous-ministre adjoint délégué, Politiques stratégiques et de programmes, et Mme Lisa Bokwa, directrice, Politique des visas, à la Direction générale de l'admissibilité.
Représentant Innovation, Sciences et Développement économique Canada, nous accueillons M. Mark Schaan, directeur général de la Direction générale des politiques-cadres du marché au Secteur de la politique stratégique, et M. Denis Martel, directeur de la Direction de la politique des brevets.
Les représentants d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada sont accompagnés de Mme Caroline Charette, directrice du Secrétariat de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne. Elle ne fera pas d'exposé, mais elle fait partie du groupe de témoins de ce ministère.
Je vois que beaucoup d'autres fonctionnaires sont ici; nous pourrions faire appel à eux pour des questions précises.
Nous commençons par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Souhaitez-vous faire un exposé? Bienvenue au comité, monsieur Manicom.
[Français]
David Manicom, sous-ministre adjoint délégué, Politiques stratégiques et de programmes, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada : Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant votre comité. Je suis ici aujourd'hui pour parler de la décision du ministère de lever les exigences de visa pour la Roumanie et la Bulgarie.
[Traduction]
Je sais que certaines personnes croient que cette décision est liée à l'Accord économique et commercial global.
Les décisions du Canada quant à sa politique en matière de visas sont prises en fonction d'une évaluation globale qui permet de soupeser les avantages et les risques liés à la levée de l'obligation de visa. Les critères inhérents au cadre de la politique des visas comprennent : les tendances socioéconomiques, les tendances relatives à la migration, l'intégrité des titres de voyage, la gestion frontalière, la sûreté et la sécurité, les droits de la personne, ainsi que les relations bilatérales et multilatérales.
Le commerce et les relations bilatérales ne constituent que l'un des nombreux critères pris en compte dans le processus décisionnel lié à la politique des visas que je viens de vous décrire.
Dans le cas de la Roumanie et de la Bulgarie, notre évaluation s'est déroulée sur deux ans. En 2014, le Canada s'est engagé, en vertu de l'Accord de partenariat stratégique, à permettre aux citoyens de tous les États membres de l'Union européenne de voyager sans visa, et ce, dans un effort du Canada de renforcer la collaboration avec l'Union européenne. Cela a marqué le début d'un processus approfondi, qui a bénéficié d'une excellente collaboration de la part de la Roumanie et de la Bulgarie, ainsi que de la Commission européenne.
Des représentants de mon ministère, d'Affaires mondiales Canada, de l'Agence des services frontaliers du Canada et de la Gendarmerie royale du Canada, ont participé à de nombreuses discussions et ont visité les deux pays afin de réunir de l'information pour compléter ces évaluations. Nous avons aussi consulté nos partenaires clés, dont les États- Unis, pour réunir de l'information sur les risques potentiels.
Après ces évaluations, IRCC et nos partenaires du gouvernement du Canada ont conclu que les deux pays répondaient aux critères de notre politique en matière de visas — que je viens de mentionner — en vue d'une exemption. Nous estimons que les deux pays délivrent des titres de voyage sûrs — un aspect fondamental de l'évaluation des risques —, gèrent efficacement leurs frontières et offrent une bonne collaboration internationale pour ce qui est des questions de migration et de sécurité.
Cela dit, toute décision liée aux visas comporte des risques, qui ont été analysés lors de notre évaluation. C'est pourquoi nous avons choisi de lever l'obligation de visa par étapes.
D'ici la levée complète des exigences relatives aux visas, le 1er décembre 2017, les voyageurs roumains et bulgares admissibles auront droit à une levée partielle de l'obligation de visa, grâce à l'élargissement du programme d'autorisation de voyage électronique, ou AVE, en mai 2017, dès cette semaine, en fait. Les personnes admissibles à ce programme sont les citoyens de la Roumanie et de la Bulgarie qui ont eu un visa de visiteur canadien au cours des 10 dernières années ou qui détiennent un visa de non-immigrant des États-Unis valide.
L'intention sous-jacente à la levée de l'obligation par étapes était d'accorder plus de temps aux gouvernements du Canada, de la Roumanie et de la Bulgarie pour qu'ils puissent apporter des améliorations aux politiques et aux programmes à l'appui d'une transition sans heurts vers un plein accès sans visa.
Comme toujours, nous nous réservons le droit de suspendre, individuellement, entièrement ou en partie, les voyages sans visa des ressortissants de l'un ou l'autre de ces pays, si la migration irrégulière devait augmenter ou s'il survenait d'autres circonstances contraires aux intérêts du Canada.
Madame la présidente, les voyages sans visa entre l'Union européenne et le Canada permettront de renforcer le commerce et les voyages entre nos pays, en plus de faciliter encore plus les étroites relations qu'entretiennent le Canada et l'Union européenne sur les plans de la culture, de l'éducation, de la famille et des entreprises.
[Français]
La décision de lever l'obligation de visa a été prise au terme d'une évaluation globale des avantages et des risques.
Je vous remercie, madame la présidente. Je répondrai maintenant avec plaisir aux questions du comité.
[Traduction]
La présidente : Merci. Merci de votre exposé.
Nous passons maintenant à Innovation, Sciences et Développement économique Canada.
Mark Schaan, directeur général, Direction générale des politiques-cadres du marché, Secteur de la politique stratégique, Innovation, Sciences et Développement économique Canada : Merci beaucoup de votre accueil, sénatrice Andreychuk et honorables sénateurs.
C'est un plaisir de revenir au comité. Nous sommes très heureux d'avoir l'occasion de discuter des modifications proposées à la Loi sur les brevets aujourd'hui.
[Français]
Dans le chapitre de l'AECG sur la propriété intellectuelle, le Canada a accepté d'apporter deux modifications au régime pharmaceutique canadien. La première modification consiste à fournir une période supplémentaire de protection pour les produits pharmaceutiques, ce qui sera fait par l'entremise d'un « certificat de protection supplémentaire ». La deuxième modification consiste à s'assurer que l'on accorde des droits d'appel équivalents et effectifs à toutes les parties dans le cadre de litiges en matière de brevets pharmaceutiques.
[Traduction]
Ces engagements sont mis en œuvre en modifiant la Loi sur les brevets de manière à assurer un équilibre, dans le système de brevets canadien, entre la promotion de l'innovation et des investissements pour de nouveaux médicaments et la garantie d'un accès en temps opportun à des médicaments génériques abordables.
Permettez-moi de vous dire quelques mots sur le régime des certificats de protection supplémentaire. Ce régime sera avantageux pour les titulaires de brevet pendant une partie de la durée de leur brevet consacrée aux activités de recherche et développement et aux approbations réglementaires, et contribuera à offrir des médicaments novateurs au Canada plus tôt. Cette période de protection sera assujettie à un plafond de deux ans afin de favoriser l'accès en temps opportun à des médicaments abordables. De plus, une exception est prévue pour permettre aux fabricants canadiens de médicaments génériques de fabriquer leurs produits pendant la période de protection aux fins d'exportation. Cette exception en matière d'exportation atténuera les répercussions de la protection supplémentaire sur la compétitivité de l'industrie canadienne des médicaments génériques, qui est importante du point de vue économique, à l'échelle mondiale.
L'engagement à offrir des droits d'appel équivalents et effectifs vise à corriger les situations où des entreprises pharmaceutiques innovatrices ne peuvent pas faire appel des décisions des tribunaux inférieurs. Le système sera mis en œuvre d'une manière qui permettra également de renforcer et de simplifier les litiges en matière de brevets pharmaceutiques en mettant fin à ce qu'on appelle les « doubles litiges ». Les modifications réglementaires remplaceront la procédure sommaire actuelle relative aux litiges en matière de brevets découlant du règlement par des actions complètes qui donneront lieu à des décisions définitives sur la validité et la contrefaçon des brevets. Ces modifications apporteront une plus grande certitude aux parties dans le cadre de litiges en matière de brevets, offriront une protection aux titulaires de brevets, assureront la commercialisation en temps opportun des médicaments génériques, et créeront une jurisprudence plus complète et davantage prise en compte.
[Français]
L'ensemble des dispositions de ce projet de loi liées à la propriété intellectuelle dans le secteur pharmaceutique contribuent à assurer un équilibre entre la promotion de l'innovation et des investissements, à veiller à ce que les Canadiens tirent avantage de l'accès à des médicaments novateurs et à des médicaments génériques à plus faible coût, et ce, tout en veillant à servir l'intérêt public grâce à des processus judiciaires efficaces et réfléchis.
[Traduction]
Le comité a appris que les détails relatifs au régime des certificats de protection supplémentaire, plus particulièrement le régime des litiges en matière de brevets pharmaceutiques, seront traités dans le règlement. Les questions visées par ce règlement sont très techniques et pourraient faire l'objet de changements à mesure que la science et les lois continuent d'évoluer. En traitant ces questions dans un règlement, le gouvernement peut rapidement et efficacement réagir à ces changements, s'il y a lieu.
Les travaux relatifs aux règlements sont en cours depuis plus de deux ans. Pendant cette période, de vastes consultations ont été menées auprès des membres de l'industrie pharmaceutique innovatrice et de l'industrie des produits pharmaceutiques génériques ainsi que d'autres intervenants possédant une expertise dans ce domaine.
Ces consultations étaient harmonisées avec les progrès réalisés à l'égard de la conclusion et la ratification de l'accord et de l'élaboration de la loi de mise en œuvre. Il était parfois seulement possible d'examiner certaines questions de politique après avoir effectué d'autres étapes du traité et après la conclusion des processus législatifs. En tout temps, des efforts ont été déployés pour faire preuve de la plus grande transparence possible, sans mettre en péril les objectifs généraux.
Ces commentaires ont été examinés et, si nécessaire, les préoccupations des intervenants ont été prises en compte dans les règlements. Lors de la mise en œuvre des nouveaux régimes, nous surveillerons le système afin de nous assurer qu'ils fonctionnent comme prévu et qu'ils répondent à l'objectif politique du Canada. De plus, nous continuerons de rencontrer les intervenants pour veiller à ce que leurs nouvelles préoccupations soient comprises et prises en compte.
[Français]
Nous vous remercions de votre attention, et nous serons heureux de répondre à vos questions.
[Traduction]
Le sénateur Downe : J'ai des questions pour les deux groupes d'experts. Je vais d'abord m'adresser aux représentants d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada.
Je crois comprendre que les consultations avec l'industrie concernant les modifications à la propriété intellectuelle pharmaceutique apportées dans le cadre de l'AECG sont toujours visées par une entente de confidentialité. Cela dure depuis plus de deux ans. Vous savez peut-être que lors de notre réunion du 13 avril, deux des principaux intervenants qui ont un intérêt pour cet enjeu ont demandé la tenue d'un processus de consultation plus ouvert et transparent avant la publication dans la Gazette du Canada. Ils souhaitent la publication des consultations; qu'est-ce qui vous en empêche?
M. Schaan : Permettez-moi d'abord de décrire le processus habituel de l'entrée en vigueur de la réglementation. Lorsque vous adopterez cette loi, vous accorderez un pouvoir de réglementation au ministre, qui l'utilisera pour publier la réglementation. Afin d'adopter, en temps opportun, une approche réfléchie à l'égard de la réglementation, nous avons travaillé en étroite collaboration pendant deux ans et demi, comme vous l'avez indiqué, avec les intervenants des deux côtés de même qu'avec diverses parties intéressées.
Étant donné que la loi n'est pas encore à l'étape de la version définitive et que nous n'avons toujours pas le pouvoir de prendre des règlements, c'est tout ce que nous avons pu faire jusqu'à maintenant pour nous assurer que ceux qui seront les plus touchés participent activement et aient une bonne compréhension de la réglementation à venir.
Le sénateur Downe : Que se passera-t-il lorsque le projet de loi sur l'AECG sera adopté et qu'il aura reçu la sanction royale? Je m'intéresse à la levée des dispositions de non-divulgation.
M. Schaan : La réglementation sera rendue publique dès l'entrée en vigueur de la loi. Toutes les dispositions de la loi pourront alors faire l'objet de discussions. Toute discussion antérieure sur les ébauches et d'autres aspects demeurera assujettie à l'entente de non-divulgation.
Le sénateur Downe : Vous dites qu'il ne sera pas possible de discuter des projets de règlement entre la sanction royale et la publication de la réglementation?
M. Schaan : Le public aura l'occasion de présenter ses observations ou d'examiner l'ébauche de règlement; il y aura un avis public. Comme je l'ai indiqué, les parties les plus touchées peuvent consulter le REIR et la réglementation depuis un certain temps déjà.
Le sénateur Downe : Qui participe à ces consultations, outre Médicaments novateurs Canada et l'Association canadienne du médicament générique?
M. Schaan : Nous avons principalement consulté les gens de l'industrie, puisqu'ils seront les plus touchés. Nous avons également discuté avec d'anciens membres de la magistrature et avec des juges spécialistes de la PI pour veiller à tenir compte de l'application concrète de ces mesures lors de procédures judiciaires.
Le sénateur Downe : Pouvez-vous nous fournir la liste des organismes que vous avez consultés, à part les deux organismes que j'ai mentionnés?
M. Schaan : Je crois que nous pourrons vous fournir la liste des groupes, mais pas les noms des personnes qui ont participé.
Le sénateur Downe : Pourquoi pas?
M. Schaan : Il faudrait d'abord obtenir leur consentement.
Le sénateur Downe : Pouvez-vous le demander? S'ils acceptent, pourriez-vous nous donner la liste?
M. Schaan : Oui.
Le sénateur Downe : Je vous en serais reconnaissant. Donc, vous allez leur demander et vous nous fournirez la liste s'ils acceptent; sinon, vous nous donnerez uniquement la liste des organismes, c'est cela?
M. Schaan : Oui.
Le sénateur Downe : Merci.
Ma prochaine question s'adresse au représentant d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Il y a quelques années, l'ambassadeur de la République tchèque a clairement indiqué à tous ceux qu'il rencontrait à Ottawa — il est même venu à mon bureau — que son gouvernement serait réticent à approuver l'AECG si l'exigence de visa n'était pas levée. Cette exigence n'a pas été levée, pour diverses raisons. Ce commentaire a été repris par les gouvernements de la Roumanie et de la Bulgarie, pour les mêmes raisons.
Pendant de nombreuses années, le Canada exigeait que les ressortissants roumains et bulgares présentent une demande de visa avant de venir au Canada. Je cite un document européen :
Ce sont principalement les taux de refus de visa et de violation des règles en matière d'immigration qui compromettent l'octroi de l'exemption de visa. Le seuil du taux de violation des règles en matière d'immigration est fixé en moyenne à moins de 3 p. 100 sur 3 ans; le seuil de refus de visa est fixé en moyenne à moins de 4 p. 100 sur 3 ans.
J'ai ensuite consulté le tableau connexe. Les données pour la Bulgarie indiquent que le taux de refus de visa était de 18,4 p. 100 en 2014, et de 14,5 en 2015; les taux pour la Roumanie, pour les mêmes années, étaient de 16,7 p. 100 et de 14,5 p. 100. Comment réagissez-vous aux préoccupations relatives à la baisse de ces taux?
La présidente : Sénateur Downe, pourriez-vous nous donner le document?
Le sénateur Downe : Je l'ai seulement dans une langue, mais je peux vous le fournir.
La présidente : Ce n'est pas ce que je veux dire. Pouvez-vous nous dire, aux fins du compte rendu, de quel document il s'agit?
Le sénateur Downe : Il porte un très long titre. Il se trouve sur la page des nouvelles du site de la Direction générale de la migration et des affaires intérieures à la Commission européenne; on lit notamment « [...] évaluant la situation de non-réciprocité avec certains pays tiers [...] ». Je peux vous donner l'adresse du site web, madame la présidente.
La présidente : Est-ce un document canadien?
Le sénateur Downe : Non; c'est un document européen, comme je l'ai indiqué. J'ai l'adresse du site web.
M. Manicom : Je suis désolé, sénateur Downe, mais je n'ai pas compris la fin de la question.
Le sénateur Downe : Les taux de refus de visa pour la Roumanie et la Bulgarie indiqués dans ce document sont plus élevés que ceux que le Canada considère habituellement comme acceptables. Quelles mesures prenez-vous pour les faire baisser? Quelles mesures prenez-vous pour les ressortissants roumains et bulgares?
M. Manicom : Les taux de refus des demandes de visa n'auront plus d'importance lorsque l'obligation de visa sera levée. Divers facteurs sont pris en compte dans cette décision. Nous avons divers indicateurs quantitatifs, dont le seuil de refus de visa, que la Roumanie et la Bulgarie ont dépassé. À cela s'ajoutent d'autres indicateurs quantitatifs, comme le seuil de violation des règles en matière d'immigration, établi à 3 p. 100. La Roumanie était en deçà de ce seuil. Il y a en outre le seuil du taux de demandes d'asile de 2 p. 100; le taux de la Roumanie était de 0,3 p. 100. Le pays avait des taux supérieurs ou inférieurs aux divers seuils quantitatifs. Comme je l'ai indiqué plus tôt, la décision a été prise en fonction de ces taux et de beaucoup d'autres facteurs. Je serais heureux de pouvoir en discuter de façon plus détaillée.
En ce qui concerne la réduction des taux de refus de visa, nous tenons certainement compte de divers facteurs. Pour ces deux pays, on ne parle généralement pas d'un risque lié à la sécurité, mais plutôt du risque de séjour indûment prolongé ou de la tendance relative à la demande d'asile. Nous renforcerons la collaboration avec les deux pays ainsi qu'avec l'Agence des services frontaliers du Canada afin d'améliorer l'échange de renseignements, les informations transmises aux ressortissants roumains et bulgares sur leurs droits et leurs privilèges lors de leur séjour au Canada et d'assurer une collaboration soutenue entre les organismes d'application de la loi de façon à atténuer les risques.
Le sénateur Downe : Vous avez dit que le taux d'infraction pour la Roumanie — j'ai parlé de 3 p. 100 — était de 2,4 p. 100. Quel est le taux d'infraction en Bulgarie?
M. Manicom : Cela varie d'une année à l'autre. Pour la dernière année complète, 2016, ce taux était de 2,2 p. 100.
Le sénateur Downe : Et en 2015?
M. Manicom : C'était 4,1 p. 100.
Le sénateur Downe : Selon le taux de refus des visas et les taux d'infraction de 2015, la Bulgarie ne serait pas admissible, mais nous avons besoin de son appui pour l'AECG?
M. Manicom : Non, je ne suis pas d'accord avec cela, monsieur le sénateur. Lorsqu'il s'agit de lever l'obligation de visa, tout n'est pas blanc ou noir; on n'applique pas simplement ces trois seuils numériques. On tient compte d'autres facteurs. Par exemple, le nombre de demandes d'asile est très faible dans les deux pays. L'économie de ces deux pays s'améliore. Le taux de chômage de la Roumanie est inférieur à la moyenne de l'Union européenne. Ces pays se développent rapidement. Ils ont fait beaucoup de progrès — et surtout la Roumanie — en ce qui a trait à l'amélioration des droits de la personne, à la réduction de la corruption dans la société et à l'inclusion des collectivités en situation minoritaire. Ce sont tous des facteurs qui entrent en jeu, en plus des avantages pour le Canada associés à la levée de l'obligation de visa : augmentation des déplacements, commerce accru, renforcement des liens. En aucun cas ces trois seuils statistiques ne constituent les seuls indicateurs valables.
Le sénateur Downe : Les taux d'asile étaient faibles, par contre. En exigeant le visa, on procédait à une présélection. Maintenant que l'obligation de visa est levée, on peut supposer que les demandes d'asile vont augmenter, comme c'est arrivé au Mexique.
M. Manicom : Le nombre de demandes d'asile est très élevé dans de nombreux pays qui exigent le visa : la Chine, le Nigeria, la Turquie et ainsi de suite. Le nombre de demandes d'asile permet de mesurer efficacement le risque associé aux personnes qui obtiennent un visa et qui se rendent au Canada d'une façon ou d'une autre, que ce soit en présentant des documents frauduleux ou en cachant leur réelle intention, ou encore en passant par les États-Unis... Il y a de nombreuses façons de faire.
En règle générale, le nombre de demandes d'asile continue d'être assez élevé dans de nombreux pays qui exigent un visa. Ce nombre est très faible en Roumanie et en Bulgarie.
Je ne suggère pas que le taux de refus des demandes de visa ne nous préoccupe pas; nous sommes préoccupés. Nous avons certainement tenu compte de ces facteurs. La baisse du taux d'infraction aux lois sur l'immigration et le faible nombre de demandes d'asile étaient deux mesures rassurantes. Je crois qu'il faut aussi tenir compte du développement socioéconomique de ces pays. Notre relation commerciale et diplomatique avec l'Union européenne a aussi pesé dans la balance.
Le sénateur Downe : Est-ce le gouvernement qui a ordonné au ministère de lever l'obligation de visa?
M. Manicom : Est-ce le gouvernement qui a donné la directive au ministère? Le ministère fait partie du gouvernement.
Le sénateur Downe : Le Cabinet, le Bureau du Conseil privé?
M. Manicom : Je ne vais pas parler des discussions du cabinet ou de celles avec le bureau du premier ministre. Le gouvernement du Canada a pris la décision.
Le sénateur Downe : Vous savez que le premier ministre a appelé les chefs de ces deux pays directement pour leur dire qu'on allait lever l'obligation de visa à titre de contrepartie pour l'approbation de l'AECG?
M. Manicom : Non. Je sais que le premier ministre a communiqué avec les leaders européens, puisque le ministère l'appuyait à cet égard. Sur la recommandation du ministre de l'Immigration, le premier ministre a fait valoir à ses homologues que le Canada avait procédé à l'évaluation des politiques en matière de visas et avait conclu que la Roumanie et la Bulgarie étaient admissibles à une dispense de visa.
Le sénateur Downe : Quelle est votre disposition de retour aux droits antérieurs? À quel moment allez-vous rétablir le visa? Est-ce que votre décision sera rendue publique?
M. Manicom : Non, ce n'est pas de l'ordre public. Je ne crois pas qu'on rendra cette décision publique. Nous allons une fois de plus utiliser un ensemble calibré de mesures ou d'indicateurs en fonction du contexte général de la relation.
Lorsqu'on aura terminé l'examen de la politique en matière de visas, on décidera de rendre publique ou non la décision relative au rétablissement de l'obligation de visa. Nous procédons à l'examen cette année, mais pour le moment, je crois que ce serait contre-productif.
[Français]
La sénatrice Saint-Germain : J'ai deux brèves questions à poser à M. Manicom. Je vous remercie de la clarté de vos propos. Je comprends que le rôle des ambassades et des consulats, dans le cas de visas, est de faire en sorte de les faire lever. Je comprends également de vos propos que les visas étant levés pour la Roumanie et la Bulgarie, une série d'autres facteurs qui préservent la sécurité nationale continuent de s'appliquer, notamment l'action du SCRS, l'action des douaniers et votre propre action, au ministère, avec d'autres moyens que vous avez pour les ressortissants des pays qui n'ont pas de visa. Dans un souci de clarté, pouvez-vous brièvement expliquer les autres moyens que vous utilisez lorsque les ressortissants d'un pays n'ont pas besoin de visa pour entrer au Canada?
M. Manicom : Je vous remercie. C'est une question très intéressante. En fait, la situation est différente maintenant quand on lève l'exigence d'un visa, étant donné que le système d'autorisation électronique est en vigueur. Ce système fait en sorte que les citoyens des pays exemptés de visa, notamment les Suisses, les Français et les Australiens, demandent une vérification électronique. Cela permet au gouvernement du Canada de vérifier l'identité des personnes grâce à nos bases de données pour la criminalité et la sécurité. Ce n'est pas exactement la même chose que demander un visa, ce qui implique de soumettre beaucoup de documents et peut-être de participer à une entrevue pour discuter du but de la visite. Ce n'est pas la même chose, mais c'est une occasion pour le Canada de s'assurer, par exemple, que la personne n'est pas déjà connue de la GRC.
Ce système sera en place, et comme étape intermédiaire entre les deux pays, on donnera cette autorisation électronique seulement aux citoyens qui ont déjà eu un visa canadien ou qui ont actuellement un visa américain. Cela nous donnera six ou sept mois d'essais pour déterminer où sont les risques avant la levée complète des visas en décembre.
Chaque personne doit bien sûr passer à la douane, où elle pourrait être envoyée en entrevue secondaire pour être interrogée plus longuement dans le cas d'indicateurs négatifs.
La sénatrice Saint-Germain : Ma prochaine question s'adresse à M. Schaan. Vous avez parlé de la délivrance de certificats supplémentaires pour obtenir les brevets pharmaceutiques. On sait qu'il y a plusieurs étapes et des délais importants dans la délivrance des brevets. Avez-vous déterminé si la hausse des demandes sera importante? Est-ce que l'impact sur les délais sera grand? Envisagez-vous des mesures pour réduire ces délais au maximum?
M. Schaan : Vous voulez dire les délais d'entrée pour les nouveaux produits au Canada?
La sénatrice Saint-Germain : Oui, c'est exact. Je fais référence aux nouveaux certificats supplémentaires pour obtenir les brevets pharmaceutiques.
M. Schaan : Pour les médicaments génériques ou pour les innovateurs?
La sénatrice Saint-Germain : À vous de choisir. Pour les deux.
M. Schaan : Ma réponse concernera les deux. Pour le protocole innovateur, le certificat de protection supplémentaire donnait une période de deux ans, à la fin du brevet, pour une autre période de protection. Il y a aussi une mesure dans le règlement qui indique, si nécessaire, l'entrée des produits au Canada en temps opportun.
[Traduction]
Nous avons mis en place une mesure pour veiller à ce que l'accès rapide pour les Canadiens soit l'une des conditions à remplir pour recevoir le certificat de protection supplémentaire.
Nous avons aussi mis en place des mesures d'atténuation visant l'accès rapide aux produits génériques. La période de protection maximale est de deux ans, ce qui permet d'introduire le produit générique sur le marché assez rapidement après la prolongation de la durée du brevet.
En ce qui a trait au processus d'approbation réglementaire, il y a aussi des mesures associées au droit d'appel pour mettre fin aux doubles litiges, qui devraient permettre un accès rapide aux audiences en matière de brevets de même qu'une certaine finalité grâce au nouveau processus que nous mettons en place, qui ne modifie pas le processus réglementaire dont se sert Santé Canada pour approuver les nouveaux médicaments, mais qui accroîtra la certitude du marché de sorte que les joueurs entrent plus rapidement au Canada.
Le sénateur Marwah : Je crois que la directrice du Secrétariat de l'AECG, Mme Charrette, sera la mieux placée pour répondre à mes questions.
Le Royaume-Uni a entrepris de quitter l'Union européenne et il se peut que des mouvements de plus en plus populaires s'étendent à la France et à l'Allemagne; on parle aussi de l'Italie. Comme vous le savez, ces mouvements populaires s'opposent au commerce et sont eurosceptiques. Est-ce que ces mouvements pourraient avoir une incidence négative sur l'AECG ou sur le Canada? Dans l'affirmative, avons-nous des dispositions pour nous protéger?
Caroline Charette, directrice, Secrétariat de l'Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l'Union européenne, Affaires mondiales Canada : Je vous remercie de votre question, sénateur. Vous m'excuserez, mais je ne m'attendais pas à ce genre de questions. Je vais répondre de mémoire et en me fondant sur les discussions précédentes, mais ma réponse ne sera peut-être pas aussi exhaustive que je l'aurais souhaité.
À la suite de l'approbation de l'AECG par le conseil, tous les États membres — les 28 États membres, y compris le Royaume-Uni — ont exprimé leur appui à l'égard de l'AECG. Le Parlement européen a aussi approuvé l'AECG, selon une majorité de près de 60 p. 100, si ce n'est plus.
À l'heure actuelle, nous croyons avoir l'appui de tous les États membres, y compris le Royaume-Uni, qui demeure membre de l'Union européenne jusqu'à la fin du processus.
Nous avons déjà reçu la ratification nationale d'un État membre. Au cours des prochains mois, nous nous attendons à recevoir celle de cinq ou six autres États membres, qui se sont dits prêts.
C'est la situation avec laquelle nous travaillons pour le moment.
Si le contexte mondial donne lieu à d'autres discussions sur la pertinence de l'Union européenne, celles-ci se tiendront au sein de l'Union européenne et n'auront pas nécessairement une incidence directe sur l'AECG.
La sénatrice Cordy : Je remercie tous les témoins.
Hier, nous avons entendu les représentants du Conseil canadien du commerce de détail, qui se demandent quand on éliminera les droits, puisque les commerçants passent leurs commandes des mois à l'avance. Ils aimeraient le savoir. Pourriez-vous leur répondre?
Je vous poserais aussi la question suivante : à quel moment croyez-vous que les modifications apportées aux lois et règlements du Canada seront mises en œuvre? Je crois qu'elles entraîneront certaines conséquences. Avez-vous une échéance?
Mme Charette : En ce qui a trait à l'élimination des droits et au Conseil canadien du commerce de détail, au premier jour de la mise en œuvre provisoire de l'AECG, nous croyons que 98 p. 100 des droits seront éliminés.
La sénatrice Cordy : Dès qu'il recevra la sanction royale?
Mme Charette : Non. Dès que nous aurons convenu avec l'Union européenne de son application provisoire et que nous aurons décidé de la date connexe.
Il faudra apporter certaines modifications réglementaires après la sanction royale. Je crois qu'on y a fait référence. Le Conseil du Trésor étudiera ces modifications. En parallèle, nous allons convenir d'une date d'application provisoire avec la commission.
Lorsque le Conseil du Trésor aura approuvé la réglementation, nous pourrons procéder à l'application provisoire. C'est à ce moment-là qu'on retirera les droits de presque tous les produits, à l'exception de certains produits qui seront assujettis à une élimination progressive. On éliminera toutefois près de 98 p. 100 des droits dès le premier jour.
La sénatrice Cordy : Savez-vous combien de temps prendra ce processus? Je sais que vous ne pouvez pas donner une date exacte, comme le 15 octobre, mais avez-vous une idée générale du temps qu'il faudra pour suivre le processus réglementaire et mettre en place toute la réglementation?
[Français]
Mme Charrette : Dès que le projet de loi à l'étude devant ce comité aura reçu la sanction royale, nous allons mettre de l'avant le processus de modifications réglementaires pour la mise en œuvre de l'accord. Ces modifications seront soumises au Conseil du Trésor pour approbation et seront ensuite publiées dans la Gazette du Canada. Nous aviserons l'Union européenne dès que possible que le processus de mise en œuvre est complété, pour confirmer la date d'application provisoire.
Le gouvernement a exprimé à plusieurs reprises son désir que le Canada et l'Union européenne mettent en œuvre l'AECG le plus rapidement possible. Le premier ministre l'a dit devant le Parlement européen. Nous travaillons actuellement afin que la mise en œuvre puisse avoir lieu très rapidement. Il a été question du printemps ou de l'été. J'espère qu'on pourra le faire dans de très brefs délais après la sanction royale. Cependant, je ne peux pas présumer des dates de la sanction royale, de l'adoption de la loi et des décisions du Conseil du Trésor.
[Traduction]
La sénatrice Cordy : Lorsque vous aurez publié les modifications réglementaires dans la Gazette du Canada, allez- vous tenir une consultation publique? Nombre des personnes que nous avons consultées comprennent que nous ne pouvons pas changer l'AECG; que le Canada dira oui ou non. Hier, le chef des opérations de Fraser River Pile and Dredge nous a fait une suggestion; une recommandation seulement, à mettre en œuvre une fois qu'on aura conclu l'AECG.
Allez-vous consulter certaines personnes qui ont témoigné devant le comité ou peut-être d'autres personnes touchées de près par ce projet de loi? On pourrait peut-être traiter de leurs préoccupations dans la réglementation. Y aura-t-il des consultations publiques?
[Français]
Mme Charette : Je crois que tous les ministères impliqués dans les modifications réglementaires ont déjà mené des consultations avec les différents intervenants. La période entre la sanction royale et la mise en œuvre que l'on envisage étant assez courte, une décision devrait être prise d'exempter ou non la publication préalable des réglementations. Cette décision sera prise par le Conseil du Trésor, au cas par cas.
[Traduction]
La sénatrice Cordy : Allez-vous tenir compte des observations du comité et de la Chambre des communes?
Mme Charette : Pardon. Je ne comprends pas la question.
La sénatrice Cordy : Si nous adoptons le projet de loi et que nous y présentons nos observations, allez-vous les prendre en compte?
Mme Charette : Je suis certaine que tous les ministères responsables des modifications réglementaires vont tenir compte des observations de votre comité et d'autres comités. Tout à fait.
Le sénateur Gold : Ma question fait suite à celle de la sénatrice Cordy.
Plusieurs témoins ont dit ne pas avoir été consultés ou ne pas savoir que l'accord allait toucher leur industrie ou leur secteur.
[Français]
Certains groupes ont témoigné devant nous, nous indiquant qu'ils n'avaient pas eu la chance de discuter avec vous de l'impact de l'accord dans leur domaine respectif. En ce qui a trait à ces groupes, un processus est-il envisagé pour faire en sorte qu'ils puissent exprimer leurs préoccupations?
Mme Charette : En ce qui concerne les consultations en général dans le cadre de l'AECG, j'aimerais vous rappeler que, dès le début des négociations, de nombreuses consultations publiques ont été organisées dans les provinces et les territoires. Les résultats de ces consultations ont été pris en considération tout au long des négociations de l'accord. À la suite de la mise en œuvre de la réglementation, je pense que les différents ministères responsables des différentes réglementations seront toujours ouverts à entendre les commentaires de toutes les parties intéressées à tout moment.
Le sénateur Gold : Merci.
[Traduction]
La présidente : On a tenu des consultations tout au long du processus. Ce qui m'a surprise, c'est qu'on a tenu plus de consultations avec les intervenants au début du processus, mais l'accord mise beaucoup sur la réglementation. Lorsqu'on consulte les intervenants d'un secteur, leur participation et les enjeux auxquels ils sont confrontés ne sont pas les mêmes au début du processus que lorsque le gouvernement décide de leur participation à l'accord et de la façon de le mettre en œuvre au Canada.
Chat échaudé craint l'eau froide. Cela me fait penser à une loi, dont j'ai oublié le titre, mais qui visait à expédier des médicaments génériques dont l'Afrique avait désespérément besoin. On a tenu toutes sortes de consultations sur la façon de faire, et cetera. Est venue ensuite la réglementation. Je crois que nous avons envoyé un seul chargement de marchandises, alors que la loi aurait permis au Canada de changer les choses là-bas. Le problème, c'était la réglementation.
Les groupes disent avoir été entendus. Ce qu'ils ne savent pas, c'est si on les a écoutés et si l'on a tenu compte de leurs idées dans la réglementation.
On se préoccupe des produits pharmaceutiques. Oui, on les a entendus, mais, comme vous l'avez dit, monsieur Schaan, ces intervenants sont la clé de la mise en œuvre de l'accord au nom du Canada; ils se préoccupent des coûts et de l'accès à l'Europe et vice versa.
A-t-on tenu des consultations sur la réglementation et est-ce que les intervenants ont pu voir des ébauches? Je ne veux pas les voir. Je veux qu'ils soient au courant. Ils vous ont conseillé sur la façon de faire de votre accord une réussite. Je veux savoir : est-ce que la réglementation reflète leurs idées? Je ne parle pas de manquer à votre obligation de confidentialité, mais j'aimerais vous entendre, parce que ces gens nous disent qu'ils n'ont pas obtenu de rétroactions. On fait fi de la transparence et de la reddition de comptes.
Vous ne manquerez pas à votre obligation de confidentialité si vous leur transmettez des renseignements généraux... J'ai travaillé assez souvent à huis clos pour savoir qu'on ne peut donner des faits, mais on peut faire part de nos conclusions. Est-ce que vous entretenez ce genre de dialogue ouvert et respectueux?
M. Schaan : Je vous remercie de votre question.
Dans le cadre du processus qui a mené à la décision relative à la réglementation des produits pharmaceutiques pour la mise en œuvre de l'AECG, nous nous sommes astreints à un processus de consultation extraordinaire qui dure depuis deux ans et demi. En fait, il a commencé lorsque j'ai témoigné devant le comité en avril 2016 pour faire part des principes généraux associés à la mise en œuvre de la réglementation, et nous avons travaillé dans le cadre d'une entente de confidentialité avec les deux parties les plus touchées, étant donné la nature technique de la réglementation. Nous avons commencé par des principes généraux, puis nous sommes passés à une réglementation provisoire et à l'ébauche du REIR. Les deux parties visées par l'entente de confidentialité ont eu un accès important au processus et ont pu savoir à quoi ressemblerait la réglementation.
En ce qui a trait à la mesure dans laquelle nous avons écouté leurs préoccupations et leurs enjeux, je dirais que tout au long du processus, nous avons dûment pris en compte les propositions faites par Médicaments novateurs Canada et par l'Association canadienne du médicament générique. Ce sont des sujets très techniques et nous avons consulté les personnes qui avaient des connaissances spécialisées à cet égard. Les intervenants ne sont pas d'accord avec certaines décisions politiques du gouvernement et ils ont exprimé clairement leur désaccord. Lorsque nous avons pu le faire, nous avons modifié la réglementation en conséquence.
La présidente : Mais, est-ce qu'ils le savent? Ce qui me pose problème, c'est que vous dites que vous allez rédiger la réglementation, puis elle est consignée au registre public. À ce moment-là, il est trop tard. Il faut alors se battre pour faire changer la réglementation. On peut discuter d'un sujet, mais lorsqu'on rédige les règlements, certains problèmes peuvent survenir.
Depuis longtemps, le Sénat doit modifier les lois parce que certains des mots utilisés ne font pas l'affaire. Il en va de même pour les règlements. De nos jours, une grande partie des projets de loi est intégrée à la réglementation; il est donc important d'avoir notre mot à dire. Lorsque les règlements sont publiés, nous n'avons plus le contrôle et l'industrie non plus.
M. Schaan : En ce qui concerne la nature technique — et mon collègue voudra peut-être intervenir —, comme je l'ai dit, dans les discussions techniques concernant l'entente de confidentialité, nous avons discuté de la réglementation avec les parties les plus touchées. Au cours des deux dernières années et demie, un processus rigoureux a été suivi quant à la préparation des ébauches et non seulement pour les principes généraux, mais aussi pour le texte en tant que tel.
La présidente : Ce que je veux dire, c'est que tant l'industrie que le comité seront très peu satisfaits si, après sa publication, les règlements ne sont pas applicables ou ne répondent pas aux besoins de l'industrie et du public, car on l'aura prédit.
C'est en quelque sorte une mise en garde que nous vous faisons, c'est-à-dire que nous examinerons les règlements de façon individuelle et peut-être en groupe.
Je ne veux pas monopoliser la discussion, car je veux que nous commencions le second tour.
La sénatrice Eaton : J'avais une question liée à celle du sénateur Downe, sur l'immigration.
Si je me souviens bien, les mesures liées aux visas ont été prises en raison du nombre de Roms qui demandaient l'asile, n'est-ce pas?
M. Manicom : Pas directement, sénatrice. Nous avons toujours imposé un visa pour ces deux pays.
La sénatrice Eaton : Si, soudainement — et vous en avez probablement parlé en répondant à la question du sénateur Downe, mais j'aimerais vraiment que vous le répétiez —, le nombre de demandeurs d'asile de certains pays d'Europe augmentait, après la signature de l'AECG, nous pourrions imposer de nouveau l'obligation de visa, non?
M. Manicom : Oui. Le Canada a le droit d'imposer de nouveau un visa en tout temps, et avec notre nouveau mécanisme d'autorisation de voyage électronique et notre capacité de faire la distinction entre ceux qui présentent des risques élevés et ceux qui présentent des risques faibles, nous pourrions imposer des visas partiellement.
La sénatrice Eaton : Qu'entendez-vous par « partiellement »?
M. Manicom : Nous levons partiellement l'obligation de visa pour ces deux pays à l'heure actuelle; nous permettons aux gens qui ont déjà obtenu un visa canadien ou qui ont un visa américain de demander une autorisation de voyage électronique plutôt qu'un visa.
La sénatrice Eaton : Qu'est-ce que cela signifie?
M. Manicom : Cela signifie que, comme pour les citoyens de tous les pays pour lesquels aucun visa n'est exigé — Australie, Japon, Suisse, et cetera — qui doivent maintenant demander une autorisation de voyage électronique, qui coûte 7 $ et qui ne requiert que deux ou trois minutes pour la plupart des gens, cela nous permet de faire une vérification dans nos bases de données canadiennes sur des antécédents criminels connus, des demandes d'asile antérieures, et cetera. Il s'agit d'un mécanisme de contrôle léger que nous appliquons pour tous les voyageurs dispensés de l'obligation de visa, sauf les Américains. Nous pourrions partiellement imposer de nouveau l'obligation de visa, par exemple, si le nombre de demandeurs d'asile membres d'une minorité ethnique, comme les Roms, augmentait.
La sénatrice Eaton : Donc, l'AECG n'empêchera pas les ministères des Affaires étrangères et de l'Immigration d'imposer de nouveau l'obligation de visa si le nombre de demandeurs d'asile augmente trop. Vous pourriez le faire?
M. Manicom : Oui, nous pourrions le faire. Il n'y a aucun lien entre l'AECG et la levée de l'obligation de visa.
Le sénateur Downe : Il n'y a aucun lien entre l'AECG et la levée de l'obligation de visa, mais c'était une condition pour que la Roumanie et la Bulgarie approuvent l'AECG. Comme vous le savez, il s'agit d'un accord provisoire, ce qui signifie qu'on peut s'entendre pour ce qui relève exclusivement de l'Union européenne, mais il faut que tous les États membres ratifient la partie restante parce qu'elle ne relève pas exclusivement de l'Union européenne. Le rétablissement de l'imposition de l'obligation de visa pour ces pays, s'ils n'ont pas ratifié la deuxième partie de l'AECG en tant qu'un des 28 pays membres, pourrait poser problème.
Grosso modo, quelle proportion des recommandations sur le rétablissement des visas est rejetée par le Cabinet ou le bureau du ministre? Si vous ne le savez pas, pourriez-vous nous envoyer l'information? Nous savons tous que dans le cadre d'accords, il faut faire des compromis de part et d'autre, et de toute évidence, c'est l'une des concessions que vous avez faites. Si le nombre augmente, comme l'a indiqué la sénatrice Eaton, et que le ministère le recommande, mais que le gouvernement est grandement préoccupé par le commerce, alors les Canadiens seront confrontés à des problèmes de sécurité.
Dans le cas du Mexique, le gouvernement avait établi un nombre précis. Il a dit aux Mexicains que si le nombre de demandeurs d'asile était supérieur à ce nombre — les médias en ont parlé, quoique le gouvernement n'en a jamais fait l'annonce —, il imposerait de nouveau l'obligation de visa. Le gouvernement a-t-il dit à ces deux pays quel était le nombre? Vous n'avez pas à me le fournir. Je me demande si on en informe les pays et si on les informe aussi de la proportion des recommandations qui sont rejetées.
M. Manicom : Pour répondre à votre première question, je vous dirais que le gouvernement ne leur a pas communiqué de nombre.
Le sénateur Downe : Nous l'avons fait dans le cas du Mexique, mais pas pour ces deux pays?
M. Manicom : C'est exact.
Je ne crois pas pouvoir répondre à votre autre question, sénateur, car comme vous le savez, lorsqu'on prépare un mémoire au Cabinet, tous les ministères touchés sont consultés. Souvent, avant sa présentation au Cabinet, le mémoire fait l'objet de longues discussions entre les ministères pour soupeser les avantages et les risques.
Le cadre de la politique des visas de notre ministère tient compte d'autres éléments que les risques liés au visa. Il s'agit d'une évaluation complète en soi.
Je ne sais pas si quelqu'un, au ministère — ce n'est certainement pas mon cas —, sait quelle proportion des mémoires au Cabinet liés aux levées de l'obligation de visa ont été adoptés au Cabinet au cours des dernières décennies. Je ne sais pas si cette proportion est importante, car bon nombre d'initiatives ne sont pas présentées au Cabinet parce que les ministères ne sont pas arrivés à un consensus.
Tout cela pour dire qu'il arrive que le Canada impose de nouveau des visas; nous surveillons attentivement l'évolution des choses. Or, quand nous décidons de le faire, il y a le même équilibre quant aux facteurs. Parfois, les facteurs tels que la sécurité liée aux demandes d'asile, les taux de séjours indûment prolongés et la menace à l'intégrité de notre système de migration géré sur lequel repose la confiance du public sont tellement importants que d'autres facteurs ne pèsent pas assez lourd et nous imposons de nouveau l'obligation de visa.
En ce qui concerne la question de la sénatrice Eaton, j'allais dire que divers pays européens ont beaucoup de difficulté à intégrer leurs minorités ethniques. Nous imposons des visas à certains d'entre eux — la Roumanie et la Bulgarie — et n'en imposons pas à d'autres — Hongrie, République tchèque, Slovaquie et Slovénie. Dans le cas de certains de ces pays, le taux de demandes d'asile présentées par des membres de ces minorités ethniques est très faible, comme la République tchèque; et dans d'autres cas, il est très élevé, comme la Hongrie.
Ces tendances sont difficiles à cerner, et nous les surveillons de près pour déterminer si à un moment donné, elles nuiront aux intérêts du Canada à un point tel que nous devrons envisager d'imposer l'obligation de visa à nouveau.
La sénatrice Cordy : Les modifications touchant la propriété intellectuelle dans l'AECG qui portent sur le double litige ont des répercussions sur le système judiciaire fédéral parce qu'il est question des causes liées à l'industrie pharmaceutique. Avez-vous discuté avec le juge en chef de la Cour fédérale ou à tout membre de la Cour fédérale des répercussions que cela aurait sur eux?
Denis Martel, directeur, Direction de la politique des brevets, Innovation, Sciences et Développement économique Canada : Oui, avec le juge en chef et un membre actuel de la magistrature. Cela a été fait avec des membres du barreau qui pratiquent dans le domaine de la propriété intellectuelle pour nous assurer que nous respectons les compétences de l'exécutif et du judiciaire. Or, ils sont tous bien au courant des changements et ont aussi pris connaissance d'un projet de règlement. Ils seront en mesure de les mettre en œuvre dès que l'AECG aura été ratifié.
La présidente : Au nom du comité, j'aimerais vous remercier d'être venus nous donner de l'information supplémentaire concernant les préoccupations qui ont été soulevées par les témoins qui ont comparu avant vous.
Vous savez que nous sommes conscients que nous ne pouvons pas changer l'AECG et que nos observations sont liées à la mise en œuvre du projet de loi C-30. Je suis certaine que vous avez lu notre rapport sur les accords commerciaux, mais la mise en œuvre préoccupe très sérieusement notre comité, c'est-à-dire que lorsqu'on signe des accords commerciaux, ils sont mis en œuvre dans une perspective économique globale, si je peux m'exprimer ainsi. Je ne peux vous promettre que c'était votre dernière comparution devant nous, mais je peux vous dire que vos témoignages d'aujourd'hui nous aident dans le cadre de notre étude. Merci.
Honorables sénateurs, nous accueillons maintenant notre prochain témoin. Il s'agit de Mme Adriana Vega, directrice de la politique internationale à la Chambre de commerce du Canada.
Je crois comprendre que vous avez une déclaration préliminaire à faire. Nous passerons ensuite aux questions. Bienvenue.
Adriana Vega, directrice, Politique internationale, Chambre de commerce du Canada : Merci beaucoup, madame la présidente. Je remercie également les membres du comité d'avoir invité la Chambre de commerce du Canada à participer à cet exercice. Je suis ravie d'être ici aujourd'hui.
Je suis accompagnée de mon collègue, M. Peter Casurella, et je suis désolée de l'ajout de dernière minute. Il représente la Chambre de commerce de Lethbridge, en Alberta. Il fait partie de notre réseau de chambres qui oriente notre processus. Il est toujours agréable de connaître leur point de vue.
Comme vous le savez probablement, notre organisme appuie depuis longtemps l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne, ou l'AECG. Je suis désolée si je répète des renseignements que vous connaissez déjà, mais je vais essayer d'être brève.
L'AECG est un accord moderne extrêmement positif pour l'économie canadienne. Nous l'avons déjà dit auparavant, mais il vaut la peine de répéter que la Chambre de commerce du Canada salue le travail acharné qu'ont accompli des politiciens comme Jean Charest et Ed Fast, qui ont mené de longues négociations et qui ont rapproché le Canada du but. Dans la période qui a suivi, la ministre Freeland a placé le Canada dans une position de force, en surmontant de grands obstacles en prévision de la signature de l'accord.
Les entreprises canadiennes ont été très bien servies par notre gouvernement et par nos négociateurs commerciaux, anciens et actuels. La chambre tient en haute estime M. Steve Verheul, notre négociateur en chef pour l'AECG.
L'AECG tombe à point nommé. À l'échelle mondiale, la croissance du commerce a diminué presque de moitié depuis la grande récession de 2008, et les perspectives mondiales pour le libre-échange ont radicalement changé au cours des derniers mois.
Chose inquiétante, à une époque où l'on a bien besoin du libre-échange pour stimuler la croissance, l'OMC a découvert que parmi les pays membres du G20, plus de 1 000 nouvelles mesures de restrictions commerciales avaient été imposées. C'est une situation très critique pour un pays qui dépend du commerce comme le Canada. L'AECG est le type de mesure nécessaire pour renverser la tendance, augmenter les échanges commerciaux et obtenir des résultats économiques pour notre pays.
En tant que bloc, l'Europe est déjà au deuxième rang des partenaires commerciaux du Canada, et l'AECG fournira un cadre qui appuiera les relations déjà dynamiques et fructueuses entre le Canada et l'Union européenne.
Une fois mis en œuvre, l'AECG éliminera les droits sur presque tous les produits canadiens exportés vers les pays de l'Union européenne; on parle d'environ 98 p. 100 des lignes tarifaires. Ce fait, à lui seul, justifie l'adoption rapide du projet de loi C-30. Au-delà de la réduction des droits de douane, les dispositions de l'accord constituent ce que nous considérons comme les éléments les plus importants.
Un libre-échange accru dans le secteur des services et le commerce numérique, la réduction des effets des obstacles réglementaires, la certitude politique et une plus grande souplesse quant à la circulation de professionnels spécialisés stimuleront grandement le commerce transatlantique au cours des années à venir. C'est ce qui définit l'AECG comme un accord moderne, puisqu'il répond aux aspects complexes du commerce d'aujourd'hui.
Avec ses 500 millions de consommateurs, l'Union européenne est le plus grand marché unique de biens et de services au monde. L'AECG donnera au Canada un avantage concurrentiel dans ce marché, puisqu'il s'agit du premier accord de libre-échange que l'Union européenne signe avec une nation du G7.
Nous devons désormais nous concentrer sur sa mise en œuvre, comme il en a été question au cours de la comparution du groupe de témoins précédent. Ici, au Canada, nous pensons que pour tirer la meilleure part de cet excellent accord, un effort concerté s'impose.
De plus, nos membres attendent avec impatience l'établissement d'un cadre réglementaire qui comprend des engagements pris dans le cadre de l'AECG, comme ceux qui concernent la propriété intellectuelle, comme il en a été question, après de vastes consultations publiques. Sénatrice Cordy et madame la présidente, vous l'avez soulevé auparavant.
Le comité pourrait souligner qu'il est important que le gouvernement continue à collaborer étroitement avec les entreprises pour élaborer des stratégies de promotion du commerce et diffuser des renseignements dans tout le Canada sur ce que cet accord signifie pour toutes les entreprises du pays. S'il existe des moyens pour la chambre de s'associer à des acteurs pertinents pour ce faire, nous sommes prêts à contribuer à ce que cet accord soit une réussite.
La présidente : Merci.
Vous pourriez peut-être nous expliquer votre processus, car la chambre est présente dans de petites et de grandes villes, partout au Canada. Avez-vous communiqué avec vos membres d'abord pour demander leur avis, et l'avez-vous fait secteur par secteur ou leur avez-vous simplement demandé généralement ce qu'ils pensaient de l'accord avec l'Europe? Autrement dit, est-ce que votre processus a aidé de petits centres, de petites et moyennes entreprises, à comprendre que ce processus mené avec l'Europe peut leur offrir des possibilités? Des témoins nous ont dit que ces accords commerciaux sont signés. Les grandes industries et les grandes entreprises savent comment en bénéficier, mais cela a peu d'effets sur les petits centres et les petites entreprises, et leurs horizons ne s'ouvrent pas davantage.
Mme Vega : Absolument. Je vous remercie de la question.
Comme vous le savez, il y a un réseau de chambres de commerce partout au pays, qui compte plus de 400 chambres dans les différentes provinces. Nous pouvons consulter les membres de diverses façons concernant divers dossiers de politique. En fait, nous avons un certain nombre de comités qui se concentrent sur différents aspects, et de petites et moyennes entreprises font partie de ces comités.
À la chambre, nous avons un Comité des PME, par exemple. Le Comité des affaires internationales, que je dirige, comprend des représentants de chambres de commerce qui, en retour, comptent des PME parmi leurs membres.
Notre processus de consultation a lieu après une assemblée générale annuelle durant laquelle nous présentons des recommandations de politiques et les défendons auprès du gouvernement fédéral. Entre autres, accroître les activités commerciales et l'accès aux marchés semble être une recommandation permanente. Ce sont les demandes que nous entendons de la part de nos collectivités locales. Nous les présentons.
En ce qui concerne des accords comme le PTP ou l'AECG, nous en discutons régulièrement avec notre réseau de chambres de commerce. Notre Comité des affaires internationales se réunit et entend le point de vue de ses membres, dont ceux qui représentent de petites chambres, et nous incluons ces observations dans nos discussions avec le gouvernement fédéral.
La réponse est donc oui. Nous n'avons pas de méthode de consultation structurée lorsqu'il s'agit d'un accord commercial, mais nous avons la capacité de faire des sondages, de consulter nos représentants des politiques des chambres régionales et d'obtenir leur avis.
Toutefois, je dirais que les petites chambres de commerce ont des préoccupations au sujet de l'accès à l'information pour les PME. Nous espérons continuer de collaborer étroitement avec le gouvernement et de trouver des moyens de faire en sorte que toutes les entreprises du pays aient accès à l'accord.
La présidente : C'est l'accès à l'accord. Est-ce que la chambre a sa propre stratégie de mise en œuvre?
Mme Vega : Pour l'instant...
La présidente : C'est vous qui connaissez l'accord et vos membres, c'est fondamental. Avez-vous une stratégie pour aider vos membres à en profiter plutôt que d'attendre l'aide du gouvernement?
Mme Vega : Absolument. Nous faisons partie du groupe de consultation qui a rencontré le gouvernement. Nous demandions à répétition aux gens du Service des délégués commerciaux quelles étaient les stratégies à privilégier et comment nous pouvions y participer. Certaines chambres membres de notre réseau mettent surtout l'accent sur le développement des affaires, par exemple, et travaillent en partenariat avec le gouvernement afin d'organiser des événements et de diffuser l'information.
De notre côté, je crois que notre rôle en est surtout un de coordination, pour que nos membres soient en contact étroit avec les organismes gouvernementaux qui peuvent les aider à en profiter. Nous sommes prêts à participer à d'autres consultations et à entendre les observations des divers membres du réseau sur la meilleure façon dont nous pouvons les aider à en profiter. Pour l'instant, nous nous sommes surtout efforcés de les écouter, de transmettre leurs points de vue au gouvernement et de jouer un rôle de liaison.
Le sénateur Gold : J'ai deux questions. Pouvez-vous réagir un peu au rapport récent du directeur parlementaire du budget, selon qui les gains économiques que nous retirerons de l'AECG seront peut-être plus modestes que certains de ses tenants le laissent entendre? J'aimerais savoir ce que vous pensez des avantages économiques que nous en retirerons dans l'ensemble.
Ma deuxième question est assez connexe : au Canada, d'après vos discussions avec vos membres et les différentes chambres, y a-t-il des secteurs de l'économie canadienne qui pourraient souffrir d'une concurrence accrue et de l'accès à un plus grand nombre de biens et services en provenance de l'Europe, d'après vous? Y a-t-il des secteurs qui vous préoccupent et avez-vous des recommandations à nous faire ou à faire au gouvernement pour atténuer ces effets potentiellement négatifs?
Mme Vega : Merci, sénateur.
Au sujet des avantages économiques, nous vivons actuellement une période très intéressante pour le libre-échange. Comme nous l'avons vu et comme je l'ai mentionné dans mon exposé, la croissance du commerce mondial a beaucoup diminué. Les prix des produits de base sont à la baisse. Ce n'est pas le meilleur moment pour faire des prévisions à long terme. Il est toujours difficile de faire des comparaisons de scénarios avec ou sans l'AECG.
Quoi qu'il en soit, je pense que la relation est établie. La relation économique entre l'Europe et le Canada est très forte. Nous avons des relations commerciales très fortes avec les pays européens, si bien que l'AECG est un bon moyen non seulement pour établir un cadre mais pour favoriser un engagement entre les entreprises canadiennes et les entreprises européennes qui ne se serait peut-être pas créé sinon. J'ai lu des rapports selon lesquels les avantages économiques pourraient être plus modestes que prévu, mais je ne pense pas que nous puissions en tirer de conclusions pour les 20, 30 ou 40 prochaines années.
Nous avons l'ALENA depuis plus de 20 ans, et je pense que dans l'ensemble, nous pouvons dire que ses avantages ont surpassé de loin les coûts qui y sont associés. Et puisqu'on parle ici d'un accord moderne qui alimentera le commerce moderne entre des pays comme le Canada et les pays membres de l'UE, ce peut être un accord global positif à long terme.
Pour répondre à votre deuxième question sur les différents secteurs, à ce stade-ci, nous sommes de plus en plus conscients que le libre-échange crée beaucoup de gagnants, mais les avis sont partagés sur la question de savoir si tous les avantages se feront sentir partout en même temps. Il y a place à la discussion sur ceux qui souffriront du libre- échange. L'AECG a fait l'objet de consultations en profondeur.
Je comprends qu'il y a des groupes ou des secteurs qui ressentiront les effets d'une concurrence accrue. Par exemple, nous avons entendu les producteurs laitiers nous dire que le gouvernement les a consultés en long et en large. Des dispositions ont été prises afin de créer des fonds d'innovation pour leur permettre de demeurer concurrentiels, et il y aura une période de transition. Pour l'instant, nous ne sommes pas particulièrement inquiets pour un secteur ou un autre. Nous cherchons surtout à déterminer à quoi ressemblera le cadre réglementaire, mais nous sommes assez contents de cet accord et de ce projet de loi.
La présidente : Je crois que nous avons fait le tour des questions. Vous nous avez bien résumé votre appui, avec tous les qualificatifs possibles, si je peux le dire ainsi, mais vous êtes optimiste et souhaitez continuer d'y travailler. Je vous remercie d'avoir comparu devant le comité au nom des 400 chambres de commerce du Canada.
Honorables sénateurs, nous passerons maintenant à huis clos pour quelques minutes.
(La séance se poursuit à huis clos.) |